La scène Metal italienne aura de tout temps été relativement méprisée par ses contemporains. Les clichés du “Metal discos” ou du “Metal à dragons” (merci Luca et ses rhapsodies de gonzesses) sont autant le reflet d’un mépris que d’une méconnaissance de cette scène. Car en parallèle à ces mouvements populaires et souvent ridicules, les terres d’Italie auront vus naître la scène Doom la plus fascinante de l’histoire du Heavy Metal.

Imprégné d’influences avant tout progressives (Jimi HENDRIX, PINK FLOYD etc) et Hard classique (de LED ZEP à BLACK SABBATH), le tout trempé d’une bonne dose de mysticisme et de bizarreries caractéristiques de la culture locale (films d’horreurs, histoires occultes et Fellinisme), cette scène underground s'est développée à partir de 1978 pour s'éteindre doucement en 1991, à peu de survivants près.
Le groupe DEATH SS et ses deux membres principaux seront les premiers à mettre le feu aux poudres de ce Doom Metal secret et occulte.

Mais nous ne sommes pas là pour parler de DEATH SS, mais bien de BLACK HOLE et de son chef d’œuvre "Land Of Mystery", l’album qui en 1985 reprenait tous les ingrédients du Doom italien tout en le surpassant allègrement. Aujourd’hui disponible dans une réédition propre et efficace, ce disque fut longtemps indisponible, connu seulement des collectionneurs et autres adeptes, on racontera d'ailleurs bien des choses au sujet de ces membres, plus mystérieux encore que leur création déjà franchement obscure.

Les accents graves de claviers qui introduisent l’album annoncent d’emblée la couleur : davantage construit comme une messe que la plupart des autres disques de Doom, aux fondations généralement Rock. En s’appropriant une poésie ésotérique et une musique sainte et psychédélique, BLACK HOLE est un des rares groupes de Doom à avoir su se défaire de la parenté obligatoire avec BLACK SABBATH. Ce seul album réinvente donc en grande partie son Doom, en se détournant de ses influences et en laissant une plus grande place à l'inspiration et à l'improvisation.

Certes, une basse flottante impose une rythmique envoûtante sur chaque piste, mais ce sont bien les envolées spatiales au clavier et la voix hypnotique de Roberto Maesles qui constituent tout le génie Doom de "Land Of Mystery". En ce sens, l’album évolue progressivement vers les étoiles, en commençant par "Demoniac City", le titre le plus Hard de l’album dans ses constructions, au refrain inquiétant et aux accords détendus pour se diriger vers des titres de plus en plus abstraits.

La piste éponyme est un exemple parfait du savoir-faire de BLACK HOLE : un sérieux de pape appliqué à une musique trip. Les guitares font trembler les murs de la cathédrale jusqu’à ce que le refrain viennent balayer le château de cartes Doomesque construit jusque là par l’instru.
“Blind Men And Occult Forces” est clairement mon titre favori de l’album, tant il est facile de se laisser emporter par le voyage offert par BLACK HOLE. Férocement surréaliste, ce titre est un hymne ritualiste où le groupe exploite au maximum ce qui fait toute sa force : l'atmosphère.

Il est possible que vous buttiez un peu sur les passages parfois trop brumeux de cet album (comme le titre "Obscurity In The Ethereal House" qui clôture l’album), mais au fil des écoutes et des champignons ingurgités, il est impossible que vous ne vous laissiez pas prendre au jeu de BLACK HOLE, un des plus mystérieux jamais orchestrés.

Si vous vous demandiez à quoi peut ressembler le Vatican sous acides, si vous recherchez une expérience musicale unique et vintage à la fois, si vous êtes fan de Doom, si vous êtes un fan de Metal, si vous avez un faible pour les hallucinogènes, cet album unique s’accordera parfaitement avec votre imaginaire et vous assurera des heures d’écoutes venues d’un autre monde.
“Land Of Mystery” est une des pièces maîtresses du vieux Doom, un de ces albums qui ne vous quittent plus.