Je ne compte plus les jeunes groupes de Black Mélo/Épique aux accents Viking et Folk qui poussent sur les souches de leurs « ancêtres ». Ils sont nombreux et très talentueux (je pense simplement à FORTID, VOLUSPAA et MISTUR), nous font cadeau d'albums où les hymnes guerriers et les mélodies éthérées, sublimées par les chœurs, font écho à un passé déjà lointain mais dont l'héritage ne semble pas dérougir. La preuve : la multiplication des formations mordues de cette imagerie Black/Viking, Black épique.

Les Norvégiens de NATTSOL sont un de ces poulains de l'écurie scandinave qui permet à ce Black naturaliste croisé avec le glaive et le navire de guerre, de survivre sur des ondées aux teintes chaudes. NATTSOL n'est pas différent de ses congénères : il alterne la brutalité du barbare et le lyrisme du conquérant.

Écoutez "Ved Baal I Kveldstime" et son refrain absolument magnifique et scotchant pour avoir le meilleur exemple de ce que j'avance. Subjugué j'ai été devant autant de beauté, comme lorsque je suis tombé sur les meilleures réussites du dernier EREB ALTOR ou FORTID, ces longues et passionnantes complaintes couillues, où l'agresseur s'ouvre les veines, la gueule ouverte au ciel. Cette fatalité est sans cesse dépeinte sur ce genre d'album et c'est probablement ce qui en fait leur force. Que le skeud dure 30, 45 ou 75 minutes, que l'effet recherché soit engendré à partir des voix entremêlées des chantres masculins et/ou féminins, de clavier sublime ou de cordes organiques et bourgeonnantes.

NATTSOL en est seulement à son premier album avec "Stemning", aussi est-il un peu radin : six pièces pour 37 minutes, dont une extra comme j'ai dit, et une très calme entièrement à la guitare sèche et à la flûte chantée par Anette Gulbrandsen ("Ved Hav I Avdagsleitet"). Ce qui nous laisse quatre grosses lames afin de pourfendre le plus possible les tympans suffisamment dégourdis des fans. La question est donc de savoir si le manque d'argent des départs aura été néfaste au combo ou si, au contraire, son talent surpasse ces platitudes économiques.

La réponse est partagée. "Stemning" apporte d'excellents moments et gratte juste ce qu'il faut pour que NATTSOL soit considéré parmi la relève en frais de Black épique. La bonne pièce d'ouverture "Ved Aas I Haustmoerket", le riff tournoyant de "Ved Skog I Natterstid", le blastbeat plein de défi de "Ved Fjell I Vinterblaest" et ses jolies variations de tempos, ne manqueront pas d'attirer l'attention. Par contre, le mix des voix sur la chaotique "Ved Elv I Eismal Stund" et, encore une fois, la drôle et douce pièce de clôture sortie tout droit d'un CD de relaxation, prouvent que NATTSOL tente de bien asseoir ses forces.

Ces dernières sont indéniablement les envolées en chœur déclenchant une armada de frissons, les mélodies fun et belliqueuses à la fois (son côté Viking éloigné pleinement assumé) et sa capacité à tresser des structures amphigouriques (j'ai appris un mot !) mais déchiffrables sans clé. Notons aussi cette manie de varier les notes sans crier gare, de sortir un riff plus aigu alors que le propos est sombre et que la cavalcade s'approche de l'affrontement. NATTSOL manie également bien l'acoustique, dont il embellit parcimonieusement son chemin. Le strict minimum, quoi, sans fioritures. Le poulain est encore au sein, n'oublions pas, et il ne possède pas nécessairement les aptitudes de géant de quelques confrères (VOLUSPAA, pour ne pas le mentionner).

Il détient toutefois un attirail luisant et percutant qu'il sera intéressant de voir étalé devant les bottes ennemies dans un avenir, souhaitons-le, ponctué d'encore plus de bijoux comme ce "Ved Baal I Kveldstime" dont je ne remets pas encore.