La plupart connaissent le Vintersorg, grand Viking et bon prince de BORKNAGAR, le touche-à-tout de ses derniers albums solo, son chant révérencieux et dramatique dans CRONIAN ou encore FISSION. D’autres encore connaissent le Vintersorg gros ours, faisant pom pom dans les bois avec une grosse voix onctueuse. Celui de ses premiers albums solo, celui d’OTYG. Il y en a même qui ont entendu le bougre chanter à l’aigu sur quelques bidules Prog' tout gentils dans WATERCLIME.

Très peu connaissent le Vintersorg à la voix bordée d’eyeliner, celui qui regarde les étoiles avec une sensibilité plus gothique que païenne, celui qui a une voix suave et qui souffle « I’ll be watching over you » comme si vous étiez sa dulcinée de toujours. Ce Vintersorg là, il a très brièvement existé par le biais d’HAVAYOTH et de sa première création inversée, avec la complicité d’un ex-bassiste de l’imposant NAGLFAR.

Vintersorg n’a pas donc qu’une âme guerrière folkisée, ça, à force d’accumuler les projets, on le savait. Et parmi toutes ses compétences, il peut aussi marquer sur son CV qu’il sait regarder ses pieds pour symboliser la catharsis de son âme noire, celle qui penche vers SISTERS OF MERCY plus que vers BATHORY.

"His Creation Reversed", un échantillon de Metal Gothique d’une époque qui semble révolue paraît même aujourd’hui un peu à l’arrache par rapport à son époque, dans l’ombre d’un SENTENCED bien rôdé. Un album attachant par sa nature de side-project d’un mec simplement génial, et pour ses véritables qualités de compositeur. Car cet album, c’est avant tout ça : du Metal Gothique pas bien méchant mais bien huilé. Et encore faut-il avouer que la part « Metal » n’a pas grande pertinence, tant l’utilisation des guitares rythmiques est superflue voire inexistante sur des titres comme l’éthéré (et un peu nunuche) "Fallen", ce "Teloah" aux allures New-Age apaisantes (et quel superbe solo final), et l’interlude piano/clavier "Starfall", le genre d’instrumental un peu naïf mais accrocheur que l’on n’entend plus trop de nos jours. Car finalement, c’est ce clavier qui mène la danse, qui se complaît dans le calme, la beauté, la volupté et les volutes de fumée.

Autre part, c’est du pur Rock Gothique légèrement métallisé, blindé de refrains qui font mouche, d’un "Mirrors" qui donne la cadence à ce "Wounds" où la voix profonde de Mr.V déploie toute son émotivité sur un plateau d’argent, ou bien ce "Burn" qui reste longtemps en tête.

Ce premier et dernier HAVAYOTH est, comme je l’ai dit plus haut, bien attachant et, même s’il n’a pas fait date, reste quand même une œuvre pleine de bonnes intentions, qui ne frôle les clichés que pour leur rendre une certaine légitimité nostalgique. Si je préfère le Vintersorg qui fait exploser les terres et les mers de sa voix barbare, le Vintersorg ‘amant de minuit’, qui joue avec brio le rôle d’un Satan sensuel, déguisé dans des ténèbres bien attirantes (et là je n’invente pas, c’est bien ce que les paroles supposent), ce Vintersorg là aura quand même eu une petite place dans nos petits cœurs. Ça me peine presque de mettre cette note en demi-teinte.