« Comme un phénix, la ville biélorusse de Minsk s’est relevée de nombreuses fois après avoir été réduite en cendres. » Voilà comment MINSK explique son nom. Il s’avère judicieusement choisi, car à défaut d’être ressuscité, le groupe est un phénix au plumage chatoyant et sombre en même temps…

Tout comme ce visage de pierre fusionné à un arbre centenaire tombant en ruines sur la pochette de leur troisième opus, les Amerloques de Chicago interloquent d’un seul coup d’œil. On a envie de jeter une oreille sur le disque se cachant sous une telle prose visuelle. On devine rapidement que cette platine sera Prog, de part le mystère planant sous ces couleurs glauques et grises. Or, il n’est pas que Prog, il sert sur un plateau d’argent un Doom-Post fascinant, tribal, empestant le roc et les racines, l’écorce et… l’inconnu. Le flou, l’inaccessible, l’hallucinatoire, le céleste et l’organique à la fois. Un peu le genre de combat que livre COBALT, version moins violente, additionnée d’envolées claniques, voire préhistoriques si on a bien de l’imagination !

L’odyssée intérieure « root » de MINSK débute sur l’éclectique et Prog "Three Moons", à la guitare mystique et aux jams tribaux enlevants. Ces derniers passent essentiellement par l’utilisation du tambour conga, originaire de Cuba, que le chanteur Tim Mead ne ménage décidément pas, les cordes hautes en matières grasses et la batterie généreusement fournie en breaks de Tony Wyioming (celui-là porte bien son nom). C’est aussi dès ce punch initial que le combo plante son plus imposant monolithe.

Le reste de cette fabuleuse heure d’un voyage intemporel déstabilisant est aussi excellent, grâce entre autres aux changements de tempos saupoudrés des instruments se faisant une lutte sans merci. C’est orgiaque au possible, les ambiances sont lourdes mais jamais dépressives, MINSK demeurant dans une niche Prog et terreuse, à la limite du spirituel ("Means To An End"). MINSK est extérieur, vallée, montagne, pas intérieur et asthénique. "With Echoes In The Movement Of Stone" aurait tout aussi bien pu être enregistré à flanc de montagne que sous un tipi devant un shaman, comme dans un studio boisé. Ce mur sonore est irisé de centaines de teintes.

Mais MINSK n’est pas que brouillard sur la plaine au lever du soleil, il est aussi groovy à mort. Des plages comme "Crescent Mirror" entourloupent la nuque et foutent la bougeotte. Ces orages se poussent parfois pour laisser filtrer un ciel bleu azur et des zones aériennes à la limite du romantique, faisant ressortir le goût de l’aventure des musiciens, littéralement sous bonne influence. Oui, il ne fait aucun doute que la saveur « root » du groupe prend le dessus sur toutes ses compos et que l’allégeance à un Post Rock bien enfoui ressort dans de languissantes impulsions.

Il peut également se transformer en volcan dans d’innombrables ponts aux lianes figées ou sur la quasi entièreté de ses sacrifices aux Dieux de la nature ("Pisgah"). MINSK étant de prime abord une bête bourrue mélodique, les alternances « gueulages-jammin’ » constituent la majorité de ses efforts, comme sur les sublimes et généreuses "The Shore Of Transcendence" et "Consumed By Horizons Of Fire".

"With Echoes In The Movement Of Stone" est un album ébranlant, stupéfiant dans sa structure et ses nombreuses couches de roches métamorphiques. De la roche née du feu sur laquelle les fleurs poussent maintenant afin de combler les sens des montagnards assis sur leurs tympans. MINSK est comme la nature environnante : l’auditeur devra redoubler d’effort pour l’apprivoiser et en saisir toutes les subtilités.