Jeune formation ibérique utilisant le même crayon pour les yeux que DARK MOOR (non pas le même attirail), GOTHMOG nous lançait au jour de l'An son premier album au visage, "A Step In The Dark", titre on ne peut plus révélateur de leur démarche artistique. Le combo est né de la fusion de Ruben Picazzo, Roberto Garcia (non, je n’ai pas essayé de comparer son ADN avec celui du guitariste du groupe mentionné plus haut), deux fondateurs du projet Power Metal CAIN’S DESTINY, et de trois autres paires de bras.

Avant de brûler le fer dans la plaie des sympathiques Valenciens, saviez-vous que Gothmog est le nom du général des troupes de Sauron qui attaquent Minas Tirith ? Oui, cette belle grosse bébête à la mine blanche patibulaire avec une excroissance de chair qui lui cache la moitié de l’œil gauche dans "The Return Of The King". Nous avons donc affaire à d'énièmes adorateurs de l'œuvre tolkinoise, mes chers amis. La question est : sont-ils aussi méchants que Mothmog le sans-peur ? Si on en croit les ragots, le groupe est supposé nous ramener à l'époque où le Black Sympho/Atmo était pur ; on ose même comparer leur travail à celui d’EMPEROR et SATYRICON. Wow, que d’honneurs pour leur distributeur Xtreem Music, le même rigolo qui fait courir ces rumeurs...

Cette première ronde sur le champ de bataille, ce premier "pas dans le noir" pour le combo, se fait d’une manière plutôt maladroite, avec la courte et punchée "Eternal Hate". Bon, pas de quoi se lever la nuit. Les Espagnols montrent heureusement leurs vraies couleurs lors des rounds suivants et ne ralentiront guère souvent : "The Awakening Of Lord Strigoi" et ses changements de beats constants, "Downwards The Hades Of The Soul" qui termine dynamiquement le skeud, "Nostalgia Of Heaven", une des plus réussies grâce à un superbe solo en son milieu, ainsi que "The Art Of War" et "Ghosts Of Ancient Days", nous distribuent de bons blastbeats. Certes, les blêmes musiciens nous amènent de montagne en montagne, on ne peut nier, le parcours est somme toute agréable.

Mais la super prod’ qu’on nous annonçait n’est pas au rendez-vous. Le son est timide et nous renvoie, en effet, dix et vingt ans dans le passé. Sauf que nous sommes au présent et le Black Mélo a besoin de sang neuf, pas de remâché. Nullement épique ou transcendante, cette carte de visite de GOTHMOG devra retourner chez l’imprimeur. Manque de polissage, de noirceur dans ce Black censé nous coller à notre siège, on doit obtenir plus. L’ère de "Nemesis Divina" est loin.

Ça ne griche quand même pas dans les écouteurs, mais ça manque de finition et de rage, c’est certain. Plusieurs pièces semblent bâclées ou largement inspirées des derniers opus de Heavy Black descendus en flammes par la critique. Ne riez pas trop, mais le début de "Raging Spiritual Ecstasy" me fait penser à du Speed… Dédoublement de personnalité ?

"A Step In The Dark" n’est pas un grand album, mais il contient tout ce qu’il faut pour accueillir GOTHMOG les bras presque entièrement ouverts dans la large famille du Black Mélo : des chants gutturaux et grinçants, des passages atmosphériques issus de claviers bon marché (est-ce positif ?, huhu), une guitare violemment languissante, une batterie tantôt véloce tantôt doomesque… Des ingrédients qui devront cependant être vachement plus relevés dans le futur pour que ce courant d’air hispanique ne nous entre pas dans une oreille pour nous ressortir par l’autre. GOTHMOG peut d’ici là compter sur mon support, mais mon indulgence en déficit de bons riffs s’arme déjà d’impatience.

* Vous remarquerez le calembour involontaire de l’année dans le nom du batteur… parions qu’il revient de voyage au Maryland !