Douze ans après la dernière fulgurance que reste "Onyx", NOCTERNITY revient à ses propres fondamentaux en dépouillant encore davantage son jeu sonore. Aujourd’hui nous pourrions qualifier ce Black Metal de « Low-Fi » sans faire affront à nos fiers Grecs. K.D a repris le flambeau pour dominer son monde en l’embarquant sur une barque démoniaque. En s’engouffrant dans la torpeur du monde et en se dépouillant de tous les artifices, laissant ainsi son cœur à nu, NOCTERNITY s’enfonce dans sa propre nuit.

L’ombre des JUDAS ISCARIOT, des premiers DARKTHRONE ou BURZUM scintillent dans cette nuit qui fait tourner les têtes. Les tempos lancinants s’agrippent aux âmes en plantant leurs griffes dans les cœurs pour les faire saigner. Les os craquent, les articulations pleurent tant la constriction et l’oppression se font sentir. NOCTERNITY nous captive et nous fait captif de cette invariabilité des rythmes qui insidieusement s’empare de nous. Nous sommes un peu loin des anciens albums avec leurs envolées lyriques et parfois atmosphériques. "Harps Of The Ancient Temples" est poisseux, c’est un disque qui s’accroche, qui parasite, qui infeste… Et qui ne lâche rien car dominateur.

Les riffs assaillent et leurs grésils contaminent l’air et je dois dire qu’à titre personnel je suis très friand de ce son. Certes cela fait très 90s mais en même temps ce retour aux sources dans sa variante très Ambient n’est vraiment pas pour me déplaire. Forcément il me rappelle cette époque un poil chérie. Prenons par exemple le superbe titre éponyme, ne vous fait-il pas penser (beaucoup) au titre de MARDUK "Dracul Va Domni Din Nou In Transilvania" présent notamment sur le fameux "Live In Germania" (1997) ? Et l’on pourrait extrapoler tout cela, car les Carpathes où le suintement humide des cachots de châteaux perdus transpirent par tous les pores de cet album. Le chant tantôt incantatoire, tantôt murmuré ou sombrement hurlé ajoute aux perspectives funestes des ambiances, les ingrédients des pires scénarios. Écoutez le titre d’ouverture "The Black Gates" et laissez-vous aller à votre propre condamnation. Titre excellentissime qui donne le La de ce qui va suivre. "River Of Woe" nous fait capituler tant il saccage notre pensée, et W. (ex- LUNAR AURORA) le chanteur désespérant obnubile nos pensées en exhortant nos âmes.

"B.O.D.D" et son riffing entêtant et dépravé – à l’instar du titre éponyme – ne fait qu’une bouchée de nos espoirs. Tout est noir et sans issue dans cet album résolument mortel. Certains titres sont néanmoins un peu moins inspirés (je pense notamment à "Titans" ou bien encore à "Opaline Eye Of Death"), mais l’ambiance générale de "Harps Of The Ancient Temples" est ahurissante. Elle me fait penser à celle de certains albums de WYRD, au Black Metal US de XASTHUR, LEVIATHAN, I SHALT BECOME, et à d’autres de ces horreurs dont par exemple l’album très intéressant de 1998 de ANTESTOR : "The Return Of The Black Death"… Le projet n’est pas mort même s’il sommeille depuis longtemps. Une démo vient de paraître et pourrait éventuellement relancer les hostilités, même si elle n’est que la version instrumentale de cet album… En attendant des jours meilleurs pour les Grecs, prenez grand soin de vous en écoutant ce funeste album… Pour moi le meilleur de NOCTERNITY.