Crossover is back ! Suivant la règle immuable qui veut que tout mouvement musical se voit ressuscité par le moteur de la nostalgie vingt ans après avoir vécu ses meilleurs moments de gloire, cet hybride entre metal et hardcore doré au soleil et qu'on avait tous oublié retrouve depuis peu quelques couleurs. Entre les p'tits jeunes de MUNICIPAL WASTE qui ont su faire parler d'eux en reprenant les meilleurs éléments du genre et les vieux gros de SUICIDAL TENDENCIES dont les rumeurs les plus folles évoquent un nouvel accouchement avant la fin de l'année, le buzz est lancé et bien lancé. Quel meilleur moment pour déterrer quelques vieilles icônes dont seuls les plus pointus connaissent l'existence ?

- Youpi ouais, D.R.I. sur Nightfall !!!
- Euh… Non.
- M.O.D. alors ? Putain mortel !!!
- Non plus, non. Enfin, peut-être mais pas tout de suite. Aujourd'hui, on va parler des CRUMBSUCKERS.
- Des quoi ?
- Des CRUMBSUCKERS. Bon c'est vrai, c'est un peu moins légendaire que D.R.I. ou M.O.D. (qui tient sa gloire de son grand frère S.O.D.) mais j'te jure, c'est totalement culte.
- Ah. Et ils font du skate ?
- Je crois pas, non.
- C'est naze.

C'est vrai que c'est naze de ne pas skater. En plus, c'est bon pour choper de la meuf quand on a quinze ans. Très bon même. Enfin, passons.

En plus, on a du mal à les distinguer, les CRUMBSUCKERS. D.R.I. a sorti l'album "Crossover", ça pose son homme. M.O.D., c'est la suite des aventures de S.O.D., c'est le gros Billy Milano qui s'est retrouvé des potes pour remplacer ses compères de NUCLEAR ASSAULT et ANTHRAX. SUICIDAL TENDENCIES… Bah SUICIDAL TENDENCIES quoi. Mais alors les CRUMBSUCKERS, on les connaît encore moins que les CRO-MAGS, c'est dire si tout le monde s'en fout.

Pourtant, je persiste et je signe, les CRUMBSUCKERS, c'est culte. Entre des débuts totalement imbibés du son hardcore new-yorkais et un appendice actuel baptisé PRO-PAIN (voilà, certains retombent sur leurs pieds), il existe deux albums qui ont fait date et sont venus grossir les rangs d'une armée bien peu inquiétante par le nombre.

Au sein du régiment, les CRUMBSUCKERS, c'est un peu le gros costaud. C'est d'ailleurs ce qui les rendra moins populaires que ses collègues de caserne. "Life Of Dreams" ne rigole pas du tout. Non, le crossover n'est pas que marade, esprit party bonbecs premières bières et magazines pornos, il y a autre chose que de la BEASTIE BOYS atttitude dans ce dérivé très urbain du thrash et du hardcore. Oui, les CRUMBSUCKERS se veulent durs, Chris Notaro aboie dans les graves tandis que les instrumentistes pratiquent un hardcore dont on aura accentué la distorsion des guitares, qui osera de temps en temps un riff bien aiguisé et un solo finement tricoté. Un hardcore qui risque de laisser froid des auditeurs trop attachés à une esthétique chromée. Alors oui, "Life Of Dreams" sonnera brouillon, faiblard par endroits, mélodiquement primaire, pas très futé.

A vrai dire, ce premier album souffre d'un autre handicap, une sacrée concurrence. Ajoutez à tous les groupes que j'ai cités dans cette chronique les géniaux BAD BRAINS qui auront sorti en cette même année 1986 l'époustouflant "I Against I" et "Life Of Dreams" perdra encore quelques couleurs.

Et pourtant, si si, croix de bois, croix de fer, ce disque est bel et bien culte.