Ah, l'Écosse… Terre rougie par l'hémoglobine de millions d'hommes et de femmes lors de sempiternels conflits de territoire, terre rougie dont l'histoire nous a été révélée avec plus de précision en 1995 par un certain Mel Gibson. L'Écosse et ses couleurs, ses paysages désolants et magnifiques, sa brume et ses pintes. L'Écosse dépeinte ici par le nouveau groupe CNOC AN TURSA (« Colline de la tristesse », en gaélique), issu de Falkirk.

Constat premier : on ne peut dire que le groupe ne rend pas hommage à la culture de son coin de pays. Les grands espaces sont évoqués, la guerre bien évidemment avec ces airs martiaux et surtout, les douleurs passées avec cette flûte magique émanant de quelques pièces, dont la superbe clôture "Blar Na H-Eaglaise Brice".

Cette appartenance à la terre se traduit par une musique fière, vantant les mérites de la nation écossaise, par ses armoiries ou les lieux où son identité s'est forgée. Les fans de Braveheart reconnaîtront quelques références, mais tout ça n'est qu'un prétexte pour enchaîner les grosses claques pompeuses et bagarreuses telles que "The Lion Of Scotland", efficace entrée en matière amenée par la très jolie instrumentale "The Piper O' Dundee", "Hail Land Of My Fathers", "In Shadowland", "The Spellbound Knight" ou l'excellente "Winter - A Dirge". Vous ferez sans doute aussi un parallèle avec les Blackeux de WINTERFYLLETH à quelques endroits, entre autres sur "Bannockburn" que vous écouterez le poing levé.

Le gros bémol sur ce premier album des Écossais, en fait ce qui m'a dérangé depuis mon écoute initiale, est la voix d'Alex Buchan. Criard, belliqueux, trop hardcore à mon goût pour ce genre de Black/Folk, ce chant me rebute encore après plus d'une quinzaine d'écoutes. C'est dire comment le poison est expertement inoculé… Je peux comprendre son utilité remarquez, CNOC AN TURSA ne vous partage pas ses impressions sur la dernière collection de Dior… Et la lourdeur de sa musique bien mélodique ne laisse pas de place à l'interprétation ; l'histoire sanglante et lyrique transperce "The Giants Of Auld". Pour les érudits, sachez qu'Auld désigne l'alliance entre les royaumes de France, d’Écosse et de Norvège contre l’Angleterre, qui se termina officiellement en 1560 avec le traité d'Édimbourg.

CNOC AN TURSA exploite à merveille aussi le synthé sur la majorité des morceaux de "The Giants Of Auld". Non seulement vient-il compenser le chant agressant de Buchan, mais il nous fait voyager davantage dans les méandres musicaux des Écossais. "The Lion Of Scotland", "Ettrick Forest In November" et "Culloden Moor" sont particulièrement bien ambiancées. J'écris « méandres » parce qu'on hésite parfois à prendre les armes ou à se recueillir. Cette incertitude que fait planer le quatuor enrichit l'album et gave toutes les gueules.

En résulte un Black/Folk vitaminé, inspiré, agréable et divertissant, avec une touche fleur bleue qui ne rebute pas trop. Bref, je le redis, un bel hommage à la patrie, un des plus réussis que j'aie entendu ces dernières années. Bravo pour ça. J'ai hâte maintenant de voir si les zicos ont épuisé leurs encyclopédies ou s'ils trouveront d'autres tranches de leur histoire à nous réciter.

Note réelle : 3,5/5 arrondi à 4 pour un effort de grande qualité de ces jeunots pour un premier skeud.

Podium : (or) "The Lion Of Scotland" , (argent), "Winter - A Dirge" (bronze) "Blar Na H-Eaglaise Brice".