En 1985, TROUBLE, devenu dans les années 2000 une des icônes du Doom Metal préhistorique, celui sans les vocaux qui font « grr grr », a décidé de ruiner le bel élan de 1984. Résultat, une totale réussite. "The Skull" se retrouve bien à la peine lorsqu'on le compare à "Psalm 9" et parvient même à nous faire douter de l'intérêt d'un combo peut-être trop bien parti.

La pochette annonce la catastrophe, logo hideux et artwork aux couleurs qui crachouillent nous mettent en garde sur un produit qui n'a strictement aucune chance d'intéresser les générations les plus récentes et qui pourrait même peiner à satisfaire les grabataires les plus bon public du Hard Rock. La faute à quoi ? A cette décision incompréhensible de perdre toute son originalité pour se complaire dans un Heavy trop bien ancré dans son époque et nettement moins appétissant que celui confectionné par les géants des eighties. Et voilà une nouvelle comparaison douloureuse. A côté d'un "Defenders Of The Faith" (TROUBLE évoque lui-même l'influence JUDAS PRIEST), d'un "Powerslave" ou d'un "Don't Break The Oath", ce deuxième opus venu de Chicago fait figure de nain, voire de mite.

Vous l'aurez compris, TROUBLE nous a sorti là une galette de Heavy Metal d'un classicisme condamnable, qui s'extirpe de la masse uniquement grâce à la voix si particulière d'Eric Wagner (qui rappellera certainement et selon les références de chacun Robert Plant ou Axl Rose), grâce à quelques riffs trop timidement parsemés, grâce à ce solo paumé au milieu d'un océan de médiocrité, celui qui conclue "Gideon", riche en phrases intelligemment répétées et étrangement mélodiques. Les guitares ont maigri (malgré une production plutôt meilleure que sur le disque précédent), le tempo se fige à une allure désespérément constante et mid tempo, les riffs perdent en à-propos.

Qu'est-il advenu du caractère multiple qui allait si bien au teint de "Psalm 9" ?
Où sont passés le Blues, le Speed, le Stoner de débuts tellement osés et innovants ?
On se demande et on évitera de se poser la question trop longtemps afin d'éviter le mal de crâne. La messe est de toute façon rapidement dite, "The Skull" n'est pas bon, vulgairement moyen tout au plus. Et encore, beaucoup devraient le trouver passablement somnolant et profondément inutile.

Tiens, une autre interrogation :
Mais TROUBLE, à la base, ce ne serait pas un groupe de Doom ?
A la base oui, mais le genre n'a pas réussi à grimper les escaliers pour accéder au deuxième étage et c'est bien là la partie la plus triste d'un constat sacrément négatif.

Constat extrême et exagéré, sachons aussi sauver des eaux ce qui le mérite. Quelques instants lumineux (simple exemple, cette montée épique qui introduit "Wickedness Of Man") et un dernier titre presque capable de racheter l'intégralité de la galette : "The Skull", voyage au plus profond d'un univers angoissant, à la limite du Gothique, une accélération musclée, plusieurs schémas de guitares réussis, antithèse parfaite de l'ennui générée par six autres plages aux quelques secondes récupérables éparpillées de ci de là. "The Skull", morceau susceptible de détrôner les plus beaux champions de "Psalm 9", qui restera gravé dans les mémoires pour longtemps.

Mais attendez encore une seconde, en surfant sur la toile, je m'aperçois que beaucoup aiment cet opus, classé comme "Psalm 9" au rayon des classiques du Doom.

Et là, mes certitudes tombent, je comprends que je ne suis vraiment pas spécialiste de Doom, encore moins traditionnel. Je n'en démordrai pourtant pas, "The Skull" constitue trois pas et demi en arrière pour un artiste qui avait osé toutes les influences une année plus tôt, qui a perdu l'audace qui le rendait si particulier et intéressant, qui n'est donc plus ni particulier ni intéressant. Tant pis pour l'animal.