Ça y est, fallait bien qu'un jour un groupe s'inspire de "Game Of Thrones" pour son patronyme. Et je suppose que la musique de ce premier album va contenir de l'Epic Metal consacré à l’œuvre de Martin, voyons cela... Hum la tracklist semble me donner tort, qu'est ce qu'ils racontent dans leurs interviews ces gars là : ils aiment les jeux de rôles et tout particulièrement Donjons et Dragons, et selon eux le nom de leur groupe n'a aucun lien avec "Game Of Thrones", ah bon, s'ils le disent.

Bref. THRONE OF IRON est né en 2018 suite à une beuverie (je soupire déjà, c'est d'un classique), les gars sont donc fans de jeux de rôles sur table et en musique ils kiffent MANILLA ROAD et ACCEPT. Ils ont aussi déjà une certaine expérience dans divers projets musicaux. De quoi pouvoir enregistrer très vite un split et toute une série de singles conçus à partir de jets de dés et de générateur de lyrics (si si). Après une démo prometteuse qui leur a permis de tâter le terrain dans le milieu des amateurs d'Epic Metal, THRONE OF IRON nous sort donc son premier album, sobrement intitulé "Adventure One".
Même si leur démo m'avait titillé, je n'attendais pas spécialement grand chose de ce groupe qui pour moi s'aventurait sur une scène plutôt étroite et déjà bien occupée par quelques groupes qui ont mis la barre très haute (vous les connaissez tous hein : les génies de VISIGOTH, ETERNAL CHAMPION, SUMERLANDS, pour rester en terre américaine comme THRONE OF IRON). Et finalement, cet album je l'ai écouté une fois, mouais, une seconde fois, c'est quand même pas mal, une troisième, rhaaa c'est cool... Vous avez compris, l'album c'est finalement imposé parmi mes écoutes régulières de ces dernières semaines.

Car, contrairement à certains de ses adversaires, on ne peut pas dire que la troupe de THRONE OF IRON soit composée de personnages disposant de statistiques élevées, les jets de dés n'ayant pas été spécialement des plus favorables. Donc non, Tucker Thomasson au chant ne dispose pas des cordes vocales nécessaires pour infliger des dégâts critiques et Corwin Deckard n'est pas le plus virtuose des joueurs de luth. Mais les mecs sont assurément de très bons maîtres du jeu : ils savent écrire des morceaux.
"Adventure One" constitue donc un excellent livre de quêtes évoluant dans le monde de Donjons et Dragons, ce qui les rend par ailleurs assez originaux. On pourra citer le groupe GYGAX qui est un peu dans le même délire conceptuel mais qui ne fait pas vraiment dans la même musique (d'ailleurs GYGAX c'est bien, écoutez-les).

L'influence d'ACCEPT n'est peut-être pas ce qui saute en premier lieu aux oreilles, loin de là même, car la musique de THRONE OF IRON est purement du Heavy épique : rythmique bien plombée, tantôt speed mais sachant souvent prendre son temps pour développer une marche rythmique implacable (rhaa "The Allure Of Silver", ou cet implacable "Dark Shrine Of Rituals"), chant qui déclame avec force et conviction des récits pour adeptes des dungeon crawlers, et parfois viennent nous hanter des vocalises démoniaques sorties des fins fonds d'une inquiétante crypte. Mais THRONE OF IRON y délivre aussi son lot de riffs incisifs, et c'est peut-être là que l'on pourra penser à la légende allemande, et notamment dans leur précision rythmique chirurgicale.

À l'instar d'un VISIGOTH, nos quatre gaillards essayent parfois d'écrire des morceaux qui se veulent catchy, percutants, c'est particulièrement évident avec "The Power Of The Will", qui ne s’embarrasse d'aucune circonvolution (même pas d'intro) pour nous mener à son refrain tubesque qui sert totalement cet hymne à la persévérance. Ou encore avec le très viril "Lichspire", dont le refrain, là encore très réussi, va faire pousser les poils à plus d'un guerrier de salon. Tandis que d'autres morceaux prennent beaucoup plus leur temps, avec des intros conséquentes avant que les choses sérieuses ne commencent réellement, le tout se faisant toujours avec une fluidité exemplaire. En fait, il y a une vraie montée en puissance dans cet album, chaque nouveau refrain s'impose, sans faire oublier le précédent mais en se montrant à chaque fois tout aussi mémorable et puissant. "Lichspire" vous a donné des envies de domination ? Pas d'inquiétudes, celui de "The Fourth Battle Of The Ash Plains" ne fera pas baisser la tension, aucunement. Et c'est comme ça tout du long. Avec un climax bien senti sur "The Allure Of Silver" et sa rythmique absolument délicieuse.
On aura aussi droit un petit changement de registre avec "Wish", un morceau de Dungeon Synth contemplatif et reposant, très minimaliste dans son "orchestration" (si je puis dire), mais qui conclue parfaitement cet album. THRONE OF IRON ne cache pas son goût pour le Dungeon Synth, genre qui ne semble désormais plus être seulement accaparé par les groupes de Black Metal.

Alors pour être franc, THRONE OF IRON n'est certainement pas la meilleure porte d'entrée pour l'Epic Metal (préférez lui d'autres groupes cités dans cette chronique), c'est avant tout une formation pour ceux qui sont acquis à cette noble cause, et la note finale doit être comprise dans cette optique. Nous n'avons donc pas affaire ici à un groupe renversant qui rebat les cartes du jeu (ou relance les dés devrais-je dire), mais à un excellent faiseur, qui assure dans son genre, se montre généreux et inspiré, et de surcroît n'est pas dénué d'humour (confère les quelques passages narrés entre certains morceaux, qui se finissent systématiquement sur une boutade). La production est très artisanale, les soli de guitare n'ont pas du tout cette flamboyance technique qui devient commune dans les groupes de Power/Prog/Thrash Metal, mais peu importe... Tout est une question de charme et pour moi ici il opère pleinement. Donc oui, si vous aimez l'Epic Metal, je vous recommande THRONE OF IRON.