Plus ça va, plus la scène australienne m'exaspère. Entre le pleurnichard hyperactif DROWNING THE LIGHT, AUSTERE le cafardeux asthénique et STRIBORG le clown bontempi-deux-doigts, mon cœur fait des hauts tandis que la scène, elle, plonge misérablement vers le bas. Heureusement que les brutasseries mononeuronales de DËSTROYER 666 et le talent de NE OBLIVSCARIS égaient le paysage musical ; auquel cas je ne serais même pas là pour vous parler de cette pierre dénichée à même le sol du Queensland. Comme quoi, je suis vraiment un mec sympa. (En fait je sais très bien que cette chro fera un bide, alors j'en profite pour me passer un petit coup de pommade, hophophop, ni vu ni connu t'as vu.)

Avare en longueur mais riche en éclat, voilà à quoi pourrait se résumer cette démo de MOON, format cassette disponible en 200 exemplaires - bientôt épuisés - sur le label français Cold Void Emanations. Entre autres choses, si la durée dessert le travail proposé ici (pas plus de 20 minutes au compteur), ce n'est que pour mettre en valeur ces trois plages d'un Black Metal foncièrement atmosphérique, véloce et évocateur. Et quelle valeur ! Si l'inspiration de Miasmyr s'était maintenue 10 ou 15 minutes de plus avec la même poigne, nul doute que la couronne, d'une tiare supplémentaire se verrait sertie !

Même si la veine exploitée par l'artiste a déjà été forée, investie et raffinée de fond en comble, que ce soit par les Allemands LUNAR AURORA, le Suisse PAYSAGE D'HIVER ou, dans une surprenante similarité du son, par un certain AURVANDIL, force est de constater que, toute courtitude mise à part, MOON réussit à se creuser un bel et solide alcôve dans cette ruche aux cellules se confondant par leur amateurisme et leur inachèvement chroniques.

Un des atouts majeurs, ici, tient à la production : crue, certes, mais pas au point de ne plus entendre la mise en place de chaque instrument – la basse en flux tendu, les descentes de tremolos et leurs vagues de distorsion raw, les synthés pertinents s'élevant aux moments opportuns ("Moon III", rhâ lovely) et étendant leurs textures longuement maintenues… déploiement d'horizons purs au dessus d'une frénésie tempétueuse, mi-astrale mi-onirique, typique du genre, mais particulièrement bien faite. D'où immersion et acquiescement, à des lieues des kitscheries habituelles.

Un des codas de réussite du genre, l'Ambiant Black/Black Ambiant, tiendrait en ce que chaque instrument se fonde l'un dans l'autre pour ne plus faire qu'un dans une même matière sonore, dans une sorte d'alchimie décuplant la puissance d'évocation, la poétique de l'œuvre.

Ici, c'est pleinement le cas ; les tremolos se chevauchent et se superposent en de longues équipées stratosphériques et quelque peu brouillonnes, la puissance de la voix comme les claviers s'étirent à n'en plus finir, tandis que la batterie, noyée et dépourvue de dynamisme, se contente d'insister, encore et encore, pendant que l'esprit plonge dans une douce langueur.

Puis la fin, trop abrupte, le tire sans crier gare de sa douce rêverie ; 20 minutes ma foi fort agréables, bien que trop courtes, et frustrantes. MOON douterait-il quant à son inspiration sur une plus longue durée, avant que le serpent ne finisse par se mordre la queue ?