On en remet encore une couche avec la sempiternelle litanie : « Je ne comprends pas un artiste de cette trempe, comment se fait-il qu’il continue à baigner dans l’anonymat le plus complet ? Avec un talent pareil, ce n’est pas Dieu croyable !!! ».
Le talent, seul, ne suffit plus aujourd’hui. Il faut pouvoir se rendre visible via les médias people. Et oui, quand on est musicien, on ne peut plus se contenter de vivre uniquement de son art. Il faut payer de sa personne pour accéder à la célébrité. On veut savoir avec qui tu couches, ce que tu prends comme drogue, si tu conduis en état d’ivresse et surtout si tu bats tes gosses. Et là en l’occurrence, on ne sait absolument rien de Eric McFADDEN.
Afro-Américain natif de New York et vivant dans la banlieue de San Francisco, il est chanteur et guitariste, un virtuose comme on en trouve peu, avec un jeu varié et des influences très larges allant de Jimi Hendrix en passant par le flamenco tout en empruntant un peu de Tom Waits, le tout saupoudré de mysticisme vaudou. Il aurait pu ne jamais voir son nom cité sur NIME le bougre. En effet, jamais il n’avait livré un disque entier, aussi ouvertement inspiré par le stoner. Son univers s’étoffant de disque en disque, il nous avait laissé avec le très intimiste «Let’s Die Forever… Together » en 2007. Rien ne laissant présager qu’il reviendrait en trio avec un album de grosse guitare, lourde, hypnotique et bien plus que cela encore. Pourtant aussi méconnu soit-il, son CV est rempli de prestigieuses collaborations dont celles de George Clinton, LIVING COLOUR et PRIMUS.

« Delicate Thing », titre éponyme ne surprendra personne avec son approche hispanisante et ses lignes mélodiques fort bien troussées. Plus d’une fois au cours de cet album, McFadden oeuvrera dans un registre proche des QUEENS OF THE STONE AGE et des bandes sons qui accompagnent les films de Tarantino. En effet, « Catch A Liar » commence comme le célébre « Battle Without Honor Or Humanity” qui a immortalisé le film “Kill Bill” pour offrir au final un titre groovy, tout en tension et superbement arrangé avec l’apparition de violon. Il s’agit assurément du meilleur titre de ce disque.
« One Bad Reason » nous entraîne maintenant dans une ambiance très Stevie Ray Vaughan comme en dispensait la bande originale d’« Une Nuit En Enfer » alors que « Been So High » nous fait la démonstration d’un savoir faire punk, deux minutes montre en main.
Pour « Want me Too », solo compris, l’illusion d’être en présence des QOTSA est redoutable mais néanmoins admirablement joué. Après une pause musicale Tarantinesque et hispanisante, « Ride », McFadden retourne au rock avec « Another Day » avant de nous offrir « Are You Happy Now ? » une ballade aux multiples facettes qui lui permet en plus de ses parties de guitares maîtrisées, de mettre sa voix en valeur.
« Delicate Thing », dernière mouture de McFadden se déroule dans la même ambiance, entre flamenco et stoner désertique américain. Deux surprises sont à noter, « Bigger Piece Of You » sauce RED HOT CHILI PEPPER et l’hypnotique « Come To Me » qui s’étend sur plus de neuf minutes. Ce titre aura pour but de scotcher quiconque au canapé les fins de soirées trop arrosées. KYUSS n’est pas loin !!

Avec ce disque, McFadden réussi à multiplier encore ses influences, conservant sa patte naturelle de compositeur pour un résultat homogène. Un tel artiste venant faire une incartade dans le stoner mérite qu’on salue la qualité de son travail. La prochaine livraison de notre homme ne paraîtra vraisemblablement pas dans ces pages mais tenez le à l’œil, jamais ses productions n’ont et ne seront bâclées.

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