Comme me le faisait remarquer l’ami Fredouille sur notre Minitel interne de chroniqueurs, la ligne éditoriale de NiME a récemment poussé le curseur extrême un cran plus loin, du fait de l’addition de nos fougueuses recrues, Remissa et Storm, mais pas seulement. Je dois bien vous avouer avoir moi aussi largement succombé au côté obscur du Metal, m’émerveillant à volonté sur les versants les plus sombres ou violents, en recherche permanente d’adrénaline, d’un viagra auditif, blasé par des sentiers que je n’ai que de par trop arpentés à une certaine époque. Cette piqure de rappel n’est donc ni plus ni moins qu’un prétexte pour revenir à mes premiers amours, à savoir une musique qui fait taper du pied et qui donne envie de beugler des refrains fédérateurs à pleins poumons.

Retour donc aux sources avec ce second/premier album de GIRISH AND THE CHRONICLES (GATC), qui fait suite au "Back On Earth", réédité et réenregistré en 2023, mais qui datait en fait de 2014, sous une forme aujourd’hui introuvable. Je dois vous avouer avoir pris une belle petite claque sur la fesse gauche avec cet essai séminal, brillant exercice de Hard-Rock/Heavy à l’ancienne, hautement addictif, made in India. Il est plus que temps de s’attaquer à son successeur/prédécesseur (vous me suivez toujours ?), le bien nommé "Rock The Highway". À l’écoute de la galette, on a bien évidemment qu’une idée en tête : sauter dans sa caisse et tracer, à blinde, plein sud. A l’époque, point de radar automatique Sarkozy pour venir tempérer les (h)ardeurs.

Pour les néophytes de Girish Pradhan et sa clique, vous ne serez cependant pas outre mesure surpris par le registre dans lequel le combo évolue, pour peu que vous ayez poncé le Hard-Rock de la fin des années 80 / début des 90’s un tant soit peu. Si vous appréciez toujours ce type de musique, il y a de fortes chances que vous vous montriez plus qu’enthousiastes à l’écoute de cet essai sophomore, qui puise aussi bien du côté Glam que d’AEROSMITH ou des GUNS N’ ROSES ("Trapped Inside A Mirror"), tout en faisant preuve d’une maîtrise technique imparable. Pour tout vous dire, certaines pistes rappellent également le grand Joe SATRIANI, avant que celui-ci ne s’oriente vers une forme de démonstration onaniste qui a fini de me perdre. Le tout est exécuté avec enthousiasme et respect sincère, forçant nécessairement l’admiration à l’heure où les glorieux anciens disparaissent peu à peu, la flamme vacillant après tant d’années, quand ce n’est pas la grande faucheuse qui est passée leur rendre visite. En terme d’intention Rock, on pourra effectuer un parallèle avec leurs contemporains d’AIRBOURNE : "It’s All For Rock N’ Roll". Voilà pour ce qui est du name dropping et de l’ambiance générale de l’opus.

Le disque contient indubitablement son lot de tubes, à commencer par l’opener éponyme, qui donne immédiatement un aperçu du potentiel de l’opus et des qualités des membres : la voix puissante de Girish, sa complémentarité à la guitare avec Suraz, qui assure les parties leads avec brio tout du long, une section rythmique en béton armé entre le frangin Yogesh à la basse et Nagen qui martèle ses fûts simplement mais tient un tempo au poil. Les chœurs un brin kitchouilles sont de sortie, mais ça fait partie du délire, et si cela ne vous convient pas, n’allez pas plus loin, car le skeud en est gavé. Idem pour les paroles, un brin caricaturales (il suffit de jeter un œil aux noms des chansons pour s’en assurer). Mais ma foi, n’y a-t-il pas un certain cahier des charges à respecter en la matière ?

Pour autant, GATC esquisse parfois quelques touches de modernité, comme ce break ou cette basse qui claque ("Every Night, Like Tonight"), tout en assumant pleinement ce côté rétro bien jouissif. Les soli constituent une véritable réussite, sortant pour le coup des sentiers battus de l’époque où reprendre à la gratte la mélodie du chorus était perçu comme novateur. Suraz sonne vraiment dans l’air du temps, alliant technique et feeling sur la plupart des tracks, surprenant positivement l’auditeur, tout en glissant une palanquée de licks dissimulés dans le mix. Ces éléments viennent clairement dépoussiérer une base qui aurait sonné trop classique pour être honnête. Non, GATC n’est pas STEEL PANTHER, loin de là.

En revanche, s’il y a bien quelque chose qui me chiffonne, chers lecteurs, sur cet album, ce sont les ballades. D’une part, le combo n’excelle pas dans l’exercice qu’il aborde avec une orthodoxie maladroite ("The Distance Between"). Loin de nous toucher ou de nous émouvoir, celles-ci ne suscitent globalement qu’une indifférence polie et l’impatience d’arriver au morceau suivant. Par ailleurs, il y en a trop… De façon générale, "Rock The Highway" est un chouia trop long (13 titres, plus d’une heure), et aurait gagné à une petite tonte de printemps au moment du pressage. Cela aurait également permis de réduire la quantité abusive de sucre avec les supposées slows ("Wounded", "Walking The Line"), comme on disait à mon époque, qui plus est peu inspirés. Rien de bien méchant en définitive, mais clairement pas le meilleur LP du gang de Bangalore.

"Rock The Highway" n’en reste pas moins un bon moment de Sleaze Rock à l’ancienne, remis au goût du jour tout en démontrant un amour véritable pour cette période dorée. Exécuté avec brio par des musiciens talentueux, c’est bien quand ils appuient sur le champignon qu’ils excellent le plus clairement ("She’s Heavy Metal", "The Rebel").