La présence de MY INDIGO va forcément faire grincer des dents parmi nos lecteurs vu que le projet de Sharon Den Adel est de la Pop mâtinée d’Electro, façon SIA pour faire un comparatif grossier avec quelque chose d’actuel dans le style (fermez les yeux en écoutant ce disque et vous aurez l’impression qu’une gamine chelou vient danser dans votre salon en heurtant un peu tout. Ouais, ça vire au cauchemar, là, tout de suite). Alors que certains commencent grandement à douter que WITHIN TEMPTATION mérite encore de se trouver dans les pages de Nime, MY INDIGO arrive comme un chien dans un jeu de quilles et le choix d’en parler ou non ici a été pesé, étudié. Mais par égard à la dame et à sa carrière au sein de WT, il paraît finalement logique de se pencher sur son cas.

"My Indigo" a été composé à une période où Sharon Den Adel vivait une espèce de blocage quant à l’écriture pour WITHIN TEMPTATION. Il apparaît que le projet ressemble à une catharsis pour la chanteuse, qui devait faire face à des problèmes personnels. Aussi elle a travaillé sur elle, pour elle, en faisant de la musique, créant, mais si en posant une oreille distraite sur le résultat final, on a l’impression d’être face à un produit assez quelconque. Sans vouloir crier au génie, je me montrerai plus mesuré en disant que cet album possède un quelque chose à lui, un charme étrange, comme une petite cicatrice qui attire le regard sur un visage et qui ajoute au charme de la personne.

Déjà, Sharon Den Adel a l’honnêteté de faire un disque qui lui ressemble, qui n’est pas une resucée du dernier WITHIN TEMPTATION, le mitigé "Hydra". Si elle avait fait un disque à la ARCH ENEMY, avec du chant growlé, cela ne l’aurait pas fait. Ici, elle semble dans son élément, elle est dans un univers qui lui correspond, moderne malgré le côté organique que dégage la pochette. Il ne faut pas s’attendre à une quelconque approche Rock ; ici, nous sommes confrontés à une Pop urbaine, teintée d’Electro soft, mais qui reste attaché à la mélodie. Même si la batterie est programmée, même si presque toute la musique découle de synthétiseurs, la belle ne perd pas de vue le plus important. Chaque titre possède ses mélodies, mêmes si certaines sont amenées à se croiser, à se répéter.

L’intérêt principal de MY INDIGO réside dans le chant de Sharon Den Adel. Cette dernière libère des émotions fortes, elle ne se contente pas de faire une performance comme on peut parfois lui reprocher sur certaines compositions de WITHIN TEMPTATION. Ce disque, cela a été évoqué plus haut, c’est comme une catharsis pour elle et cela se ressent, elle semble souvent sur le fil. Parfois, on a l’impression qu’elle se bride, qu’elle se retient, pour que sa voix ne se brise pas, délivrant le surplus d’émotion qui ferait d’un bon titre un grand morceau, à l’image de ce "Out Of The Darkness" qui n’aurait pas dépareillé sur le très sympathique "The Unforgiving". Avec son approche minimaliste, qui déroule le tapis rouge pour le chant, on tient là une bien jolie ballade qui mérite le détour, comme c’est écrit dans le célèbre Guide Rouge.

Très posée, la musique monte en puissance sur les refrains qui permettent à Sharon Den Adel de s’illustrer même si elle évite le piège de la démonstration ou du cri. Ici, elle n’a pas besoin de forcer, ce qui permet d’apprécier d’autres facettes de sa voix. La chanson-titre est un bel exemple d’efficacité, tout comme "Safe And Sound", qui laisse également la place à la chanteuse pour livrer une belle prestation, sur le fil, plus proche de son style sur WITHIN TEMPTATION, évitant encore une fois le piège de la surenchère. Nous sommes entre deux feux, entre une approche soft et des parties qui auraient presque une espèce d’emphase, plus poussées, afin d’offrir un contraste et de ne pas sonner désespérément plat.

Musicalement, il ne faut pas toujours s’attendre à des miracles. L’ensemble est assez classique sans être forcément redondant et parfois nous avons même droit à de belles surprises, comme cette trompette désabusée sur "Crash And Burn". Parfois, les morceaux se dévoilent progressivement, à l’image de "Indian Summer" ou de "Lesson Learned" qui aurait pu figurer sur un album de WITHIN TEMPTATION s’il était accompagné de guitares. Mais c’est le morceau final, "Where Is My Love", qui s’avère être l’un des plus réussis, libérant les émotions tout en ayant une approche légèrement décalée, à la fois terriblement générique mais aucunement déplacée.

Cependant, on pourra reprocher au disque de se vautrer parfois dans une banalité un peu crasse, à l’image de ce pauvre "Someone Like You", qui n’apporte pas grand-chose à l’ensemble avec son approche presque Reggae. La mise trop en avant de la voix de Sharon Den Adel semble cacher le fait que la musique n’est pas l’aspect le plus travaillé de cet album. Les mélodies sont présentes pour mettre en valeur la voix de Sharon Den Adel et ne sont au final pas plus développées que cela. Après tout, cela reste de la Pop, dans son expression la plus simple, difficile de ce fait de se montrer très, trop exigeant.

Bien sûr, ce disque ne plaira pas à tout le monde. Après, j’avoue avoir eu un apriori très négatif avant d’écouter cet album, n’étant pas un amoureux de WITHIN TEMPTATION ni du style pratiqué, ce qui ne m’a pas empêché d’apprécier MY INDIGO. Ce n’est pas l’album de l’année, mais il permet en mettre en avant des émotions et une palette de talents que Sharon Den Adel ne nous avait pas forcément dévoilé auparavant. Et si cela peut permettre à la belle de retrouver de la motivation pour renouer avec WITHIN TEMPTATION, cela ne pourrait être que tout bénèf pour les fans qui se languissent depuis un bon bout de temps à présent.

Note réelle : 2,5/5 gentiment monté à 3.