Comme à son habitude la scène finlandaise laisse entrevoir chaque nuit de pleine lune, tapis pourtant dans la plus belle des obscurités, des joyaux illustres. C’est dans la nuit indifférenciée que naît la lumière, et, jaillissant telle une ombre fortuite, CHYMIST s’émancipe des senteurs nocturnes pour nous asséner un disque obscur et mystérieux. Mystérieux très certainement à l’image de cette illustration ornant sa pochette et tirée du grimoire « Rosarium Philosophorum ». Dans la symbolique alchimique le lion (vert) représente le mercure philosophique. En dévorant le soleil ou plutôt son éclat, le lion assimile les métaux imparfaits et les transforme en or. Par ailleurs le nom du groupe même fait référence aux philosophes dits « chymiques » (Hermès Trismégiste, et surtout Nicolas Flamel) qui ont écrit sur la pierre philosophale au XXVIIème siècle.

CHYMIST est d’autant plus mystérieux qu’il concentre de manière anonymisée des acteurs sans doute phares de la scène. "Opus I: Nox" est un EP de plus de 27 minutes concentrant un Black Metal Mélodique et furieux prêt à en découdre avec le vivant. Archi-prometteur au demeurant, CHYMIST ne renverse cependant pas la formule mais montre une efficacité diabolique. La production bien équilibrée de l’album sert le déploiement du riffing et des leads à merveille. Les mélodies nordiques dans l’âme sont volontiers parfois thrashy et cultivent une variété prolifique d’ambiance. La force de CHYMIST réside notamment dans son jeu varié et ses changements de rythme, jamais trop blastés mais cadencés et subtilement placés au plus près de l’énergie centrale et omniprésente de l’album. Les émotions alors se déploient et habilement nous entraînent sur des chemins hagards bardés de paysages sauvages, hostiles ou ressourçants. Ce contraste entre agressivité notoire et mélancolie palpable fait mouche et permet de conserver une qualité d’écoute appréciable tout du long de l’EP. Le chant hurlé et furieux de Crvor impressionne constamment et dope l’agressivité de l’album. Ses déchirements intenses vous feront frémir de bonheur.

Si "II. Protasis - Vengeance" développe un côté épique et paraît nous conter une épopée, son final merveilleux avec ce solo ravageur nous cloue sur place savamment. Et que dire de "IV. Catastasis – Mouth Of Uncreation" – sans doute mon titre préféré – idéal mélange d’un Death et d’un Black Mélodique bien sûr. Parfaitement articulé, ses différentes sections s’enchaînent avec aisance. Il y a beaucoup de technique et l’on perçoit que derrière l’anonymat du groupe se cache de vieux briscards aux expériences longues comme le bras. Rien ne semble fortuit dans cet album ultra-travaillé et propre, et finalement c’est bien l’ensemble de "Opus I: Nox" qui vaut le détour. Sa haute teneur mélodique en hypnotisera certains, en cajolera d’autres mais tous en auront assurément pour leur compte.

CHYMIST s’attelle déjà à composer le "Opus II", et qui sera je le pressens, coriace et survitaminé. Nos Finlandais en ont tellement sous la pédale que la suite attise déjà ma convoitise. En digne serviteur de la scène finlandaise CHYMIST confirme une nouvelle fois le haut niveau de la Finlande en matière de Metal extrême. Et ce n’est sans doute pas une découverte pour certains mais je voue un amour immodéré pour cette scène que je considère comme ma favorite. WITCHFLAME que je vous ai chroniqué il y a peu et aujourd’hui ce CHYMIST ne font qu’accentuer et abonder cette passion. Un EP superbe !