Voici l’automne de BETRAY-ED, où la distorsion et le chant black sont tombés comme les feuilles mortes. Il fallait au cocon abandonner sa carcasse métallique pour qu’il prenne véritablement son envol. Pas complètement transformé, mais n’attirant notre attention que sur une de ses facettes. Un retour aux sources intelligent le temps d’un EP, d’autant plus que l’effort de composition n’a jamais été aussi solide.

La guitare crée un dynamisme rêveur, le piano une nostalgie intense, et la flûte a cette douceur essoufflée, endormie. Les trois instruments sont mieux lotis ensemble, sans la distorsion qui viendrait peut-être casser un tableau trop serein. A cela s’ajoutent des bruitages discrets, des chœurs éthérés, une cithare effilée, ou un petit sifflotement perdu. Les titres des morceaux en disent assez, le chant n’est donc plus vu que comme un complément.

Walran a réussi à faire passer ses restrictions budgétaires pour des intentions artistiques – il fait avec le moyen du bord, et se rend plus convaincant que jamais. On retrouve donc chaque instrument intelligemment détaché, brut, une texture de vieux vinyle, qui rappellerait l’atmosphère minimaliste du trop vite oublié CARVED IN STONE. Une tanière sonore confortable, qui rappelle les longs passages instrumentaux d’ESTATIC FEAR ("Les Dernières Lueurs" semble tout droit tiré d’un "Somnium Obmutum") ou EMPYRIUM, et ce n’est pas sans citer d’autres groupes folk comme NEUN WELTEN, NEBELUNG, TENHI, NEST et j’en passe, qui, je n’en doute pas une seconde, étaient dans la tête de Walran lorsqu’il composait ces pièces.

Un album qui cache ses richesses dans sa simplicité, qui développe une ambiance personnelle, cherche à émouvoir sur tous les plans, et y parvient merveilleusement bien.
J’insiste sur le « merveilleux ». Le choix de l’acoustique rend la musique de BETRAY-ED plus aérienne et laisse place aux images, à la rêverie.

On se retrouve forcément un peu sur sa faim sur les titres courts, et une fin d’album (enfin, de EP) qui arrive bien trop tôt. On regrette que des titres comme "Silencieusement" ou "Les Dernières Lueurs" ne développent pas davantage leurs mélodies. Inversement, "De Mon Pinceau d’Argent" est la seule piste me paraissant un peu trop commune. Mais bon, reste une question de goût qui n’ira en rien changer un court album qui brille par sa délicatesse.