Des nuages sombres. Devant nous un immense portique. Et de part et d’autres de ce portique, deux murs gigantesques que la flore envahissante à presque recouverte. De longues lamentations, d’innombrables voix nous entourent et nous guident en direction de l’immense porte…elle s’ouvre à notre arrivée. Et le ciel se découvre, il ne nous parvient alors quelques gouttes d’eau venant de nulle part, quelques sons de harpes que vient bientôt accompagner une voix de fée qui alors nous ensorcelle. Nous marchons de manière lente, et débutons une promenade aussi magique que mélancolique (« Santa Compana »)… Puis les voix se font plus envoûtantes (voir inquiétantes) et volatiles, ce violon larmoyant, ce piano bouleversant, ces claviers ambiants et cette flûte hypnotisante, tous nous plongent dans le plus merveilleux des rêves éveillés (« Portrait of Inocence »)…

Je pourrais développer à l’infini tant il cet album m’inspire d’images, tant chaque pièce est particulière… il va de soi cependant que ça pourrait être plutôt chiant, pour vous autres lecteurs. Alors je commencerais par confronter les deux albums d’ORDO FUNEBRIS (les deux seuls d’ailleurs comme après celui ci, le groupe a splitté).

Autant dire tout de suite que là où « Cantar A La Morte » (qui était à la base une démo, réédité en 2003) était déjà bon et intéressant, « Songs From The Enchanted Garden » est lui, largement plus novateur, et tout bonnement excellent !
Où est la différence ? La qualité, la maturité, bien sûr, mais surtout, la finesse et surtout l’originalité, qui s’est clairement accrue. Les atmosphères créées sont plus denses et recherchées, les arrangements nettement plus perfectionnistes, les mélodies demeurent toujours aussi touchantes et personnelles et sont également multipliées… les chants prennent également toute leur ampleur, éthérés, merveilleux, sensuels, et les mélodies vocales sont vraiment plus émouvantes que dans le premier essai des espagnols, et d’ailleurs on notera quelques morceaux A Capella très intéressant dont une reprise du grand classique « Santa Maria » (version très « religieuse » d’ailleurs. A titre de comparaison, écoutez la version de IN EXTREMO, qui déménage !)

La qualité des compositions de l’album n’a d’égal que sa capacité à nous submerger de visions extraordinaires, et à nous émouvoir du début jusqu’à la fin. Séparer sans cesse les éléments d’une musique est loin d’être la meilleure manière d’en parler, et c’est lorsque tout s’anime, lorsque tout prend vit qu’on se rend compte à quel point ORDO FUNEBRIS est exceptionnel.
Les flûtes, les violons, les claviers, les chœurs, les quelques percussions, la voix elfique de Sathorys…tous semblent posséder leur part de magie, tous créent une harmonie (presque) parfaite, saisissant l’auditeur, et le guidant à travers un jardin enchanté, irréaliste et féerique qu’il façonnera par son imaginaire…

Avec « Songs From The Enchanted Garden », ORDO FUNEBRIS nous fait une belle définition de ce que peut être une « musique imagée », ici semblables aux contes merveilleux et aux légendes médiévales, tirant très clairement son épingle du jeu dans un genre qui se cherche (je compte pas mal de bouses kitsch et chiantes), et bien plus même, cet opus est l’un des meilleurs albums de musique (néo)médiévale et folklorique.

A défaut d’un 5/5 (que je ne réserve qu’aux albums vraiment parfaits), je mets tout de même un bon 4/5…tant que mon message est passé : ).