Vous kiffez le kitsch ? Vous kiffez quand c'est occulte ? Mais par dessus tous vous aimez les tacos ? Eh ben aujourd'hui on a ce qu'il vous faut.
Parce que ouais, la scène mexicaine était quand même assez réputée pour ne pas faire de cadeaux à l'ère du Old School. Non, je ne donnerais pas de noms, demandez à Zodd, il sera ravi de vous faire un exposé de plusieurs décennies là-dessus. Toujours est-il qu'en Death qui ne soit pas Thrashy, globalement, y avait pas énormément de trucs à se mettre sous la dent non plus. Et donc, devant la recrudescence de rééditions de vieux Death Metal qui revient on ne peut plus à la mode, c'est Chaos Records qui s'est récemment permis de déterrer CENOTAPH, groupe désormais culte parmi les cultes, et souvent vu comme la réponse Sud-Américaine à un INCANTATION gagnant alors bien en puissance. Alors on va en toucher quelques mots si vous le voulez bien.

INCANTATION carrément ? Bah ouais mais attendez, les liens entre les formations sont nombreux. Certes, ils n'ont pas forcément vu le jour à ce moment là mais outre la musique, on note la présence de Daniel Corchado. Celui qui plus tard volera de ses propres ailes pour aller distordre n'importe comment le Metal Extrême avec l'entité THE CHASM. Et qui rejoindra plus tard.... Ben INCANTATION, pour enregistrer les parties vocales sur leur meilleur album. Le monde est petit hein ? Bref, c'est donc après quatre ans d'existence et quelques démos que l'entité va pouvoir accoucher de "The Gloomy Reflection Of Our Hidden Sorrows". Une bonne grosse œuvre sombre, malsaine, superbement illustrée, et bourrée d'approximations lesquelles font tout son charme. Dans tous les cas, c'est une belle baffe artisanale qui n'a pas franchement vieilli.

Déjà, on a de quoi être déboussolés par le son. Les guitares sont massives, très grasses et imposantes, mais le mix part dans tous les sens. On devine le peu de moyens et les approximations dans le studio, toujours est-il que ça sature un peu de manière anarchique, que ça s'étouffe parfois pour rien et que ça sent la poussière dans la crypte. Et en s'y acclimatant un peu, ça nous plonge dans une atmosphère très particulière, car si ça montre facilement les crocs et que la vitesse est de mise, CENOTAPH est profondément malfaisant et enclin à rappeler à lui des esprits obscurs (le break au début de "A Red Sky" avant que ça parte limite en Grindcore fait froid dans le dos). Le tout porté par un growl écrasant, massif de Corchado, déclamant souvent des atrocités d'une voix d'outre-tombe, sans oublier de varier un peu le jeu.
Et surtout... Mais quel bordel. En véritable agent du chaos, l'album ne fait rien d'autre que tenter de sortir des sentiers battus et va même jusqu'à pouvoir se targuer d'être un brouillon beaucoup plus Death Metal que ce que deviendra THE CHASM quelques années après. Parce que tous les titres sont construits absolument n'importe comment, foutant des accélérations berzerk gratos après des passages plus mélodiques et dissonants, ralentissant quand on s'y attend pas, rajoutant des claviers en intro (kitsch certes mais avec tellement de charme) pour nous y faire croire davantage...

Et au final on finit juste paumés. Coincés dans une pyramide. Dans un énorme labyrinthe où l'air n'est que poussière, avec juste une torche, et une secte impie invoquant on ne sait quoi dans la pièce à côté. Quand des leads et mélodies se ramènent, c'est pour sonner complètement distordues, dissonantes, comme du IMMOLATION momifié ("Evoken Doom"). Constamment imprévisible mais toujours noir comme la suie, caverneux, cryptique même, comme on en n'avait pas franchement entendu ailleurs en 1992. Ni par la suite d'ailleurs. Car sonner ritualiste tout en restant si foncièrement directement Death Metal n'est pas une chose si aisée, rien que de voir le brûlot de 8 min "In The Cosmic Solitude" qui alterne l'ambiance et la brutalité déployée à outrance étant un bon exemple, remettant le nom de INCANTATION en gros quand ça bourre le plus et revenant soudainement sous terre en de nombreuses occasions. Bwarf.

"The Gloomy Reflection Of Our Hidden Sorrows" fout la frousse. Genre vraiment. Il est de ces albums de Death qui peuvent carrément faire peur tout en bourrant la tronche comme je peux le faire avec les orifices de ta maman. Une atmosphère noire et poussiéreuse, anxiogène et asphyxiante, angoissante mais portée par des séquences carrément blastées et parfois Thrashy, voilà un cocktail détonnant comme une véritable petite bombe artisanale. Du fait maison qui fait la nique à des grosses boites et vient d'un endroit où on ne l'attendait pas.
Du coup, c'est une excellente découverte à recommander chaudement à tous les fans de trucs un peu undergrounds, un peu vieux, un peu vilains et surtout bien attaqués du ciboulot. Si vous voulez paumer le peu de neurones que vous avez encore après vous être farci moult albums de Death de Blackeux, frappez à cette porte là. Voilà. Et dire que par la suite le groupe a viré vers du Death Mélo assez épique... Mazette.

Spooky : une ambiance spéciale et démente, une musique rigide et violente, bref un truc à retenir.