FÄULNIS fait partie de ces innombrables formations allemandes de Black Metal qui ont vu le jour dans les années 2000, aux côtés d'AGRYPNIE, DER WEG EINER FREIHEIT, IMPERIUM DEKADENZ et compagnie. Beaucoup de très bonnes choses ont émergé de cette scène particulièrement active, et ce pour le plus grand plaisir de nos oreilles ; et ce n'est pas FÄULNIS qui contredira cette affirmation… ou du moins avec "Gehirn Zwischen Wahn Und Sinn", son deuxième opus. Car "Cholerik: Eine Aufarbeitung2", premier véritable album du groupe, sent encore beaucoup trop l'œuvre de jeunesse brouillonne enregistrée dans la cave de mère-grand avec les moyens du bord pour pouvoir prétendre à être considéré comme un disque de qualité.

La qualité du son est d'ailleurs ce qui frappe d'emblée à l'écoute de "Cholerik" : Dieu que c'est laid ! Je veux bien accepter le côté "raw" revendiqué par certains groupes de Black, mais là cela fleure plutôt le manque de moyens qu'un choix musical explicite. FÄULNIS a un côté Punk clamé haut et fort par Seuche, son commandant de bord et seul maître à penser en ce temps-là, et cela se ressent dans la non-importance accordée à la qualité de l'enregistrement : la pourriture (*) se doit d'être vue et sentie. L'on doutera cependant fortement que cela participe au charme et à la personnalité du groupe, étant donné que les albums suivants ont un son bien plus agréable et professionnel sans concéder quoique ce soit au niveau de son identité musicale. D'aucuns apprécieront l'authenticité ; d'autres déploreront l'amateurisme.

Bon, au moins, cela a le mérite de bien s'accorder au contenu des textes, qui tirent vers le dépressif tel que pratiqué par LIFELOVER ou encore SHINING : désabusé, malade, morbide, FÄULNIS est là pour illuminer votre journée et vous mettre de bonne humeur avant que vous n'appuyiez sur la gâchette. Le groupe prend clairement racine dans le DSBM, mais il en exprime les idées avec une hargne et une violence musicale qui l'éloigne des PSYCHONAUT 4 et autres HYPOTHERMIA. L'univers de FÄULNIS est oppressant, paranoïaque, désespérément noir ; n'oubliez pas votre lampe de poche à l'entrée.

Cependant, au-delà de la qualité discutable de son son, c'est également la qualité de la composition de ses titres qui prétérite "Cholerik". Somme toute assez classiques, les pistes se succèdent sans susciter un intérêt particulier car ressemblent à ce qui figurerait sur n'importe quelle démo d'un obscur groupe de Black Metal lambda. Pas de riffs transcendants, pas de soli endiablés, que du Black sale et un peu maladroit. L'on peut tout de même sentir que FÄULNIS a de bonnes idées qui ne demandent qu'à pouvoir mûrir, comme sur "Gespien" et son long passage atmosphérique ou sur le réarrangement électronique d'"Invokation", mais elles resteront ici à l'état de bourgeons. Les deux derniers titres du disque sont aussi plus intéressants et moins mal enregistrés, préfigurant ce que le groupe proposera par la suite ; l'on termine donc sur une note d'espoir pour FÄULNIS.

En résumé, "Cholerik: Eine Aufarbeitung2" n'est peut-être pas le pire album de Black jamais produit, mais il est également loin d'en être le meilleur. Mal enregistré (surtout pour les premières pistes), peu créatif, il recèle tout de même quelques bons moments, surtout vers la fin. Heureusement court (moins de quarante minutes), ce disque n'a pas le temps de vraiment se mettre à taper sur les nerfs ou de faire saigner les oreilles ; mais il n'est que rarement bon que l'on ne se réjouisse de la très courte durée d'un album, car cela est souvent le corollaire d'un certain ennui à l'écoute de ladite œuvre. "Cholerik" n'est donc pas un indispensable, mais si vous aimez à ce point le Black de qualité douteuse… libre à vous d'essayer.


(*) « Fäulnis » signifie « pourriture » dans la langue de Goethe.