Dans la rigueur des Balkans se cache une scène Black Metal qui pourrait avoir intériorisée en son for intérieur toutes les agitations d’un passé peuplé de meurtrissures - comme tout à chacun le sait – de ressentiments et de haine indépassables. Les Serbes n’ont décidément pas une scène profuse mais elle n’est jamais foncièrement identitaire et RAC comme nombre de nos représentations pourraient le laisser suggérer et imaginer. CMPT concentre dans son line-up le fer de lance de cette scène actuelle. Mon mauvais esprit à l’égard des chercheurs de poux pourrait tenir en cette dernière phrase de mon paragraphe : non CMPT n’est pas facho mais est fier de son pays et de sa culture singulière…

Il n’y a bien qu’en France qu’être fier du drapeau et de son histoire est bon gré mal gré relégué in extenso au ban d’une tare ou d’un jugement hâtif sur le concept du patriotisme raciste… Quelle idiotie et quelle blessure incicatrisable. Il y aurait tant à dire, mais l’hystérie actuelle est bien trop prononcée pour mériter un quelconque travail de discussion là-dessus. CMPT nous partage aussi cela des terres désolées de Serbie avec son Black Metal frontal et belliqueux mais régulièrement traversé par un souffle folklorique. Cependant ne vous attendez pas à un Black Metal bourrée d’instruments traditionnels et de chants clairs appelant à la révolte, il n’en est rien.

Non, vous aurez le droit davantage à un Black très mid-tempo plutôt mélancolique et tourmenté avec une bonne dose atmosphérique. Et cette formule fonctionne parfaitement dès le premier titre - qui termine notamment sa course de plus de neuf minutes de façon vaporeuse – avec ses nappes de claviers soutenant une voix arrachée et emplie de désespoir et/ou de rage contenue abreuvée aux larmes. Sur ce titre d’ouverture et éponyme CMPT nous ravit. Non pas que son Black Metal fait preuve d’une grande singularité mais les ambiances réussissent à nous dompter. Certains titres ne développeront pas la même propension émotionnelle mais il serait injuste de dire que l’album est en dents de scie. Écoutez la majestuosité perceptible dès les premières secondes de "Kao Srp U Noći" avec cette flûte, fut-elle serbe, (est-ce une frula ? Je le cherche encore.) qui augure bien de ce qui va suivre. Le chant féminin nous enlace tout autant qu’il nous berce, et même les vocaux criards de Vidak Lešina n’arrivent pas à nous sortir de notre rêverie tout du long des plus huit minutes de ce titre.

CMPT sur ce deuxième album aime à varier son Black Metal. Nous pouvons retrouver quelques éléments un poil Post dans les leads de "Crna Voda" et de "Mesečina" mais cela reste bien du Black Metal je rassure les allergiques. L’utilisation parcimonieuse des claviers est parfaitement dosée et ajoute un côté spectral très intéressant notamment sur "Mesečina". Avec donc un côté très tradi, des éléments folkloriques (très bel titre instrumental "Campus de Maxon" soit dit en passant), des motifs mélancoliques et quelques passages bien crudes, CMPT creuse un peu plus encore son sillon singulier. Avec une production plus équilibrée et transparente que ne l’était celle du premier album "Krv I Pepeo", "Na Utrini" a calmé son côté vitupérant au profit d’ambiances plus atmosphériques. Signé chez Osmose Productions, Vidak Lešina a tout loisir de développer ses créations sous les pâles cieux de la Serbie, et les biens plus sombres du Black Metal.