Ce disque risque véritablement d’en décontenancer plus d’un. En effet, pour celles et ceux qui connaissaient le vocaliste Todd La Torre officiant dans QUEENSRŸCHE depuis déjà quelques années en lieu et place de l’éminent Geoff Tate, la surprise peut être de taille. Car ils n’ont certainement pas encore tout vu ou tout entendu de ce que le chanteur floridien est capable de réaliser même si on le savait talentueux. Et je me plaçais parmi ceux-là. Ce premier album solo de Todd La Torre a en tout cas le mérite de proposer autre chose que du QUEENSRŸCHE. C’est déjà pas mal non ? Ce disque s’avère même être au final une sacrée belle surprise (pour ne pas dire une réussite) et présente le vocaliste et instrumentiste (car c’est Todd qui assure les parties de batterie sur le disque) sous un autre apparat, soit une facette bien plus agressive que celle qu’on lui connaît dans QUEENSRŸCHE. Et le résultat est pour ainsi dire excellent !

Accompagné de son fidèle lieutenant et ami, l’étonnant Craig Blackwell (je dis étonnant parce que le type fait un travail tout à fait exceptionnel sur la galette) qui s’est occupé des guitares, de la basse et des quelques claviers que l’on perçoit ci et là, Todd La Torre a décidé de lâcher incontestablement les chevaux sur des compositions parfois surprenantes il faut bien le reconnaître (le bonus track "One By One" et ses vocaux extrêmes en est le meilleur exemple) et ultra Heavy pour la majorité d’entre elles. Car ne tournons pas autour du pot, "Rejoice In The Suffering" est assurément un disque qui ne fait pas dans la dentelle et présente des compositions particulièrement lourdes, véloces, féroces même à l’image de ce "Vanguards Of The Dawn Wall", agrémentées notamment de grosses guitares bien rugueuses et laissant place à des riffs tranchants et incisifs ("Darkened Majesty", "Hellbound And Down"). D’ailleurs, pour tout vous dire, j’adore le son de gratte déployé sur le disque (on est parfois proche d'ANNIHILATOR cf. "Hellbound And Down") !

"Rejoice In The Suffering" est par conséquent une putain de galette qui me rappelle d’ailleurs et à bien des égards les premiers pas d’un Rob Halford avec FIGHT ("War Of Words" -1993-). En effet, on y retrouve à de multiples endroits la même force de frappe avec des titres ultra puissants qui envoient quand même du lourd (le tapageur "Dogmata", "Rejoice In The Suffering", "Darkened Majesty"), limite bourrinage même (le carrément Thrash "Vanguards Of The Dawn Wall") avec un Todd La Torre vocalement virulent et évoluant même dans des registres très aigus proches d’un Rob Halford ("Pretenders", "Darkened Majesty", "Vanguards Of The Dawn Wall" ou encore "Rejoice In The Suffering" et son refrain QUEENSRŸCHien) quand il ne s’agit pas de vocaux plus graves limite grognements ("Vanguards Of The Dawn Wall", "Hellbound And Down"). Impressionnant !

Ce premier album solo de Todd La Torre est un album de Heavy Power Metal par excellence, pas ringard pour un sou bien au contraire, et qui possède même quelques touches assez modernes à l’image du très Heavy (limite Thrash) "Hellbound And Down" un brin chaotique ou bien de ce monstrueux et lancinant "Critical Cynic", un des meilleurs morceaux de l’opus (sinon le meilleur, et puis techniquement parlant on a affaire ici à du très haut niveau) et ses quelques vocalises là encore grognées et presque venimeuses de Todd lesquelles renforcent incontestablement l’aspect écrasant et NEVERMORien du morceau.

Des morceaux assez directs pour ne pas dire coups de poing donc qui contrastent néanmoins avec quelques autres compositions de l’album, plus élaborées et par conséquent plus progressives aussi. On mentionnera notamment la power ballade qu’est "Crossroads To Insanity", morceau très ambiancé, plus sombre et un brin mélancolique, sur lequel Craig Blackwell étonne d’ailleurs par sa faculté à occuper l’espace, et à briller de toute pièce que ce soit au niveau des arpèges distillés mais également au niveau des soli tout en finesse qui clôturent le morceau.

Si on citera également "Vexed", titre qui débute comme une ballade (Todd La Torre me file le frisson dans l’introduction avec ses vocalises tout en délicatesse) mais qui se révèle être rapidement un titre bien plus pêchu que prévu (il y a aussi d'excellents moments sur ce titre au final assez QUEENSRŸCHien dans l'esprit, notamment au niveau du refrain), on s’attardera davantage sur le très beau "Apology", composition beaucoup plus calme (malgré la présence d'un growl !) et tout en nuance avec cette sublime ambiance déployée presque onirique et pouvant même rappeler pour le coup le dernier PSYCHOTIC WALTZ ("The God-Shaped Void"), l’ombre du grand QUEENSRŸCHE se profilant en arrière-plan. Des compositions plus progressives donc, qui tendent d’ailleurs à équilibrer l’album et qui sont surtout propices à ce que Todd La Torre retrouve aussi des tonalités vocales auxquelles il nous a habitués chez QUEENSRŸCHE.

"Rejoice In The Suffering" constitue donc une sacrée mandale en ce premier trimestre 2021, et confirme tout le bien que l’on pensait de Todd La Torre, le vocaliste / batteur, en plus de bien jouer à la batterie, faisant étalage de toute sa palette vocale (limite caméléon) et profitant des compositions très agressives de l’album (pour la plupart en tout cas) sur lequel son ami fidèle Craig Blackwell brille également de tout son plein (cf. "Darkened Majesty"). Un disque au final assez moderne, plutôt varié mais homogène malgré tout, aux sonorités nettement plus lourdes que celles d’un album de QUEENSRŸCHE (vous l’aurez compris), et plus proches de celles d’un FIGHT voire d’un NEVERMORE. Bien évidemment, je recommande vivement l’écoute de ce disque !

Morceaux préférés : "Critical Cynic", "Darkened Majesty", "Vanguards Of The Dawn Wall", "Apology".

La curiosité : le bonus track "One By One".