Peavey Wagner est tout de même un drôle d’animal ! Non content d'avoir produit une quantité d’albums assez impressionnante avec les différentes incarnations de RAGE, sans doute le recordman de la scène Heavy allemande, le chanteur-bassiste, également guitariste à ses heures (n’oublions pas qu’il fut le compositeur principal de RAGE pendant très longtemps), arrivé à cinquante ans, a décidé de ne plus se prendre le chou et de bosser avec les potes plutôt qu’avec les lois du marché.

C'est pile le genre de comportement qui amène des situations comme celle d’aujourd’hui, où désormais deux entités RAGE cohabitent. Un RAGE rasséréné par les arrivées de Lucky et Marcos, déjà auteur de deux albums en deux ans. Mais en parallèle Peavey a une vie qui l’a amené dans un café-concert où il a revu Chris Efthimiadis pour la première fois depuis le split de RAGE en 1999. La hache de guerre enterrée, le patron a tenté sa chance en demandant aux deux musiciens s’ils pourraient rejouer de vieux morceaux avec Manni Schmidt, toujours dans le coin mais menant une vie rangée depuis son départ de GRAVE DIGGER, tout comme Chris. Tout cela a mené à un concert sous le pseudonyme de “Tres Hombres” qui a fait effet boule de neige grâce au Net. Les répétitions ont permis au trio de retrouver instantanément son alchimie si bien que Peavey s’est dit qu'il n’avait aucune raison de se priver de sa récré avec ses vieux potos, mettant même un peu RAGE en veilleuse au cours de 2015 pour pouvoir s’éclater.

C'est là que Frontiers a su convaincre ce RAGE old school renommé REFUGE de proposer un album, réalisé à partir de morceaux et autres bribes laissés de côté au moment où les frères Efthimiadis ont mis les bouts, tout en ayant l’intelligence de laisser le temps au projet de se concrétiser en tenant compte des agendas, le groupe conservant son aspect non-professionnel.

Le résultat est enfin dans nos mains début juin 2018 et Peavey y confirme son éclatante forme depuis la séparation avec Smolski et Hilgers. Son plaisir de jouer saute aux oreilles et Manni Schmidt n’a pas perdu ce son massif et sa science du riff. Ça attaque fort avec “Summer’s Winter” qui renvoie au début des nineties ! La mélodie n’est pas des plus originales mais ça rentre en tête instantanément ! Et “Solitary Men” ne manque pas de titres accrocheurs comme “The Man In The Ivory Tower” qui est sans doute ma favorite ou encore “Hell Freezes Over”. Dans le genre tube on ne peut pas non plus passer outre “From The Ashes” et son riff en béton armé.

En vérité on sent tellement l’absence de pression dans ce Heavy Metal qu’il en devient jouissif ; on fonce tout droit sans se poser de question... Et ça marche, même si je dois avouer que le choix d’avoir mis en évidence “Mind Over Matter” n’était peut-être pas selon moi la meilleure des options. En vérité le seul moment où REFUGE baisse en force d’impact c'est sur les deux titres plus longs qui concluent l’album, même si “Waterfalls” est plutôt bien foutue et voit Peavey tutoyer des aigus que l’on pouvait penser perdus dans les limbes. RAGE comme REFUGE, deux incarnations d’un même idéal Heavy Metal porté par un Peavey Wagner qui a retrouvé toute sa maîtrise d’écriture.