De tous les groupes à sortir des albums en 2020, HOUSE OF LORDS n’était certainement pas le plus attendu. Une telle persévérance de la part des musiciens pourrait avoir quelque chose d’admirable s’ils avaient encore quelque chose à espérer. La gloire leur a échappé, ils se contentent de leur noyau dur de fans qu’ils régalent d’album à intervalles réguliers, tous les deux ans en moyenne (trois ici mais bon !). Ces derniers seront de toute façon aux anges. Ils trouveront ce qu’ils cherchent, ce qu’ils attendent de la formation, ni plus, ni moins. Mais comment convaincre, comment appâter le chaland qui n’a jamais posé une oreille sur un seul disque de HOUSE OF LORDS et qui croyait, un peu benoîtement, que c’était une institution politique anglaise ?

Les Américains ont eu leur heure de gloire à la fin des années 80, début 90, notamment avec l’album "Sahara", un petit bijou de Hard Mélodique aux refrains soignés, avant d’être éclipsés après un troisième album qui n’a su tenir toutes ses promesses. S’ensuivit le schéma classique, celui du comeback qui touche la fibre nostalgique au début des années 2000, sous l’égide de Frontiers, le label italien qui aime bien récupérer toutes les stars d’un passé plus posé (et dont le grand tort est de faire des bouillons de culture en sortant à la pelle des disques sur lesquels les artistes de l’écurie se mélangent sans vraiment trouver la formule qui ferait mouche). Et donc HOUSE OF LORDS débarque avec "New World – New Eyes", son douzième essai.

Qui, disons le tout de suite, ne diffère pas beaucoup des autres. Il faut bien comprendre qu’à l’instar d’un AC/DC ou d’un STATUS QUO par exemple, les Américains possèdent une formule qu’ils répètent, arrangent, retravaillent à longueur de temps. Mais si les deux groupes cités en comparaison ont su mener leur barque en se montrant souvent très qualitatifs dans leur approche – au moins pendant un certain temps – HOUSE OF LORDS donne quant à lui vraiment l’impression de tourner en rond, d’être incapable de s’extraire d’un carcan qui, comble de l’ironie, aura été construit par les diverses moutures du combo.

Mais si au moins les musiciens tentaient de toucher la grâce des deux premiers opus, il y aurait moyen d’être plus indulgent, soupirer un « feignasse » un peu énervé et puis voilà. Mais non. HOUSE OF LORDS se parodie en reprenant ce qu’il fait depuis leur retour, et qui colle tellement bien à ce que l’on attend de Frontiers que c’en est franchement agaçant. "New World – New Eyes" n’apporte rien de neuf, juste un savoir-faire un peu stérile et des refrains qui sonneraient très bien sur du BON JOVI récent, voire mieux que ce que propose ce vieux beau de Jon. Et forcément, c’est décevant de voir que le groupe ne pousse pas un peu plus, ne cherche pas à proposer du riff mémorable pour montrer que HOUSE OF LORDS n’est pas que des chœurs.

Mais ces derniers sont toutefois bien mis en avant et ils ont tout de même quelque chose d’assez classieux. C’est là que réside toute l’efficacité de cette formation qui soigne particulièrement cet aspect de sa musique. Alors forcément, "Change (What’s It Gonna Take)", "Chemical Rush" ou le title track, ça dépote bien à ce niveau, ça en met plein les oreilles, et cela nous plonge forcément loin en arrière, à une époque où ce genre de trucs, c’était la norme. C’est très bien fait, à défaut d’être réellement enthousiasmant (là encore, certains de ces refrains sont presque un peu trop faciles, comme s’ils remplissaient un cahier des charges). Les fans du style seront aux anges à ce niveau, même si le groupe a déjà su faire bien mieux par le passé.

En revanche, quand HOUSE OF LORDS essaye de sonner plus Rock, il en devient risible. "One More" qui est censé être un titre plus mordant se veut au contraire très inoffensif et se fait complètement voler la vedette par "Perfectly (You And I)", une ballade tout ce qu’il y a de mignon, voire de mièvre dans le texte, mais qui a le mérite de sonner de façon plus franche. Parce que l’on sent bien que le moteur Hard Rock sert juste le fond, qu’il agit comme un diesel au lieu de rugir, ne serait-ce qu’épisodiquement, les soli de Jimi Bell mis à part, ces derniers étant plutôt convaincants dans leur exécution.

Quand le disque se termine, la désagréable sensation d’avoir oublié ce qui s’y est passé se dessine avant de s’imposer comme une évidence. "New World – New Eyes" est le genre de disque que l’on écoute quand on fait de la route. Le truc pas trop technique, qui ne demande pas un trop gros effort de concentration, qui s’écoute au kilomètre sans déplaisir, mais sans marquer les esprits non plus. Loin d’être un essai médiocre, ce nouveau HOUSE OF LORDS s’inscrit non pas dans une continuité, mais dans une routine, sans que personne ne trouve franchement à redire. Et si c’était finalement dans l’ordre des choses ?