SHINING n’est plus n’est-ce pas ? Vive DEADSPACE ! La voie est libre, et le chemin déjà bien nivelé. Sur les contreforts d’une falaise abrupte et lacérante, dix titres envoûtants vous feront glisser vers son précipice. Laissez-vous emmener avec "Beg For Death In Absurdum", ne retenez plus cette corde de vie qui semble vous retenir à une vaine raison d’existence. Laissez-vous happer dans les entrailles du monde, gourmandes et maternantes ! Acceptez d’être malicieusement surpris de votre propre horreur d’être.

DEADSPACE déborde jusqu’à la lie de riffs assassins et tranchants, comme une double lame. Si vous écoutez les deux parties du titre éponyme vous concourrez je l’espère à mon propos. Nos Australiens ont parfait un opus de haute volée en lui instillant un biotope mortifère peuplé de créatures difformes aux regards déchiquetés, aux râles horrifiés et respirant l’air des ténèbres. DEADSPACE n’aura jamais mieux porté son nom, les vocalises déchirés de Chris Gebauer – dont je vous avais déjà parlé sur la chronique récente de leur dernier EP "Within Haunted Chambers" – sont absolument délicieux de tourments et d’invectives féroces. La tessiture de sa voix majore cette ambiance démoniaque et insupportable. Ce "A Portait Of Sacrificial Scars" n’est décidément pas un album recommandable pour galvaniser votre maison ou rationaliser votre raison.

Le DSBM a ses détracteurs mais qui n’auront rien à se délecter face à cet album de DEADSPACE. Survolté, agressif et vif, cet album ne tombe pas dans la facilité des rythmes et des ambiances hypnotiques déclinés à l’infini. Tim Yatras, chanteur polymorphe aux apparitions remarquées sur de multiples projets (SKYFOREST, GERM, AUSTERE) fait aussi une halte sur le titre "Nightfire" et sa voix emporte le titre vers quelques éléments Post pas dégueu que les claviers emportent dans quelques bourrasques dont ils ont le secret. D’ailleurs le clavier tout comme le piano font partie de la palette musicale de DEADSPACE et servent à embellir cet enfer ou à le magnifier. "Flesh Wounds Deeper Than I Once Thought" est le parfait exemple évocateur d’une sinistrose annoncée. Les claviers qui concluent le titre rendent cet aspect lumineux, un peu à la manière des premiers albums de M83 (hé oui on brasse les genres chez NIME !), à un titre dépressif à souhait. Et d’ailleurs cet album se découpe en deux parties, ou du moins tend à l’être. La première est foncièrement DSBM et violente, tandis que la seconde démarrant à partir de "Nightfire" comporte davantage d’éléments Post et atmosphériques.

Ce qui saute aux yeux comme autant de vapeurs toxiques c’est les riffs des guitares et les leads très bien construits et exaltants. Ils créent cet habitat musical très intéressant et plaisant. Leurs qualités sont indéniables et riches musicalement. C’est un bel atout qui agrémente intelligemment un DSBM bien prononcé. DEADSPACE réalise le plus bel album de sa discographie. Tourmenté et enivrant, il ne lasse pas. Pour tous les désabusés des tournures que prennent parfois cette scène en offrant pas l’once d’une originalité, tout comme les déçus du dernier SHINING notamment, je ne peux que vous conseiller d’écouter cet album majestueux.