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BLACK-ATMO/FOLK   |  STUDIO

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2021 Har
 

- Style : Darkestrah, Selvans, Yaşru
- Membre : Syn Ze Sase Tri
- Style + Membre : Negură Bunget
 

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DORDEDUH - Har (2021)
Par WËN le 13 Septembre 2021          Consultée 3429 fois

Passé le délai nécessaire pour s'imposer un recul suffisant, peut-être est-il enfin temps de revenir sur le dernier effort de l'un des - sinon le - meilleur(s) groupe(s) roumain(s) en activité (*). Bien sûr, vous le savez, historiquement notre petit cœur de pierre reste attaché aux Carpates dénudées et inhospitalières de NEGURĂ BUNGET, mais avec le décès (encore trop) récent de Gabriel 'Negru' Mafa - seul rescapé du trio d'origine - et le reste de son dernier line-up parti fonder le fortement recommandable SUR AUSTRU, il était tout à fait logique que DORDEDUH se hisse sur le trône laissé vacant.

Logique ? Tout à fait, car parmi les quatre ermites qui le servent, tous ont déjà divers faits d'armes au sein de la scène roumaine à leur actif, tout particulièrement les dénommés Cristian 'Sol Faur' Popescu (guitares, claviers) et Edmond 'Hupogrammos' Karban (chant, guitare, claviers et autres folk-eries), justement têtes pensantes du NEGURĂ BUNGET de la grande époque jusqu'à son "Om" de 2006 (**), parangon de Black Atmo/Folk s'il en est. Suite à des tensions internes pour divergences musicales et au désistement de notre duo, DORDEDUH voit le jour et accouche rapidement d'une démo, d'un titre sur un tribute à ENSLAVED ("Ruun", pour l'excellent "Önd" paru chez Pictonian, 2012), puis d'un premier album plaçant déjà la barre très haut en termes d'ambiances et de dépaysement. Car laissez-nous vous dire, que chez DORDEDUH, là non plus, on ne plaisante pas avec le folklore de sa Roumanie natale.

Déjà fabuleux, "Dar-De-Duh" (2012), n'était pas non plus à proprement parler une surprise puisque, tirant sa substantifique sève des mêmes pinèdes que NEGURĂ BUNGET, l'affiliation semblait somme toute évidente, même si à bien s'y plonger, nous restons convaincus que cette immersive première étude de DORDEDUH semblait davantage rendre hommage aux ruraux échos de son peuple, là où son aîné avait pris l'habitude de jouer la carte des sombres et mystérieuses forêts. Mais qu'importe, l'effort se devait d'être salué et peut-être était-il en quelque sorte à considérer plutôt comme une confirmation avant l'heure. Car le véritable ébahissement, la fameuse 'confirmation' que tout auditeur patenté est en droit d'attendre d'un second jet, c'est bien avec ce cru de 2021 qu'elle ne manquera de faire poindre ses feuillus atours.

Ébahissant, oui, voici sans doute le terme le plus indiqué au moment de définir au mieux ce nouvel album de DORDEDUH ! Des premiers soubresauts de "Timpul Întâilor" (les vents, les cordes, les chœurs) aux ultimes nappes de notes de "Văznesit", c'est à un véritable trip musical auquel la formation nous convie là. C'est en tout cas en terrain connu que débutera notre périple, au gré d'un riffing séculaire et de son lot d'accompagnements folk et traditionnels de rigueur, en charge de nous dépeindre ses Carpates natales, à fleur de peau. Le fond de l'air est frais, la caillasse abrasive et, sans surprise, les parties Black Metal sont, forcément, de la fête. Mais si celles-ci ne manqueront jamais de venir nous titiller de leurs effluves boisées via un riffing emballé (souvent clairsemé au sein même des morceaux, cf. "Timpul Întâilor", "De Neam Vergur") venant nous enserrer la jugulaire, ou via de sournois râles de strigoï (la voix qui hante les forêts transylvaniennes depuis plus de vingt ans, c'est bien celle d'Hupogrammos), nous percevrons rapidement qu'en cela ne réside plus le seul intérêt du combo. C'est d'ailleurs logique - et fort souhaitable - qu'en neuf années le groupe ait su évoluer, peaufiner sa formule tout en l'affermissant.

En effet, moins brouillardeux que "Om" bien qu'un certain mysticisme sache toujours se terrer dans les replis escarpés de sa trame (les arpèges saturés et la flûte fantomatique de "În Vieliștea Uitării", l'intro de "Vraci De Nord", les menaces latentes tapies au sein de "Desferecat") ou à travers de leads sorties du fond des bois, c'est parfois l'âpre Roumanie héritée du feeling propre à un "N'Crugu Bradului" (de NEGURĂ BUNGET, 2002) qui se dessine fugacement en toile de fond… mais toujours avec ce petit plus que DORDEDUH savait déjà apporter dès son premier disque, cet amour de la roche à nu, des plateaux désolés, où seules les brises transylvaniennes, chargées d'histoire et de mythes, osent venir fouetter nos sens… Mais c'est un constat, sur "Har", les zéphyrs semblent s'ébattre davantage, secoués par le poids des âges pour soudainement se calmer et nous faire planer quelque part au-dessus d'inexplorés et sauvages paysages.

En ce sens, la rafraîchissante escapade Post Rock/instru du duo durant l'épisode SUNSET IN THE 12TH HOUSE (***) se ressent maintes fois ici, déposant ainsi sur ce disque la plus magnifique des empreintes (la première moitié de "De Neam Vergur", lorsque les guitares se greffent à la partition folk du cru), non dénuée d'une certaine pureté farouche. On y découvre un DORDEDUH désireux de proposer de nouvelles choses en laissant une place franche aux claviers ("Vraci De Nord", "Desferecat" et leurs surprenants débordements orchestraux) sur des tempos plus frais qu'à l'accoutumée. De même, les chœurs, rituels, la jouent serrée face aux chants extrêmes de rigueur, prenant plus d'une fois l'avantage pour donner une tournure presque initiatique à ce voyage musical. Voyez le clip extrait de "Desferecat" pour vous en convaincre : chamanique, hypnotique, rythmé au gré des percussions d'une prégnante simandre (toacă), tout est en place pour ce rite de passage nécessaire vers d'insoupçonnées nouvelles contrées de l'esprit. Laissons-nous happer : simandre, dulcimer, bucium et même mandoline, le quartette n'a une fois de plus pas lésiné sur les instruments traditionnels pour donner davantage de grâce et d'épaisseur à son propos. Idem, qu'il s'agisse du lumineux "Descânt" ou de l'épique "De Neam Vergur" les petites tentatives de débordements Prog de bon aloi apportent elles aussi leurs effluves nouvelles et parfois solennelles à sa partition. Cerise sur le château, le son est tout bonnement prodigieux, clair, ample et fourmillant de détails. Lorsque Jens Bogren prend sur lui pour respecter la vision inhérente à un groupe, ça va tout de suite mieux (le virage sonore nous rappelant ici celui abordé par ENSLAVED sur son fameux "Riitiir").

Ce qui au final est magnifique - et donc éblouissant - sur ce sophomore, ce n'est pas seulement tout ça : ce Black Atmo, ces parties folk tour à tour initiatiques ou menaçantes, cette pincée de Prog révélatrice, ces orchestrations. Non (ce n'est pas). Ce qui, ici, ne va manquer de nous transporter, c'est à n'en point douter ce talent des quatre Roumains à mélanger tous ces éléments au sein même de chacun des huit titres présentés ici, pour les ressortir en un tout magnifié et transfiguré. Car si son premier album, malgré ses innombrables qualités, pouvait rester très scolaire dans son approche car attaché à son immémorial héritage, DORDEDUH sans jamais renier ses racines, va cette fois bien plus loin, parvenant à brasser tout ça en une formule pour l'instant assez unique, mine de rien. C'est bien simple, "Har" se révèle comme une suite ininterrompue de 'moments préférés' pour, les écoutes s'enchainant, un émerveillement n'ayant de cesse de se renouveler.


PS : Prophecy Productions ne déroge pas à ses éditions coutumières (CD, vinyle et artbook). L'artbook a le mérite de partager une palanquée d'illustrations signées Costin Chioreanu en parfaite osmose avec l'idyllique vision de DORDEDUH, ainsi qu'une poignée de bonus (un CD 2-titres comprenant une version rallongée de "Vraci De Nord"… mais alors pourquoi ne pas la faire figurer sur le CD 1 en remplacement dudit titre ?) et un concert - audio et video - donné au Quantic de Bucarest en l'honneur des dix ans du groupe. Nous y retrouverons d'ailleurs une version préliminaire de "De Neam Vergur" ainsi que deux morceaux de l'ère NEGURĂ BUNGET.


===

(*) CLOUDS et EYE OF SOLITUDE (qui s'affranchissent des frontières, mais qui demeurent sous l'égide du prolifique et insaisissable Daniel Neagoe), cette autre Doomerie qu'est DESCEND INTO DESPAIR, le Prog de The THIRTEENTH SUN et cet élégant et magnifique trip Post Rock/Metal Atmo instru tout en légèreté qu'est SUNSET IN THE 12TH HOUSE (mais nous y reviendrons), nous viennent aussi en tête et ne sauraient être oubliés lorsque l'on parle de formations roumaines de qualité…

(**) Jusqu'à "Mãiestrit" (2010, le réenregistrement de "Mãiastru Sfetnic"), pour être précisément exact, mais dur dur de le considérer comme un album à part entière.

(***) Voyez, nous y sommes revenus.

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- Hupogrammos (chant, guitare, claviers, mandoline, bucium)
- Sol Faur (guitare, claviers, dulcimer)
- Andrei Jumugă (basse, chant)
- Putrid (batterie, percussions, sim, re)


1. Timpul întâilor
2. În Vieliștea Uitării
3. Descânt
4. Calea Magilor
5. Vraci De Nord
6. Desferecat
7. De Neam Vergur
8. Văznesit



             



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