Qui aurait cru qu'après toutes ces années à écouter mes classiques du Black Sympho, sans nécessairement en chercher de futurs, PROFANE BURIAL croiserait mon chemin pour enflammer ma chandelle à la cire quasi périmée ?

Aux commandes de ce monstre difficile à cerner : trois zicos norvégiens d'expérience, dont certaines élucubrations ont fait résonner mes oreilles dans la dernière décennie. Citons ABYSSIC, formation de Doom/Death barré dont fait partie André Aaslie, qui avait séduit Wën et moi en 2016. PROFANE BURIAL possède aussi un marteleur de choix en Bjørn Dugstad Rønnow, de l'incontournable BORKNAGAR. Le chantre du trio est Kjetil Ytterhus, qui, à 49 piges, doit faire l'envie de centaines de jeunes goules qui aimeraient bien symboliser le mal (si pas le mâle) vocal de cette pestilente façon. Magnifique performance qui n'est pas sans rappeler celle du Suédois Blakkheim sur le cultissime DIABOLICAL MASQUERADE.

La musique de PROFANE BURIAL pourra titiller les fans du one-man project de génie, comme les « incondicionados » de CARACH ANGREN, évidemment. L'univers horrifique des Néerlandais est d'ailleurs sans nul doute une influence centrale pour ce récent théâtre des maléfices, aux effluves baroques, oniriques, impures, énigmatiques et filmographiques. Le groupe se vante surtout de représenter un sous-genre de Black Sympho : le Black cinématique. Je suis amplement d'accord.

"My Plateau", c'est un deuxième album teinté d'une sagesse prématurée, étiré simplement sur six titres et 35 minutes, mais dont le potentiel de revenez-y est inouï. Comme un film qu'on se repasse sans fin. Je vous ai souvent rabâché les oreilles avec cette caractéristique, que je considère clé dans la brève liste des aptitudes d'un album complet. La dernière fois que j'ai ressenti ce maelstrom émanant d'un court disque du genre, c'était avec "Effigy Of Nightmares" des Américains de VALDRIN. Lecteur, tu DOIS écouter ça, après PROFANE BURIAL. Si tu es nostalgique et que la modernité ne te surprend guère, fonce tronche baissée et poignard affûté, une place t'attend près du popcorn.

PROFANE BURIAL se classe aisément dans un arrangement sélect, et rare, de créatures de génie. Celles qui fusionnent les affres symphoniques d'un barde à l'imagination fantomatique, tel CARACH ANGREN, et une langue de serpent accro aux formules occultes et aux contes barbares, comme un bon vieux OBTAINED ENSLAVEMENT ou un BISHOP OF HEXEN sur "The Nightmarish Compositions". "My Plateau" est son outil de séduction, de propagande, dont les étoiles sont inévitables : les fresques frissonnantes, les orchestrations grandiloquentes et simples à la fois du duo de compositeurs et la guitare nerveuse à trémolos d'André Aaslie, qui s'accouple avec les ambiances obscures et poignantes éclaboussant le skeud. Du CARACH qui crache et arrache, donc, en rameutant quelques romantiques sorciers au passage. Partez la machine à boucane…

La peinture des Norvégiens est une hémoglobine bourgogne foncé aux reflets argentés d'une caste suprême, je dirais même IMPÉRIALE. Le squelette est laqué et flamboyant, impose le respect en peu de temps, captive et fouette les plus endurcis jusqu'à la moelle. La décharge est forte et véloce, peu importe que vous écoutiez en chrono ou non. Car chaque brique de ce mur de son est indépendante, apporte sa pierre à l'édifice qu'est "My Plateau". Un édifice ? Que diable, une tour infernale chatouillant les semelles des archanges. Ouais, une tour de 35 minutes, ça se peut.

Le seul hic que j'hoquèterai émane justement de ce monument divisé en six. Ce Black Sympho est si riche et bigarré qu'il est ardu de tisser des liens entre les étages de la tour, ce qui pourra déplaire aux puristes de concepts clairs. Je chipote, bien sûr, mais je préfère vous placarder ce chétif avertissement afin que vous sachiez tout. Enfin, tout… Il vous faudra plonger dans cette mare pour y nager vous-même, ça vaut la peine de se salir pour ressortir propre.

PROFANE BURIAL est une boutique de curiosités qu'il vous faut visiter les poches bien pleines, les oreilles vides et les neurones ouverts.

Podium : (or) "Fragments Of Dirge", (argent) "Horror Code ", (bronze) "Moribund".

Indice de violence : 2,5/5.