Dans la catégorie « groupe de Black que peu connaissent et dont la carrière sera passée sous les radars », voici BALTAK. Difficile de se documenter sur cette entité, on pourrait croire que "rareté indésirable" est son deuxième nom. Australien de naissance et jouant un Black bien pétrolifère à saveur encyclopédique, il est tombé sous la coupe d'un de nos lecteurs. Boîte à Demandes oblige, je me prête au jeu de la machine à voyager dans le temps.

Parce qu'il faut bien un point de départ à toute écriture, Gorgoroth, leader de BALTAK, s'approvisionne dans les cendreuses histoires de Macédoine. Une première pour moi, ça me change de Tolkien, de Satan et des SS. Ça ne paraîtra probablement pas dans les hurlements ni les compos, mais voilà, le souvenir de Macédoine plane sur ce deuxième album, "King Of Two Worlds". Je vous laisse le soin de deviner qui est ce roi, idole de bien des hommes politiques disparus…

Les titres sont longs et s'enchaînent facilement, gracieuseté d'un si charmant fade out basique et quasiment comique de deux secondes. Et on repart ensuite de plus belle ! BALTAK aurait sûrement pu empoigner sa hache de guerre et couper au moins dix minutes à son "King Of Two Worlds", bien que les aficionados d'un Black underground à la limite de la clarté se régaleront des heures durant. Surtout que BALTAK injecte à sa musique une réelle dévotion à ce royaume évanoui de Macédoine, c'en est impressionnant. Sans dire que Gorgoroth en soit un descendant illégitime, il faut lui donner ça : les ambiances crades et psychédéliques sur lesquelles la batterie est d'une redondance astronomique, donnent à manger. L'heure passe rudement, mais elle finit par accoucher d'un skeud écoutable.

Les zicos agitent leurs paluches si rapidement qu'on dirait parfois qu'un synthé est de la partie, mais non, la mélodie des grattes (le morceau-titre et "A King Was Born" sont particulièrement bons), aussi saturée soit-elle, assure. Mais bon, malgré les titres de cet alignement de 58 minutes, n'allez pas croire que le classieux ou que des orchestrations viennent « historiquement » rehausser la facture des Australiens. L'ensemble demeure minimaliste dans la forme et la production. Le groupe compense toutefois ses lacunes en studio par des instruments ethniques ("Pharoah Of Egypt" et "Macedonia Will Return") ou des paroles anciennes ("Macedonian Phalanx" et "Bucevole") qui résonnent dans les couloirs temporels. Mouais… Bizarres ces intros. Le destrier s'empourpre heureusement sur "Bucevole", un des meilleurs titres de ce "King Of Two Worlds". C'est cinglant, rapide et précis.

Ce qui rend BALTAK sympathique à mes yeux est aussi son empreinte dénuée d'influences scandinaves, allemandes ou autres ; son armure possède son propre A.D.N., il n'est pas calqué sur les paternels du genre. Il faut également vous dire que le groupe a été formé en 1995, en pleine période « entonnoir bourré » pour ce style hétéroclite et conspué qu'est le Black Metal sans sucre ajouté, alors la formation n'en était pas à ses premières folies en 2000.

Au final, que dire de BALTAK sinon qu'il est à conseiller seulement aux initiés ? Les Australiens n'ont peut-être pas marqué la mémoire collective avec leur parcours laconique, mais "King Of Two Worlds" est une curiosité que les inconditionnels doivent faire tourner.