Savez-vous ce que c’est qu’un Bernard l’hermite ? Bien. C’est un petit crustacé qui n’hésite pas à déloger ses proies de leur carapace pour y habiter. En clair, un enculé.
Et il faut croire que SEVERED SAVIOR a été victime d’une Pagure (de son nom scientifique : Pagurus bernhardus) car la mutation soudaine de cette formation, me laisse septique. Et oui je sais, je vais encore jouer mon clown triste. Bon voyons maintenant ce qu’il en résulte de cette nouvelle offrande, de ce Brutal Death cuvée 2008.

Si on résume brièvement le parcours des ricains on peut constater qu’ils ont à leur actif que deux albums studio (dont un EP). C’est mince. Malgré tout, le niveau de ce combo est on ne peut plus correct. S’évertuant à glorifier sans détour cet art Métallique bestial. SEVERED SAVIOR et le Brutal Death c’est tout un sacerdoce. SEVERED SAVIOR transpire le Death Metal de tous ses pores. Par le son, le phrasé, le doigté viril sur corde enflammée et un goût pour les tripes et le lugubre sur papier glacé. Tout l’art de la désinvolture et de l’arrogance nécessaire et caractéristique de ce genre de Metal.
- Brutality is Law - en voilà un slogan, digne d’une campagne électorale pour militaires avertis. Mais c’est aussi le doux titre de leur (véritable) premier album. Une tuerie manifeste, sans intelligence palpable mais belle et bien corsée et fort encourageante. Cela dit… ce n’est qu’une impression car l’évolution que va prendre le groupe, est assez curieuse.


Le paysage Death, recèle de véritable trésors enfouis dans la vase d’un style par moment trop codifié, qui ne permet plus aux artistes de respirer librement. Tout serait largement plus simple sans cet appât du gain, cette désagréable manie de montrer son cul au premier venu. Et ben non mes amis, il en est définitivement ainsi. Tout l’équipage de SEVERED SAVIOR, abonne le navire et laisse cette coque morte à la merci de viles crustacés. SEVERED SAVIOR se meurt, il est à l'agonie et doit renaître. Et il renaîtra.
Car le projet est repris notamment par un membre de ODIOUS MORTEM (le colérique Anthony TRAPANI) et devient désormais le terrain de jeu d’un Brutal Death qui joue vite et qui déborde autant de technicité que de brutalité. Doit-on espérer quelque chose de miraculeux pour autant ? Non.


La grande uniformité d’un art soumis aux codes en vigueur de la violence « next-gen » est aussi la perte d’un fibre essentiel à sa survie (son cœur palpitant, volontairement old school et intraitable) est un problème de taille. Qui devient très embarrassant et n’évite pas les faux pas, d’un instinct grégaire survivant au sein d’une petite communauté de musiciens extrêmement bruyants. On se rassemble, on échange, on taille le bœuf en concert, on construit et on dresse les fondations d’un style, d’une école (le Brutal Death US) qu’une tonne de peigne culs font copier, sampler, répéter aveuglément sans apporter la moindre étincelle de génie. Heureusement, ce « Servile Insurection » est de bonne qualité à défaut d’être passionnant.


Même si « BIL» se révélait très attachant et foutrement efficace, il faut admettre que son manque d’ambition (peut-être n'a t-il jamais voulu en avoir ?) lui faisait défaut pour survivre dans l’arène polluée du Brutal Death. D’accord. Mais là, nous avons tout de même droit à un numéro de prestidigitation foireux, de l’esbroufe manifeste comme on en voit souvent et ça c’est le drame.


Au programme : Des patterns archi connus (mais bien orchestrés) aux breaks bavards (mais bien pêchus), les nouveaux propriétaires des lieux inondent les murs d’une tapisserie qu'on qualifierait de surfaite (saleté de Bernard-l’hermite!). La nouvelle tournure de SEVERED SAVIOR est remplie de plans télescopés munis d’une esthétique excessive amorçant cette insurrection plus futile que servile, et reste très technique avant toute chose (dans un style très démonstratif) et archi classique dans son écriture.
Au fur et à mesure des écoutes, « Servile Insurrection » se montre moins passionnant de bout en bout. Respectant toujours un ligne directrice, soit trop abrupte (« Fecalphiliac »), soit trop dispersée avec cette couleur « technique » bien mal placée (« Question »). Néanmoins, la troupe fera son petit effet sur les mirettes des brutes épaisses (« Deadspeak »), qui seront plus distraites par l’éloquence de la narration que réellement surprises. Tout ceci, rend le contenu de cet opus à la fois très compact, très dense tout en essayant de jouer sur une fluidité qui homogénéise les morceaux, au lieu de les faire décoller définitivement. On y ajoute un gros son cache misère (bien rond), moderne et bien ventru. Net et glacial, cet enrobage manque de personnalité.

Ceci ponctue cette vue d’ensemble qui me parait bien triste au regard de la spontanéité (et du feeling) des précédents opus, bien moins engluée dans cette parade technique futile. D’où le drame.



Bien sûr, les adeptes du dernier DEEDS OF FLESH vont sûrement apprécier cette « insurrection servile » en connection wifi avec SUFFOCATION et tous ses potes. Mais surtout ce combo signe aujourd’hui son deuxième album longue durée d’une main trop sûre mais ne touchera jamais de ses doigts, le talent de ses modèles. Même au prix de tout cette énergie dépensée un peu inutilement devrais-je dire. Le prochain sera le bon? Je croise les doigts.




Verdict : Un opus brutal et sympathique. Mais sans plus.


Note : 2/5