S'il ne fallait retenir qu'une chose de "Nespithe", voilà ce que je ne retiendrais pas :

Ce rot, ce grattement de gorge dans les graves, qui n'est même pas vraiment un growl, ou alors pas tout le temps. Cette déglutition sonore, premier point de frottement entre le disque et nous. Elle devient pourtant, passée la première écoute, indissociable de la musique.

Cette fusion des pistes entre elles, unies par ce timbre, cet accordage abyssal descendant d'une pleine quinte en dessous de ce zéro qu'est le mi 3. Et tout cela sur des instruments et cordes que l'on pourrait qualifier de "standards" : pas de corde surnuméraire, pas de cordes spéciales. Au fond de cet abysse il y a un son boueux, trouble, imprécis, contribuant pleinement à ce feeling alien que dégage une DEMI-LICHE issue pourtant d'un vulgaire Manuel des Monstres de Donjons et Dragons.

Ce refus de toute forme de tonalité, si cliché aujourd'hui et pourtant si attachant dans cette recherche d'étrangeté mélodique. On se demande instant si les notes sont tirées au hasard, on tire des notes au hasard, on s'aperçoit que c'est de la merde(*). "Nespithe" n'étant pas de la merde, les notes le composant sont donc soigneusement assemblées par l'esprit humain.

Ces quelques solos finalement presque orthodoxes, ces harmoniques artificielles sifflantes ou étouffées qui achèvent de nous prouver que rien dans le spectre sonore, les graves, les médiums ou les aigus, aucune fréquence ne nous sera bienveillante, accueillante ou même miséricordieuse.

Ces restes de Death Metal suédois et américain – Antti Boman avouant être fan d'ATHEIST, ENTOMBED, CARCASS, MORBID ANGEL, DEATH et surtout de PESTILENCE – qui prouvent que DEMILICH ne sort pas de nulle part et doit être positionné aujourd'hui comme extension, pour ne pas dire extrémité, d'un genre musical.

S'il faut retenir une chose de "Nespithe", voilà ce que je retiens : la manière hallucinante qu'à DEMILICH de faire serpenter ses riffs, de tronquer ou d'allonger les motifs mélodiques au sein de la même entité, en se moquant des mesures et des signatures rythmiques. Et quoi que certains moments un peu plus directs ont aussi leur charme, c'est dans ces moments que "Nespithe" se montre le plus grand. C'est une manière comme une autre de créer une version personnelle du climat labyrinthe si loué chez MORBID ANGEL ou SUFFOCATION. Au milieu de ceux-ci, DEMILICH n'a pas à rougir, bien au contraire.

Et s'il faut s'atteler à retenir des vertèbres plus que d'autres dans cette colonne qu'est "The Spine" alors voilà après écoute attentive ma petite sélection : "When the Sun Drank the Weight of the Water", "The Echo (Replacement)", "Erecshyrinol", "Raped Embalmed Beauty Sleep" (**).

Pas meilleure qu'une autre, elle est évidemment destinée uniquement aux néophytes ne possédant pas trente neuf-minutes, car "Nespithe", comme tout disque cohérent et compact, s'apprécie bien mieux dans son entièreté.

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* Véridique
** Le fait que ma liste et celle d'Antti Boman partagent deux pistes, à savoir "When The Sun", et "The Echo" vous invite à écouter d'autant plus prioritairement celles-ci.
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