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2011 En Form For Blå
 

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AETHENOR - En Form For Blå (2011)
Par ENLIL le 25 Avril 2011          Consultée 4363 fois

L’époque des bredouillants "Deep Into The Ocean Sunk The Lamp Of Light" et "Betimes Black Cloudmass" semble définitivement révolue. "En Form For Blå" en est le brillant manifeste. Les acquis du précédent opus y sont réaffirmés, consolidés. L’assise n’en est que plus ferme et la musique, sûre et riche. De septette sur l’excellent "Faking Gold And Murder", c’est en quartette que la formation, réunissant un bon lot d’expérimentateurs en marge de la scène Metal, livra trois sessions d’un live donné en 2010 à Oslo, Norvège. Pour cette performance, nous retrouvons les inamovibles Stephen O’Malley (SUNN O))), etc.) et Daniel O’Sullivan (GUAPO, ULVER, MOTHLITE) qui, pour l’occasion, a jugé bon de ramener son copain Kristoffer Rygg (ULVER) pour épauler son Fender Rhodes. Le batteur free-jazz Steve Noble, membre du défunt groupe de post-punk anglais RIP RIG & PANIC vers le début des 80’s et, actuellement, de pléthores d’autres formations live tournant pas mal en Angleterre (dont le très bon TONGUES OF FIRE et les power-trio N.E.W, DECOY) prend la place de l’étourdissant duo suisse BUTTERCUP METAL POLISH. Le départ de David Tibet, dont la voix aigre-douce guidait chacune des étapes de "Faking Gold And Murder", laisse un vide relatif que seuls les instruments en présence combleront. Un des membres fondateurs du groupe, Vincent de Roguin (SHORA, ODIO TERZ), s’en est malheureusement allé…

Mais ÆTHENOR, avant d’être une musique dont l'excellence mit trois ans à se manifester, c’est aussi un nom, une fascinante forgerie. ÆTHENOR, mot-composé fusionnant le vieux terme «Athanor», ou «four philosophique» au moyen duquel devait se réaliser le processus alchimique pour la création de la pierre philosophale, métaphore d’un savoir aussi bien technique que spirituel ayant pour fin la purification mystique de l’âme de l’alchimiste (deux aspects indissociables d’une même grande œuvre culminant à la perfection chez un Maître Eckarth) ; et celui d’ «Æther», dieu primordial de la mythologie grecque personnifiant l’air igné, pur et chaud des régions supérieures du Ciel, exclusivement respiré par les dieux… alors, ÆTHENOR ? L’alchimie musicale rêvée, liquéfiant et indifférenciant l’âme de l’auditeur au contact de bouillonnantes concrétions sonores rendues, solve et coagula, à l’état informe ? Bah ! D’une telle musique on se gardera bien de présupposer quoi que ce soit d’hermétique ; ni lourdeur, ni grille de lecture, là où tout n’est qu’ouverture, fluidité, fulgurances et gerbes de sons recueillis en bouquets multicolores... pure de tous concepts et libre de forme, entièrement instrumentale, cette dernière s’avance à découvert, se dévoile dans toute sa plénitude, ses auras, ses échos, ses générations spontanées de détails et ses massives épiphanies.

Si le rendu est absolument unique, en plus d'être très bien produit (aucun bruit parasite, mise en valeur de tous les instruments en présence), la démarche musicale d’ÆTHENOR n’en est pas moins exempte de prémisses. On pourrait remonter au Miles Davis électrique d’"In A Silent Way", qui déjà ouvrait la voie en opérant une fusion entre le jazz et ce qui s’avèrera, beaucoup plus tard, l’ambient (on sait d’ailleurs à quel point "In A Silent Way" était porté haut dans l’estime de Brian Eno), d’une en étoffant l’instrumentation « typiquement » jazz de machines analogiques (pas moins de trois claviers électriques !), et de deux en étirant les plages musicales en longues tapisseries atmosphériques, imprédictibles et évolutives. Si ÆTHENOR s’engouffre bien dans cette brèche, à la suite des Norvégiens SUPERSILENT ou, plus récemment encore, des Allemands du HÖLENMUSIK ENSEMBLE, tous tendent cependant à substituer les machines analogiques aux instrumentations coutumières du jazz, en continuant à créer dans le cadre de l’improvisation.

Toute l’attention se porte alors sur la densité des trames électroniques tissées par le duo Kristoffer Rygg/Daniel O’Sullivan, leurs éclats et leurs textures, qui vont et viennent en motifs réverbérés, ensorcelants (les gouttelettes montantes et descendantes du Rhodes sur ce "One Number…" aux frémissantes courbures mélodiques, les scintillations de "Something To Sleep…", les efflorescences inouïes de "Vyomagami Plume" qui sitôt se rétractent, jalouses de leurs secrets), enrichies par le remarquable vocabulaire rythmique de Noble qui, de fait, soutient aussi bien le côté ambient (prolixité des cymbales, soubresauts métalliques divers et variés, cellules rythmiques se développant en véritables leitmotivs) que le côté plus viscéral, rock’n’roll d’"En Form For Blå", surtout lorsqu’il explose de concert avec O’Malley, lui, donnant libre cours à sa force de frappe, déchaînant un rythme tellurique qui n'est pas sans rappeler les cavalcades fiévreuses de la faste époque d’Elvin Jones ; et l’autre, déchirant l’espace sonore en déflagrations de speed-drones qui tachent (les pics d’intensité de "Jocasta", "One Number…" qui rappellent brièvement l’expérience PENTEMPLE), ou l’obscurcissant de grondements mixés plus en retrait, comme d’une menace sourde. Une excellente entente donc (nos deux hommes ayant par ailleurs joué ensemble au Café Oto), et un répertoire à la batterie pour le moins ahurissant…

En résulte une musique déambulatoire, enivrante, riche et pressante et heureuse à foison, insaisissable du fait d’une extraordinaire prolifération de sons offerts aux sens, jeux d’ombres et de lumières qui se succèdent, communiquent entre eux et se répondent en échos, pour mieux se fondre en d’envoûtants paysages aux reliefs fluides, instables, donnant l’impression d’aquarelles en train de se faire, ou de vivants tableaux impressionnistes… en fait, il faudrait un style retors, fulgurant, butant, tombant et aussitôt repartant, style-zigzags, tobbaguanant et babouin, pour rendre compte des profus méandres de cette musique admirable, céleste et généreuse en tout… surtout en magie, rivalisant de beaucoup, quoiqu’avec des atmosphères différentes, avec les Norvégiens SUPERSILENT…

Lorsque, errant sous la voûte de ce sanctuaire qui de vie bouillonne, verdoie ; chancelant, du fait d’un tapis gorgé de détails qui sous nos pieds fluidement se déroule, puis brusquement se retire et se redéploie en d’inédites et chatoyantes couleurs ; sursautant, dès que frouent et grondent, cachés sous l'épaisse futaie des sourds et des graves, les terribles oiseaux aux cris tantôt analogiques, tantôt percussifs ("Vivarium" et "Laudanum Tusk", plus butors ou frégates que petits oiseaux chanteurs) ; le sublime soudain fait irruption, inonde, irradie : voltes-faces instrumentaux nimbés d’auras surnaturelles, éblouissantes épiphanies toutes droites venues du 7 de SUPERSILENT qui s’élèvent, majestueuses, en masses sonores denses et composites (le premier tiers de "Laudanum Tusk", le final de "Vivarium", qui s’achève déchiqueté dans des hurlements analogiques aqueux, jaillis sous pression), charriant trémulations électroniques diverses et variées, rondeurs aquatiques des pédales d'effet où chaque note, comme pierre jetée fend puis évase, ondes concentriques, la surface d’un bassin (cette mémorable guitare aux relents psychédéliques de "One Number…"), alentours serti de mini-sons scintillants, épanchements électroniques qui bruissent, ruissellent, grelottent en maintes toiles, maints miroitements qu’attestent ces vivantes colonnes au marbre bourgeonnant, sonore, de liquides iridescences… oui, les mélodies diaprées de "Dream Tassels", "One Number…" et celles, étoilées, de la fin de "Jocasta" rappellent le "Mirage" de KLAUS SCHULZE, voir le "Die Festung" de PAYSAGE D’HIVER... d’autres, se déployant en profondes et moelleuses nappes émaillées de babils mystérieux, rappellent COIL… et ça foisonne, ça foisonne, ça n’arrête pas…

Il faut que je m’arrête. Cette chronique est trop longue, et d’une telle musique on pourrait en parler des heures, chercher l’exhaustivité pour finalement n’en effleurer que la surface, alors que son fond en intime au silence et à la plus sereine contemplation. Merci les gars. Puissiez-vous continuer longtemps ainsi.

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- Stephen O'malley (drones guitares, bidouillages)
- Daniel O'sullivan (fender rhodes)
- Kristoffer Rygg (bidouillages)
- Steve Noble (percussions)


1. Jocasta
2. One Number Of Destiny In Ninety Nine
3. Laudanum Task
4. Vivarium
5. Dream Tassels
6. Vyomagami Plume
7. Something To Sleep Is Still



             



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