1986. Après un EP et un album excellents, Kai souhaite abandonner le chant pour se concentrer sur la guitare. Le groupe cherche alors un nouveau chanteur, qui pourrait proposer un chant proche de celui de Geoff Tate. Des auditions ont alors lieu. Le jeune Michael Kiske, dix-huit ans, prend son bain lorsque le groupe l’appelle pour lui proposer de devenir le chanteur de HELLOWEEN. La suite, ce sont les deux "Keeper…", qui permettront aux Citrouilles d’entrer dans la légende. Les années suivantes verront le départ de Kai, fatigué par les relations abrasives qui règnent au sein du groupe. Un départ que regretteront Michi et Ingo, très attachés à la personnalité du guitariste. Ces mêmes tensions auront raison quelques années plus tard de Michael Kiske, dont Roland, Weikath et Markus ne veulent plus. Weikath appelle Kiske pour lui dire qu’une réunion importante le concernant doit avoir lieu et qu’il est prié de venir. Le chanteur, comprenant le sous-entendu du guitariste, décide de mettre les voiles. Il faudra attendre vingt longues années pour que les deux Michael se reparlent, lors d’un festival en Europe. Weikath demande à Kiske s’il a fait quelque chose qu’il ne peut pas lui pardonner, et Michi lui répond que ça fait longtemps qu’il lui a pardonné. Les relations sont de nouveau cordiales entre les deux musiciens, mais il n’est pas encore question d’une réunion, il faudra encore attendre quelques années pour cela.
2021. Cela fait maintenant plusieurs années que la réunion a eu lieu, donnant lieu à une tournée qui a largement satisfait les spectateurs. Cette réunion s’est faite en douceur : après que Michi ait exprimé à un Kai insistant son envie de rejouer avec HELLOWEEN, il fallait voir si Kiske allait s’entendre avec les membres du groupe qu’il ne connaissait pas, notamment Andi Deris. Michi se rend donc à Tenerife, où il passe une dizaine de jours avec celui qui lui a succédé. Une rencontre source de stress pour les deux chanteurs. Un stress qui va rapidement disparaître, car les deux hommes s’entendent à merveille, et ont l’impression de se connaître depuis longtemps. Les relations sont excellentes entre tous les musiciens, les tensions qui animaient le groupe durant les années 1980 et au début des années 1990 ont disparu ; ils ont vieilli et mûri. La réunion est donc actée, un single sort avant la fameuse tournée, et l’idée d’un nouvel album est rapidement évoquée.
La pochette de l’album est sublime. Une peinture dont Eliran Kantor est à l’origine, sur laquelle on peut voir des clins d’oeil aux anciens albums des Citrouilles, "Walls Of Jericho" et les deux premiers "Keeper…". Une des plus belles pochettes du groupe, avec celle de "Better Than Raw". Pas de doute, le merchandising devrait rencontrer un certain succès.
"Helloween" a été enregistré en analogique, et l’apport est considérable. Il a été difficile pour le groupe de trouver des techniciens maîtrisant encore ce type d’enregistrement, l’album a été enregistré dans plusieurs studios et le Covid a rendu les choses compliquées ; comme l’a dit Andi Deris, ils sont très heureux du résultat, mais s’ils avaient été au courant de toutes ces complications, ils ne l’auraient pas fait. Chaque instrument en bénéficie, tout particulièrement les guitares : elles ont un son superbe, et les soli harmonisés sont un régal (ceux de "Robot King", par exemple). Le groupe a dépensé beaucoup d’argent pour cet enregistrement analogique, mais cela devrait largement être amorti grâce au merchandising, aux ventes d’albums et de places de concerts, qui ont lieu dans des salles plus grandes depuis le retour des deux membres du line-up classique et le regain d’intérêt qu’il a généré. Ça serait vraiment bien qu’ils enregistrent leurs futurs albums de la même façon, c’est la meilleure production pour le groupe depuis "The Dark Ride". De plus, le groupe a réussi à acheter le kit de batterie d’Ingo à un de ses fans et à un prix correct. Sa batterie a ensuite été placée à la même place que là où jouait le regretté batteur, dans le même studio de surcroît. Voir jouer Dani a bien sûr fait remonter des souvenirs aux membres les plus anciens, un moment émouvant.
Concernant les compositions, le mariage des voix fonctionne plutôt bien sur la plupart des titres. Aucun chanteur n’a cherché à tirer la couverture à soi, les arrangements vocaux ont été faits au service de la musique, pas des égos. Les soli de guitare sont réussis, les harmonies sont toujours très appréciables. Pour ce qui est du travail fourni par chaque compositeur, Deris a encore une fois écrit pas loin de la moitié de l’album. Malheureusement, parmi ses cinq titres, seul "Fear Of The Fallen" sort réellement du lot. "Best Time", co-écrit avec Sascha, et "Rise Without Chains" sont bons sans plus. Quant à "Mass Pollution" et "Cyanide", c’est du HELLOWEEN bourrin et sans saveur, ce n’est clairement pas la facette du groupe que je préfère.
"Angels" de Gerstner ? Sympa sans plus, c’est un compositeur qui a rarement brillé. Le titre de Markus est agréable, mais ce n’est pas du grand HELLOWEEN. Quant à Kai, son "Skyfall" réserve des moments très agréables, c’est une très bonne chanson, mais elle aurait pu être amputée de quelques longueurs. Michi n’est crédité sur aucun titre, non pas par manque d’idées, mais parce que celles-ci sont éloignées du Metal et qu’il compte faire un nouvel album solo ; il a préféré ne pas participer à la composition.
Weiki a toujours été mon compositeur préféré chez HELLOWEEN, meilleur que Hansen à mes yeux ; il y a une finesse dans ses compositions, que ce soit au niveau des mélodies vocales, des riffs et soli de guitare qu’on retrouve rarement dans les compositions du leader de GAMMA RAY. Il est clairement celui qui s’en sort le mieux sur cet album. "Out For The Glory" pourrait sans problème trouver sa place sur le deuxième "Keeper…", et la quasi-omniprésence de Michi au chant renforce cette impression ; ce titre donne l’impression de remonter 33 ans en arrière. "Robot King" est LA tuerie de l’album, les soli de guitare sont à tomber et les mélodies vocales sont enchanteuses. Quant à "Down In The Dumps", c’est un titre happy très réussi également, c’est du Weiki pur jus.
L’album a suscité un fort enthousiasme chez la presse spécialisée et une grande partie des fans, tant mieux pour eux, mais je ne le partage pas. Bien sûr, "Helloween" est inférieur aux albums des années 1980, et je le trouve également moins réussi que les quatre albums du groupe avec le line-up Grosskopf/Weikath/Grapow/Deris/Kusch.
Note réelle : 3,5/5, que j’arrondis à la note supérieure parce que c’est HELLOWEEN, je suis dingue de ce groupe.