Partout je vois ce mot à côté de SARGEIST : « culte ». Il est vrai que le terme est galvaudé depuis que le monde est en manque de héros, comme le scandait Mustaine en 2001. On recherche le culte partout depuis que les papis du Metal sont en maison de retraite, afin de s’agenouiller et prier, remercier notre Dieu métallique de nous avoir envoyé son nouvel émissaire pour nous labourer les glandes. Donc, SARGEIST serait culte, hein ?

Pas surprenant venant des fans de Black crado, ce que jouent les Finlandais. SARGEIST (« esprit de cercueil » en allemand) serait donc aussi rétro ? Les puristes rétorqueront que les styles ne meurent pas et ils auraient raison. La musique de SARGEIST, enfin son genre, est culte depuis longtemps, car il a vécu déjà de noires aventures. L’expérience entraîne le culte, pas le contraire. On pourrait aussi rechercher la source de ce culte dans le line-up du groupe formé en 1999 ; on y retrouverait sans peine un des vieux routiers les plus respectés de la scène black finnoise, le bien nommé Shatraug. Le fondateur de HORNA est un vrai bourreau de travail et, semble-t-il, un excellent convive lors des soupers du Réveillon de Noël. Ça aussi, c’est culte.

Partout je vois ces mots à côté de SARGEIST : « album Black de l’année ». Il est vrai qu’avec une telle collection de rites blasphématoires, une production juste assez sale pour être claire et une pochette ridiculement provocatrice, sans oublier le titre invitant "Let The Devil In", les mordus ont pris leur pied en cette fin 2010. De la défonce constante provoquée par une batterie qui bastonne comme les ailes d’un oiseau-mouche en semi-repos (hum, je garde cette image pour les jours pluvieux…), une guitare rapide crachant un venin mélodique et malsain et une voix comparable à une séance de torture pour le commun des mortels, SARGEIST a tous les attributs d’un potentiel chouchou cisailleur de croix.

La vérité est que "Let The Devil In" est un album bien fait et foutrement accrocheur. Encore faut-il ne pas être blasé du style, car ne vous attendez pas à un album hétérogène. L’osmose visqueuse de SARGEIST cloue au piloris, la haine de Dieu et l’adoration de mon Maître est son leitmotiv. Donc pas de quartiers. Ça explose et virevolte du début à la fin dans des accords macabres et parfois drôles, tellement la caricature est grande. Tellement SARGEIST est fier de trôner sur la ligne entre l’underground et le Black mainstream. Pas étonnant qu’il ait été si remarqué, il a la gueule pour plaire à tous les paroissiens, sauf peut-être les hyper croyants encapuchonnés qu’il empoisonne de ses riffs et incantations tranchants…

Ouh, que ça fait peur ! Mais non, ne craignez rien, car SARGEIST a reçu une tonne d’éloges parce qu’il est abordable. Il est parfois chiant et répétitif, mais le chapelet de mélodies reconnaissables – comme si on les avait entendues des milliers de fois – de Shatraug pend merveilleusement au cou et ne vous brûlera pas les doigts de dégoût. C’est ça quand on est aguerri, qu’on est culte.

"Let The Devil In", je le sens, provoquera les passions. Il y aura du 5/5 dans les commentaires avec aucune envie d’en discuter. C’est ce que provoque le culte… Donc oubliez mon avis et penchez-vous quelques heures sur cet album. Si vous implorez encore votre Dieu après, c’est que SARGEIST n’est pas si culte après tout.

Note : 3,5/5.