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PROTOPUNK  |  STUDIO

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1969 The Stooges
 

1969 The Stooges
1970 Fun House
1973 Raw Power
  My Girl Hates My Heroin
1976 Metallic K.o.
2007 The Weirdness
2009 More Power
2013 Ready To Die
2018 Gimme Danger
 

- Style : Mc5

The STOOGES - The Stooges (1969)
Par DARK BEAGLE le 6 Novembre 2023          Consultée 809 fois

1969. Des astronautes réalisent le rêve de JFK en marchant sur la Lune, justifiant les milliards dépensés par les USA et la Nasa dans la course à l’Espace que se livraient les USA et l’URSS, sur fond de Guerre Froide. Le conflit faisait toujours rage au Vietnam, les jeunes Américains étaient enrôlés de plus en plus massivement pour mourir dans un pays au climat inhospitalier pour eux, et qui marquera à vie les survivants et qui nourrira la culture populaire à travers de nombreuses œuvres comme "Voyage Jusqu’au Bout de l’Enfer", "Platoon", ou encore "la Guerre Éternelle", métaphore SF de l’absurdité de ce conflit. C’est également les dernières heures du Rock Psychédélique qui allait vivre son apogée dans l’orgie de Woodstock. Le renouveau de la musique se voulait plus dur, plus cinglant.

Bien entendu, vu la date, on pense tout de suite à LED ZEPPELIN, dans une moindre mesure à Jeff BECK (qui pourtant ne se contentait pas de cuire des nouilles), qui apportaient avec eux les prémices de l’Acier anglais. Aux USA, "Born To Be Wild" avait déjà sonné redistribué les cartes, STEPPENWOLF devenant un groupe symbole de rébellion grâce à "Easy Rider", mais c’est la scène de Detroit qui va être en ébullition. En début d’année, le MC5 va frapper un grand coup avec son "Kick Out The Jams", que Lester Bangs avait détesté. Elektra, qui avait senti le vent tourner, cherchait des groupes qui jouaient quelque chose de plus dur, de plus fort, de plus cinglant. Danny Fields, mandaté pour signer le groupe, ramènera également dans son escarcelle les STOOGES, qui assurait la première partie du MC5 ce soir-là.

L’histoire des STOOGES commence en 1967, autour d’Iggy Pop, moins connu sous le nom de James Osterberg, ancien batteur des IGUANAS (il en gardera le surnom d’Iguane et d’Iggy), des frères Asheton (Ron - guitare, et Scott - batterie) et d’un ami des Asheton, Dave Alexander à la basse. Le truc rigolo ? C’est Iggy Pop qui a appris à jouer certains plans à Scott. Le but avoué d’Iggy était de jouer une nouvelle forme de Blues, de sortir des stéréotypes du genre, de proposer quelque chose de neuf. Le groupe était localisé à Ann Harbor, du côté de Detroit, où le MC5 avait également élu résidence et entre les deux formations, l’entente était très cordiale. Là où l’on en trouvait une, l’autre n’était pas très loin.

Le nom a un peu évolué avec le temps. Les PSYCHEDELIC STOOGES ont fait place aux STOOGES, le nom étant inspiré des comiques du même nom, mais l’ambiance n’était pas tout à fait la même ! Le groupe s’est rapidement fait une excellente réputation de groupe de scène. Oh ! La musique était parfois un peu approximative, mais c’était relativement violent pour l’époque et surtout, il y avait Iggy qui se lâchait complètement sur scène, jouant du fait qu’il a une jambe plus courte que l’autre pour tenir des postures qui vont devenir légendaires. On lui doit apparemment la création du stage-diving et Manson n’a pas le monopole de l’auto-mutilation.

Bon, c’est bien gentil d’être signé, mais il s’agit de mettre les morceaux en boîte. Et là, le hic, c’est que le groupe n’a quasi rien à proposer, si ce n’est quatre chansons. Pour la maison de disque, impossible de publier ça en l’état et les STOOGES vont y aller à l’arrache pour pondre quatre autres titres à l’hôtel, la veille de rentrer en studio. Et le plus drôle, c’est que cela s’entend très bien quand on écoute l’album. Elektra a eu la bonne idée d’envoyer le groupe à New York où il sera pris en charge par John Cale, fraîchement débarqué du VELVET UNDERGROUND. Ce dernier va laisser libre court à leurs idées et il va même leur donner un coup de main en jouant quelques parties de piano ou de violon par-ci, par-là. Ce dernier semble avoir compris l’essence de ce que sont les STOOGES et s’il se plantera sur le mix de l’album (repêché par le groupe et Lewis Merestein, qui donnera ce son bien abrasif).

Beaucoup trouvent des similitudes entre les STOOGES et le VELVET UNDERGROUND en raison de la présence de Cale aux manettes. On y retrouve une noirceur commune, mais cela s’arrête à peu près là, la bande de Detroit se détache du côté intello-urbain des New-Yorkais. Il convient plutôt de trouver certaines influences des STOOGES au niveau des DOORS – cela apparaît comme évident sur "We Will Fall" – avec des accents plus durs, plus locaux à Detroit, dont la scène Rock fourmillait à cette époque. Ce premier essai n’est pas forcément une œuvre très violente dans sa forme, mais elle l’est dans le fond, dans les intentions. Le groupe possède quelques relents psychédéliques, mais ils ne sont pas proéminents. Il va en revanche déverser une musique inspirée du Rock(‘N’Roll) croulant sous la distorsion et les effets de pédale wah-wah.

La formation ne jouait pas forcément très bien à cette époque, mais elle dégageait quelque chose. De froid, de sournois, de dur. Il y a de l’envie derrière tout cela, malgré le ton souvent très désabusé d’Iggy Pop qui est le véritable maître d’œuvre ici bien que les morceaux sont tous signés par les quatre musiciens. Il y a quelque chose de très roots dans les partitions des STOOGES. De très primaire également. Il n’y a pas de place pour la fioriture, il faut que ce soit direct, sec comme un coup de trique et que l’on puisse apprécier l’urgence qui se dégage de certaines compositions qui donnaient clairement les grandes bases du Punk.

Évidemment, on pensera tout de suite à l’excellentissime "I Wanna Be Your Dog", qui synthétise parfaitement le style Garage des STOOGES et qui s’illustre de plusieurs façons. Il y a d’abord ce riff démoniaque qui ne vit que sur peu d’accords, qui devient reptilien au possible, perdu dans une distorsion tellement agressive. Ce piano insistant, très Rock’N’Roll dans l’âme, assuré par Cale qui n’apporte strictement rien d’un point de vue musical, sinon une présence inquiétante, prédatrice. Les paroles tellement explicites, mais amenées avec une telle désinvolture qu’elles en perdent le velouté, le satiné, pour plonger dans la baise pure et simple. Puis il y a cet embryon de solo quasi avorté dès sa conception. C’est radical, écrasant et tout bonnement génial.

Bien que prenant ses aises au niveau de la durée, "No Fun" fonctionne très bien aussi, avec toujours un riff très simple et un Iggy Pop qui amène son texte d’une façon si désabusée qu’il en devient irrésistible. Là aussi on retrouve un esprit Punk, loin de toute complaisance, qui se marie à la perfection avec "1969", qui revisite le psychédélisme avec un vague à l’âme tenace. Ce n’est pas un hasard si chacun de ses morceaux ouvre une face de l’album tant ils se répondent avec des schémas pourtant différents d’un point de vue purement musical. Mais l’esprit est là. Ce n’est pas un hasard si Iggy Pop a été épargné par la vague Punk, il est considéré comme le parrain de cette scène, il en aura posé les fondements sans trop le savoir avec les STOOGES, avec cette recherche de la radicalisation du son après ces années de Flower Power qui se perdaient dans une espèce de nonchalance de plus en plus bancale. Ils n’ont pas été les seuls, d’autres sont intervenus à divers endroits, sous diverses formes, mais tous n’auront pas été aussi fédérateurs qu’eux.

Mais surtout, sur ce premier disque, ils savent également prendre l’auditeur à contre-pied, à l’amener là où il s’y attend le moins. Aussi "We Will Fall" est clairement la piste la plus mystérieuse de cet opus, la plus ambitieuse également. Imaginez une litanie qui s’étend sur une dizaine de minutes, écrasante à souhait. Nous ne sommes pas loin de "The End" des DOORS qui est une référence pour le groupe, mais les STOOGES font le choix de ne pas bouger de leur ligne de conduite, de rester droits dans leurs bottes et d’asséner ce morceau tel quel, avec Cale et son violon à la fin du morceau pour quelque chose de solennel et inéluctable. On dirait une espèce de Doom Rock, assez jusqu’au-boutiste dans la démarche, mais parfaitement réussi.

Le reste du disque sent le travail vite fait bien fait. À l’exception de "Ann" qui tranche avec le reste pour son côté ballade soignée avec son final démentiel, les derniers morceaux de l’album manquent de souffle et jouent clairement sur les points forts des titres précédents sans forcément en capter toute l’énergie ou les subtilités. Cela manque un peu de jus par moments et face à la qualité des quatre premières prestations, ils font un peu pale figure malgré ce que l’on peut sauver çà et là. Et c’est pour ça que des trois premiers albums – pour les fans, les seuls qui valent vraiment le coup – il est le plus faible, même si cela reste relatif, vu les points forts que l’on peut déjà pointer ici et que l’on ne peut pas ignorer tant l’ensemble aura été fédérateur.

En effet, cela n’est pas anodin que SLAYER s’essaie à "I Wanna Be Your Dog" sur "Undisputed Attitude", l’album de covers Punk. L’esprit est là même si la forme ne l’est pas toujours. "The Stooges" est un disque, répétons-le, assénons-le, fédérateur. Il n’aura pas eu le succès espéré par la maison de disque à sa sortie (36 000 exemplaires vendus contre 100 000 escomptés), les critiques n’auront pas été forcément très bonnes non plus. Mais le fait est que même s’il aura fallu quelques années, ce disque est un détonateur, une source d’inspiration pour de nombreux groupes qui en ont porté fièrement les idées pour construire quelque chose d’encore plus cinglant. On appelle cela vulgairement du Protopunk, mais cela reste clairement la meilleure définition de ce qui a été fait ici (*).

(*) Et le balancer plutôt ce terme vous aurait épargné 800 mots de lecture. Ne me remerciez pas, c’est cadeau !

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- Iggy Pop (chant)
- Ron Asheton (guitare)
- Dave Alexander (basse)
- Scott Asheton (batterie)


1. 1969
2. I Wanna Be Your Dog
3. We Will Fall
4. No Fun
5. Real Cool Time
6. Ann
7. Not Right
8. Little Doll



             



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