Oui bon ça va je me doute que personne n’en a rien à cirer de ma chronique d’un groupe Russe de Funeral Doom atmosphérique (un peu comme les chroniques de Possopo du genre FRILILFFFFNVARGH GFPEPOLITURFFF ou autre obscure formation française ou Ukrainienne).
Pourtant, si quelque Doomster égaré passe par ces contrées, peut-être sera-t-il heureux de voir représenté un poulain de l’écurie Russe Solitude Productions, devenue référentielle en peu de temps pour les amateurs de Doom à vocation Death et/ou atmosphérique et/ou funéraire, voire Sludge et Epic.
D’ailleurs, chose promise, chose due. Même si il a fallu le temps, voici enfin la chronique du premier album de COMATOSE VIGIL. D’abord sorti sous la forme d’une démo au son archi-pourri en 2004, « Not A Gleam Of Hope » s’est vu totalement remasterisé en 2006 et a pu connaître une seconde jeunesse sur le label Marche Funèbre. Il précède l’EP sorti l’an dernier, « Narcosis », chroniqué par votre serviteur sur votre webzine favori il y a une dizaine de mois : il s’agit d’un album complet, parfaitement cohérent et tenu, qui n’a pas les carences d’un EP vacillant et renfermé.
D’une beauté brumeuse et grise, la composition de COMATOSE VIGIL clame l’héritage d’un Funeral Doom Ambient mortuaire et chargé, puise ses formats et structures dans les marches agonisantes de SKEPTICISM et THERGOTHON, et se retrouve dans l’école contemporaine plus mélodique et satinée de LONGING FOR DAWN et INIQUITOUS. L’alliance de la tradition étouffante et de la puissance mélodique linéaire est une réussite totale puisque l’album emporte l’auditeur dans un voyage au-delà de la mort, dans des contrées oniriques mystérieuses et terrifiantes, parfaitement insondables. De l’atmosphère générale ressort par ailleurs un je-ne-sais-quoi d’urbain, comme les profondeurs d’un entrepôt abandonné (subjectivité, barre-toi de là).
Les amateurs ne pourront que reconnaître à COMATOSE VIGIL la capacité à dérouler des mélodies fascinantes, belles et horrifiques (« Suicide Grotesque ») et à conférer aux nappes synthétiques du clavier une prestance translucide et fantomatique proprement déroutante et envoûtante. Finalement, les durées colossales des titres (une moyenne de 16 minutes tout de même !) s’avèrent pour une fois complètement justifiées puisque les harmonies langoureuses ont l’art de se développer et d’immerger, aérées çà-et-là par des variations très bien menées. L’apogée qu’est « Mirrors Of Despair » laisse entendre des leads guitars linéaires sublimes qui ne sont pas sans évoquer, en encore plus lent, le sens de composition des titres les plus déprimants de MY DYING BRIDE (« She Is The Dark » et « For You », vous situez sans doute les complaintes chantantes et tragiques des guitares soli). Les grosses guitares grésillent, caractéristiques du Funeral, et soutiennent en un continu comateux les chœurs synthétiques très bien traités et les growls graveleux, lancinants et incompréhensibles.

« Not A Gleam Of Hope » est une franche réussite, et 90% des metalleux n’en auront de toute façon rien à foutre, ce qui est bien dommage. Pourtant, certains d’entre eux ont pu verser une larme à l’écoute de SHAPE OF DESPAIR et DRACONIAN : s’ils veulent pousser l’expérience encore plus loin, goûter à quelque chose de bien plus extrême, s’enfoncer dans une masse de brume jouissive qui surpasse les sentiments, alors ils pourraient se procurer cet album. Allez, soyons fous et osons clamer l’évidence : je trouve que cet album est un chef d’œuvre de Funeral Doom, personne ne l’attendait, le style en général se répète et atteint vite ses limites, c’est vrai, mais là, tout fonctionne parfaitement. La conviction est bien là, sous un amas synthétique, mélodique et métallique fascinant, et COMATOSE VIGIL peut s’écouter comme un album d’ambient/indus de chez CMI. Tout est dans l’immersion. Point d’onanisme six-cordiste, forcément, et tant mieux. L’intérêt est ailleurs.
On touche ici des sommets. L’ouvrage est indispensable pour les amateurs de Funeral Doom moderne. Il est comateux, linéaire, paradoxalement majestueux (« Galleries Of Coma »), flippant, formidable.
Il faut l’écouter, c’est obligé, bordel.