Encore l'Allemagne. Cette putain de nation à l'Histoire nauséabonde a quand même du bon avec tous ses groupes de Metal Extrême au compteur, le Black en haut de panier. Le Black teuton est hétéroclite et se fond bien dans la masse, alors il est souvent difficile de le reconnaître parmi une forêt noire de pandas. Oui, ceci est un compliment.

Prenez "Pilgrim" de THRON, troisième album du quintette ; son style direct, ses guitares enflammées et ses mélodies unificatrices font penser à la Scandinavie, ou même la France, tiens. Et pourquoi pas l'Espagne avec cette chaleur coolos s'échappant de sa fournaise ? Non, ça devait être la Suède ou l'Allemagne, car ce mordant, cette simplicité dans l'approche de THRON, évoque celle des bonzes du Black Mélo comme NECROPHOBIC, DARK FORTRESS ou NAGLFAR époque "Pariah".

Il m'a aussi fait penser à SVART CROWN pour ses ambiances sèches et étouffantes, et à MARTRIDEN, pointure du Black Mélo underground aux compos massives et catchy. Une pièce complète telle que "The Reverence" aurait pu être créée par un de ces leaders et représente l'apex de ce que THRON offre sur "Pilgrim". Elle se classerait aisément dans un top 10 des meilleures baffes du genre du XXIème siècle tellement on prend des mandales plein la gueule du début à la fin. C'est cette carte de visite, coupant l'album en deux, que vous pourrez garder et ressortir à volonté pour vous rappeler qu'à quelque part, dans la forêt ébène allemande, se trouve un combo qui possède la hargne et le charme des grands sorciers Black mélodieux.

Cela ne veut toutefois pas dire qu'il soit louable à genoux. THRON est certes habile dans la jonglerie des blasphèmes, mais il est indubitablement capable de lever son jeu d'un cran supplémentaire. "Pilgrim", à part pour "Gaia" et le morceau d'enfer qu'est "The Reverence", demeure un disque assez convenu, aisément digérable et peu surprenant. La formule est classique, certes virevoltante, groovy ("Hosanna In The Highest", quoi !) et agréable, mais traditionnelle ("To Dusk", "Den Of Iniquity").

Mais… Et c'est bien là qu'il faut s'attarder, THRON a le chic pour nous garder intéressé et ravi. Dès que la rage contrôlée de "The Prophet" nous explose au visage, on se doute que les Allemands tenteront d'interpréter les louanges de Lucifer à chaque tournant. Leur aplomb et leur mélodicité malsaine nous font vivre des moments non pas somptueux ou mémorables, mais juste… compacts, énergiques et dignes de respect. Chaque plage de "Pilgrim" s'avère ainsi une redoutable armure contre l'ennui, tant et aussi bien que nos critères ne visent pas la perfection faite extrême. De toute manière, le Black Mélo sera toujours un vilain petit canard dans ce domaine, ses détracteurs le trouveront ad vitam consensuel et poseur. Amen.

THRON m'a conquis avec son pavage solide de sentiers coutumiers, sur lesquels il pose sa botte d'écuyer ambitieux au potentiel extraordinaire. Allez, galope, mon salaud !

Note : 3,5/5, arrondi au supérieur pour un album généreux et performant qui augure foutrement bien pour l'avenir.

Podium : (Or) "The Reverence", (Argent) "Hosanna In The Highest", (Bronze) "The Valley Of The Blind".

Quand l'écouter : les cadors du Black Mélo que vous aimiez ne vous font plus grimper aux rideaux…