Il y a bien 1914, GHERZEN, KANONENFIEBER, PANZERFAUST (qui sort d’ici peu un album) ou les frappadingues de ENDSTILLE pour s’animer de l’aura des guerres et d’en célébrer tous les sorts sordides et les ravages. Avec une approche testimoniale, MINENWERFER fait bien son office pour veiller à apporter un peu de chaleur et de lumière sur le charnier des tranchées, la boue ensanglantée, et la vermine qui grouille autant que les rats sur les corps et les âmes des valeureux et qui ont fait l’histoire et le terreau parfois malheureux des générations suivantes. Subjugué par la pochette en premier lieu – dont je ne suis pas loin de penser qu’elle serait l’une de celles qui m’aura le plus marqué dans mon existence d’adorateur de Metal extrême - j’ai eu si hâte de plonger dans cet univers grouillant la Mort à sa sortie qu’il me faut dorénavant vous en parler.

Conjurons la mitraille, les destins fauchés, la terreur de ces deux grandes guerres et les milliards de tonnes de dégâts physiques, environnementaux, sociaux et psychologiques qu’elles ont eu la primeur d’entraîner sur les terres, les soldats et les populations en nous recueillant aussi et n’oubliant jamais d’honorer la mémoire des défunts et du courage. Je suis de ceux qui aiment à honorer ce passé et ces pertes non par ferveur indélicate mais bien par considération profonde. Et MINENWERFER s’y emploie tout autant mais avec la passion des notes - transfuges d’un camp à l’autre - et de la plus belliqueuse des manières. Comptez une heure d’épouvante angoisse, de ressenti sombre, mélancolique, solennel et agressif (cela va de soi). MINENWERFER entame la danse avec un titre incroyable, "Der Blutharsch", qui est un honneur, une pièce d’orfèvrerie et d’artillerie incroyable de plus de dix-sept minutes. Ne vous méprenez pas, vous ne percevrez aucune longueur dans ce titre très finement construit où les mélodies constellent pour former un panorama d’écoute saisissant de bout en bout.

Le reste de l’album sonnera davantage à brûle-pourpoint avec une agressivité bien plus féroce et aboyante. Les vocaux vociférateurs de Generalfeldmarschall Kriegshammer restant d’une animosité à toute épreuve, vous aurez avec MINENWERFER toujours de quoi épancher votre soif de violence. Mais, au milieu des titres les plus crudes de l’album, des solos garniront de beauté et d’émotions la brutalité de ce Black Metal. "Cloaked In Silence" en est le parfait exemple. Rage et désespoir s’entremêlent, communiquent et nous font vivre de manière immersive l’ambiance détestable de ces périodes d’épouvante. "Kaiserjägerlied" sonne comme un chantre de combat. L’air hennissant dans le poitrail apeuré des combattants, les doigts se crispant sur les gâchettes, et les pensées intimes permettant de tenir sous l’œil bienveillant des frères d’armes… Misérable guerre et miséricorde, traumatisme facile et victoire factice… Voilà quelques mots qui me viennent à l’esprit à l’écoute de ce titre tout aussi excellent que les précédents.

MINENWERFER signe avec le troisième album de sa discographie un petit monument de Black Metal qu’il est si rare d’entendre à un tel degré d’excellence. Parfaitement équilibré entre rage et beauté, et racé au possible, "Alpenpässe" dégage tout sur son passage avec perte et fracas. Plus émouvant et rageux encore que les 1914, KANONENFIEBER et consorts, le duo californien obtient sa médaille d’honneur et peut se l’accrocher au cœur. Inviolable !

Note réelle : 4,5/5.