Ces dernières années, les fans de la NWOBHM ont plutôt été gâtés. Entre la reformation de SATAN qui est parvenue à créer un certain buzz, les albums fort sympathiques de BATTLEAXE et AVENGER sortis l'année dernière, ou l'opération revival portée par NIGHT DEMON, y a de quoi prendre son pied. Pas mal pour une scène que l'on aurait pensé morte et enterrée depuis des lustres. Mais dans ce florilège de réussites il fallait bien qu'un canard boiteux vienne se taper l'incruste. TYSONDOG est donc ce vilain intrus, qui tente aussi de jouer sa carte, 29 ans après son dernier LP. Mais le pauvre va y perdre toute sa mise.

Ces groupes ancestraux qui se reforment ont toujours été tiraillés entre deux approches musicales : soit faire comme si rien n'avait changé depuis 1985, s'excluant du coup la part du public avide de modernité, soit au contraire en tentant de se raccrocher aux modes du moment. Et l'on sait notamment combien de groupes des 80's se sont plantés en tentant de se moderniser dans les 90's, du coup cette approche s'était raréfiée depuis le XXIème siècle, les musiciens se faisant plus raisonnables, évitant de trop rompre avec leurs débuts. TYSONDOG ne semble pas avoir retenu cette leçon. Il se sent donc obligé de coller à ce qu'il pense être les standards actuels. Les guitares sont lourdes, les tempos plutôt tranquilles, la basse bien audible (sans doute le seul instrument qui tire son épingle du jeu)... La notion de groove s'invite donc dans la musique de ce groupe auteur jusqu'à présent de deux albums (un premier au style Heavy anglais très classique, et un second lorgnant plus vers le Thrash). Le problème c'est que TYSONDOG ne parvient jamais à trouver le bon équilibre. Il modernise son Heavy, tout en essayant de garder quelques traces de ses débuts. Mais cet exercice de funambule ne prend pas, le groupe chute du 10ème étage, et il n'y a pas de filet pour le rattraper.

Je suis sûr que si vous imposez une écoute à l'aveugle de cet opus à un ancien fan, il ne se rendra pas compte qu'il s'agit du même groupe. Impossible. Bon faut dire aussi, que les gars de TYSONDOG n'ont jamais été dotés d'une forte identité, mais ils auraient au moins pu profiter de ce troisième essai pour s'en forger une. Raté. "Cry Havoc" est ce genre d'albums de Heavy qui n'ont aucun charme. Le chant, agressif mais pas suffisamment pour se distinguer, contient parfois quelques relents de Blaze Bayley, mais sans le charisme de ce dernier. Les guitares ont souvent une approche peu mélodique, privilégiant les riffs dans un style plutôt à l'américaine, mais très loin du talent d'un ARMORED SAINT.

Bon, pour ne pas en dire que du mal, on pourra peut-être déceler un léger pouvoir d'accroche dans les premiers titres. Citons également le morceaux "Cold As Ice" qui s'extrait de la masse, justement grâce à son style enfin un peu plus mélodique. Bah ouais les mecs, dans ce style la mélodie est souvent la clé qui évite l'ennuie.
Pas suffisamment violent pour ceux qui recherchent un exutoire, un groove peu convaincant pour les amateurs de rythmiques modernes, et s'éloignant trop du Heavy de nos aïeux pour s'attirer la sympathie d'un public vieillissant qui était pourtant le plus susceptible de s'intéresser à cet album. C'est quand même dingue de se planter à ce point. Le groupe allant jusqu'à vouloir placer une ballade hors contexte, "Broken", qui aurait pu nous réserver une séquence émotion nous réconciliant avec les Anglais, mais non, c'est plat de chez plat. Et puis cette prod' sans vie n'arrange pas les choses, bien au contraire...

Un album qui n'apporte donc strictement rien et que l'on rangera poliment au bout de trois écoutes (soit trois heures de perdues, car oui, ce bousin est long de surcroît). Tout cela en est un peu gênant : ce "Cry Havoc" est le plus mauvais disque de la discographie de TYSONDOG. Malgré tout le respect que l'on ne peut qu'avoir envers ces musiciens qui ont de la bouteille et qui tentent un pari difficile en tentant de revenir, parfois il faut bien se rendre compte de l'évidence : ceux-là auraient mieux fait de s'abstenir de se reformer...