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FOLK-METAL/AMBIANT  |  STUDIO

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- Style : Negură Bunget
- Membre : Borknagar, Enslaved, Gorgoroth, Sahg, Trinacria
- Style + Membre : Wardruna
 

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SKUGGSJÁ - Skuggsjá: A Piece For Mind & Mirror (2016)
Par WËN le 20 Octobre 2016          Consultée 2620 fois

ENSLAVED, c'est déjà 25 ans d'existence au compteur (célébrés à Londres lors de trois soirées consécutives en Mars dernier, pour autant de sets basés sur chacune de ses ères(1)). Du Black primitif de "Yggdrasill"/"Hordanes Land" aux sphères plus techniques qu'il se plaît à tutoyer actuellement, le géant glacé a su paver sa noire discographie de nombreuses pierres angulaires sur lesquelles, au fil des années, il a pu ériger ce sanctuaire de Metal extrême et progressif en perpétuelle motion où dorénavant il réside. N’ayant plus grand-chose à prouver à qui que ce soit, les cinq musiciens - le prolifique Ivar Bjørnson dont il est question ici en tête - aiment donc à s’accorder quelques salvatrices récréations (TRINACRIA, DREAM OF AN OPIUM EATER, etc.) bien méritées.

A côté, WARDRUNA, ou plutôt Einar "Kvitrafn" Selvik (ex-GORGOROTH, ex-SAGH, pour les plus connus), fait plutôt figure de nouveau venu malgré sa trilogie dite du "Runaljod" (dont le 3ème volet, "Ragnarok", est prévu pour cet automne) fortement acclamée dans les milieux autorisés notamment pour le caractère folk, runique et primordial, qui se dégage de ces disques semblant tout droit sortis d'un autre âge (certaines compositions figurent d'ailleurs au générique de la série Vikings).

Bref, l'association des deux Norois - puisque c'est bien d'une association dont il s'agit ici - profite de l’arrivée du printemps 2016 pour permettre à son SKUGGSJA de projet d’éclore. Initialement commandé par la Norvège en guise d’acte de commémoration du bicentenaire de sa constitution (ouverture culturelle quand tu nous tiens) et pensé pour être interprété live lors de l'édition 2014 de l'Eidsivablot Festival, "Skuggsjá" (qui signifie "miroir" ou, par extension, une "réflexion de l'esprit") se veut donc le pendant studio de la vision initiale des deux musiciens. A ce stade, les idées les plus audacieuses quant à un rendu que nous espérons tant visionnaire que révolutionnaire sont permises, faisant s'emballer nos petits cœurs de vikings. Car amateurs de la facette Black (viking puis psyché, puis prog) de Bjørnson ainsi accouplée au talent Pagan-folk de Selvik ; c’est forcément confiants et curieux de la façon dont les deux artistes vont faire cohabiter leur vision de la nature et des traditions païennes ancestrales de leurs contrées, que nous nous lanceront dans l’exploration des pinèdes boréales.

D’emblée, l’espace confiné du studio ne tardera pas à s’éclipser, laissant rapidement s’exprimer les frais et fascinants horizons septentrionaux. Et c’est (assez logiquement ?) Selvik qui tire d’abord son épingle du jeu, tant la face de pin de WARDRUNA s’avère prégnante dès l’intro et son éponyme de successeur, si propices à la relaxation. Violons désenchantés, très légères interventions féminines (par Lindy Fay Hella également en poste chez WARDRUNA), flûtes et percussions : le dépaysement est assurément de mise à ce niveau. La donne s’avère légèrement moins rituelle que ce à quoi le norvégien a pu nous habituer par le biais de son autre projet, mais paradoxalement cette dernière se fait plus intrigante ici. Les chœurs, couplés à un chant incantatoire, sont souvent splendides (l’une des forces du disque) et les arrangements, travaillés avec soin, apportent une profondeur supplémentaire par leurs nombreux détails.

L’orchestre Metal ne saurait cependant rester trop longtemps en reste et ses premières interventions en cette cérémonie forestière se font pour le moins tonitruantes (trop, peut-être) sur "Makta Og Vanæra", via un riff magistral certes, caractéristique de la griffe de ENSLAVED, mais presque déplacé tant il écrase tout sur son passage en s’accaparant le rôle principal dans ses digressions les plus agressives. Le chant croassé de Grutle Kjellson (ENSLAVED), presque hors de propos, n’aidera pas non plus à garder un peu de retenue tant il tranche radicalement avec les chœurs environnant. Du premier abord, la touche Metal pourrait donc parfois paraitre forcée, les moments les plus mémorables (car ce riff est incontestablement entêtant) n’étant pas forcément ceux qui s’intègreront toujours le plus finement à l’ensemble. De ce fait, le bouillon mettra parfois du temps à prendre, nous retrouvant souvent et bien involontairement à chercher qui a majoritairement composé (ou pris l’avantage) sur telle ou telle partie. Une première approche, donc, qui à défaut d'être convaincante, s’avérera même légèrement décevante, ne retrouvant pas forcément les éléments que nous nous attendions à voir mixer ensemble, ou alors moins grossièrement. Une autre impression quelque peu dérangeante issue des premières écoutes, c’est cette tendance qu’ont certaines idées et par conséquent certains titres ("Makta Og Vanæra", "Bøn Om Ending, Bøn Om byrjing") à s’étirer en longueur. Un fait sans aucun doute occultable en condition live avec la spiritualité qui doit se dégager de la scène par volutes, mais qui ainsi gravée sur disque, provoquera davantage des chutes d’attention qu’autre chose …

… Et puis, les écoutes s’enchaînant, le fort mysticisme qui se dégage de cette pièce en 10 actes (12 pour les éditions limitées) fera finalement et fort logiquement son œuvre. Les structures, progressivement appréhendées, s’effacent. Les grands espaces, d’abord dissimulés, se révèlent. Certes, le cadre se devra d’être propice si l’on veut se faire happer par la force séculaire qui se dégage de ce "Skuggsjá" et pour s’en faire révéler toutes les saveurs. Les monts boisés du Massif Central, en l’occurrence, l’ont été pour votre serviteur, mais à n’en point douter tout lieu reculé et oublié de la civilisation moderne devrait permettre de s’immerger pleinement dans les ambiances forestières du duo. Une fois affranchies des frontières physiques, certaines pièces s’avèrent même tout à fait éloquentes, là où guitares et instruments traditionnels, en une même bourrasque, parviennent à se mêler avec une finesse toute norvégienne. Typiquement, citons ce "Vitkispá" alternant batterie (Cato Bækkevold derrières les futs, là encore du ENSLAVED) et percus toutes tribales ou ce "Tore Hund" hypnotisant dans ses chœurs. Deux rites où mélodies de violons et parties de guitares se complètent à merveille. C’est obligé, l’ombre d’ENSLAVED plane sur certains riffs (la première partie de "Skuggeslåtten"), mais pas que, car dès que surviennent cornes et autres instruments à vent c’est l’ombre de cet autre géant de bois qu’est NEGURA BUNGET (voire son DORDEDUH de frangin) qui vient masquer ce timide soleil printanier (la seconde partie de "Skuggeslåtten", comme quoi). Un topo presque similaire s’offre également à nous via le doom-folk lancinant et empreint de gravité du déchirant "Kvervandi" (c’est cette fois le spectre d’un KAUAN, sans ses réminiscences russo-ukrainiennes, qui y est musicalement évoqué).

Comme quoi, et nous l’avons dit, les meilleurs moments ne sont certainement pas ceux que l’on retiendra d’emblée, l’osmose parfaite n’étant pas forcément à chercher du côté des titres les plus tape-à-l’œil. Passé l’erreur de chercher qui-fait-quoi, considérons alors ce projet comme ce qu’il est réellement : une collaboration entre deux grands artistes pour un résultat au final personnel et très fouillé. Preuve que - plus que jamais - il faut savoir laisser du temps au temps lorsqu’un disque se propose de vous rapporter l’histoire de toute une nation.

Note réelle : perdue quelque part en forêt, entre 3,5 et 4.

===

(1) Les 17, 18 et 19 Mars 2016, ENSLAVED livre trois sets se basant sur les périodes :
- 1992/1998 (de "Yggdrasill" à "Blodhemn") @The Dome, Londres
- 2000/2006 (de "Mardraum" à "Ruun") @The Underworld, Londres
- 2008/2015 (de "Vertebrae" à "In Times", programme de la tournée à venir) @The Coronet, Londres
Ces dates - en compagnie de WARDRUNA justement - furent également l'occasion de présenter SKUGGSJA à un plus grand public. Malins ces Norois.

(2) Ne cherchez pas, cet aparté ne se réfère à rien. Juste pour saluer le travail de Costin Chioreanu (ARCTURUS, SIGH, GRAVE, etc.) pour cet artwork une nouvelle fois sobre et épuré, empreint d ‘un spiritisme certain. Décidément l’un des illustrateurs du moment … et dire que je n’étais pas plus fan que cela de ses débuts.

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- Einar Selvik (chant, instruments trad, percussions, effets)
- Ivar Bjørnson (chant secondaire, guitare, basse, claviers, samples)
- Grutle Kjellson (invité - chant extrême)
- Lindy Fay Hella (invité - chant féminin)
- Eilif Gundersen (invité - flûte)
- Olav Mjelva (invité - violon hardanger)
- Cato Bækkevold (invité - batterie)


1. Ull Kjem
2. Skuggsjá
3. Makta Og Vanæra, For All Tid
4. Tore Hund
5. Rop Fra Røynda - Mælt Fra Minne
6. Skuggeslåtten
7. Kvervandi
8. Vitkispá
9. Bøn Om Ending, Bøn Om Byrjing
10. Ull Gjekk



             



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