Conversation entendue dans une galaxie métallique près de chez vous entre un jeune amateur de Core qui commence à découvrir autre chose et un disquaire :

- " Hey mec, c’est quoi ce truc, DESTROY DESTROY DESTROY ? C’est affreux comme nom ! Ils bégaient ou quoi ? Et c’est quoi cette réplique infernalement modifiée de Monster Inc. sur le cover ?

- Ben, c’est théoriquement du Power américain mixé avec du Death Mélo, mais je miserais pas sur le mélange, répond l’autre. Y’a aussi des orchestrations, des synthés à la tonne, des chants guerriers et le gueulard a des gênes à Laiho, j’en suis sûr. Puis, la pochette, je sais pas. Ils avaient peut-être trop fumé en testant le nouveau Photoshop, va savoir.

- Hein ?

- Ouais, t’as bien entendu.

- Non, ce n’est pas du Death Mélo, impossible voyons. Mon frérot est un fan d’IN FLAMES et de DARK TRANQUILLITY et il n’y a pas d’orchestre minable derrière tout ça. Même si cet orchestre est simulé par le clavier. Et ça peut pas être du Power, t’as déjà entendu ICED EARTH jouer avec Michael Kamen ?

- Eh, l’ami, on est en 2009, pas en 1992. Prends ce disque et va mettre ton frère à jour…

Quelques semaines plus tard, le grand frère se rend à la boutique et demande à parler au même disquaire. Ce dernier se souvient très bien du jeunot.

- Bon, ben, voilà, j’me suis mis à jour, commence l’amateur de Death Mélo. T’avais raison de fustiger poliment l’morveux, à qui j’ai spécifié en passant que Michael Kamen est allé rejoindre Chuck Shuldiner y’a quelques années. Bref, c’est débile ce truc !

- Ouais, je l’écoute en boucle aussi. J’aime particulièrement la deuxième avec son air ronflant et ses tintements de triangle, la septième et ses chœurs épiques, la dernière qu’ils ont enregistrée saoul…

- "Battle Sluts Drinking Song" ? Ouais, Y sont pas clairs ces mecs-là… Mais qu’est-ce que tous leurs arrangements et leur chorale de poilus viennent faire dans du Power ? Ou du Death Mélo avec voix Black, je sais plus. J’ai l’impression certains jours d’entendre du IN FLAMES classieux et d’autres, du CHILDREN poli à la sauce Viking. Je déraille. Et qu’est-ce que tu me chantes avec ton triangle toi ?

- Ça, mon cher, ça s’appelle la fusion des genres. L’évolution. Ça s’appelle repousser les frontières.

- Merde, si plus de groupes osaient faire ça…

- Ben s’ils faisaient tous ça, il ne resterait plus les purs. DESTROY DESTROY DESTROY sont pas des purs et durs, ils sont plutôt transfuges. Mais ils assurent, ça oui. C’est du lourd synthétique.

- J’imagine que c’est la mode de foutre les conventions en l’air ! Comme si d’autres branches poussaient à l’arbre généalogique du Metal…

- Ouais… poussive ta manière de voir, mais je sais où tu veux en venir. J’y ai déjà pensé à cette refonte des styles, mais je suis de la génération Maiden, alors je suis trop vieux pour ces analyses à la con. Tiens, près de la moitié de ce que je tiens en magasin est du fusionné : Thrash/Black, Doom/Prog, Death avec orchestre, je ne sais même plus quoi conseiller aux curieux. Je pense que la prochaine fois, je vais leur dire de piger et d’essayer.

- C’est pas ce tu as fait avec mon frère ?

- Non, j’ai pigé moi-même "Battle Sluts" un jour et j’ai découvert un machin nouveau. Ça m’a mis de bonne humeur. Et je me doutais que je ne serais pas le seul.

- Mais t’as dit que t’étais un dur ?

- Non, j’ai dit que j’étais un vieux, pas un dur. Parce que si j’étais si dur que ça, j’aurais pas aimé DESTROY DESTROY DESTROY et je serais passé à côté d’un foutu bon groupe. Un groupe qui détruit ta zone de confort et ton évangile en t’ouvrant les yeux.

- Ouvrir les yeux sur quoi ?

- Le présent et l’avenir. Le Metal se remodèle pour pas crever, c’est simple. Et y’a des opérations qui laissent pas trop de séquelles. "Battle Sluts" est indemne, mec. Alors tu peux l’écouter sans avoir peur qu’il te claque entre les doigts."

Note: 3,5/5.