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2012 2 Flesh Cathedral
2018 Revelation Of The Red Sword
 

- Style : Carpe Noctem
- Style + Membre : Sinmara
 

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SVARTIDAUƉI - Revelation Of The Red Sword (2018)
Par PERE FRANSOUA le 26 Mars 2019          Consultée 2050 fois

0 - Préambule :

À toi cher-e Lecteur-trice de NIME faisant partie de la majorité, pas toujours silencieuse, fan de Hard, qui attend avec espoir un MEGADETH, un SAVATON, bref à toi qui parfois évite de cliquer sur une chro au nom barbare et à la pochette bizarre, c’est ton moment culture, si tu veux avoir une micro-crédibilité sur ce qui se passe sur ta planète Metal, c’est l’instant push-up de rattrapage, j’ai écrit cette chronique pour toi.

Tu te dois d’aller écouter "Revelation Of The Red Sword" de SVARTIDAUÐI, ce sera ton devoir-d-après-la-classe, ce sera ton album de sale Black chelou de l’année, celui que tu n’aimeras sans doute pas du tout mais qu’il est indispensable que tu saches qu’il existe.

Ne me remercie pas, ça me fait plaisir. Ainsi commence la fiche de lecture, ou plutôt la fiche d’écoute.
[Pour les autres, ceux qui savent, eh bien, de toute façon ça fait belle lurette que vous arpentez le disque et vous n’avez pas attendu sur moi pour débusquer de la chronique sur la toile à son sujet. Vous pouvez aussi sauter l’introduction et passer direct à l’analyse du disque.]


1 - Introduction :

Depuis grosso modo 2012 et la sortie de "Flesh Cathedral" de SVARTIDAUÐI, l’Islande est devenue le nouvel eldorado du Black Metal. L’île volcanique, terre d’accueil des vikings venus de Norvège, a accueilli une version régénérée de son Black Metal. Régénérée, certes, mais pervertie, tortueuse et urbaine. Oubliez les forêts, il n’y a pas d’arbres en Islande, là tout n’est que désordre et saleté, rixe, chaos déstructuré.
SVARTIDAUÐI (la mort noire) s’est imposé comme le maître avec ce "Flesh Cathedral" qui, à l’instar du "Left Hand Path" d’ENTOMBED, est le coup de génie séminal qui définit tout un genre.
Dans son sillage émerge une série de groupes prolifiques, tous plus exaltants les uns que les autres, qui s’échangent allègrement leurs membres : SINMARA, CARPE NOCTEM, MISÞYRMING, NAÐRA...
En six ans et plus, on peut parler d’un véritable style avec son orthodoxie et ses réformistes, dont les principales composantes sont des compositions alambiquées, des vocaux gutturaux et des guitares tortueuses et dissonantes, le tout donnant l’effet d’un intense maelström déchiré par des éclairs éblouissants.
Chaque groupe a multiplié les EP introuvables et autres split à un titre mais personne n’avait pu sortir de second LP et c’était à se demander si la bouillonnante jeunesse de Reykjavík en avait encore dans le geyser.
Heureusement que dans la foi le doute est permis, les agnostiques prudents n’ont désormais plus à douter, la vague des albums sophomores arrive, l’excellent "Vitrun" de CARPE NOCTEM tout d’abord, prenant de vitesse "Revelation Of The Red Sword" de SVARTIDAUÐI, et puis le tout autant attendu "Hvísl Stjarnanna" de SINMARA qui paraît au moment où je tente de terminer cette chronique.


2- L’album en question

Voici donc le second opus des maîtres de la scène. Six ans d’attente et trois EP n’auront pas été vains car il s’agit d’un très grand disque.
Néanmoins, malgré l’incontestable réussite, je n’ai pas choisi de mettre le disque en Sélection du site, pour les mêmes raisons qui m’ont fait mettre le "Vitrun" de CARPE NOCTEM en exergue. SVARTIDAUÐI, avec son statut de leader absolu de la scène, n’a pas spécialement besoin d’être mis en lumière, et ensuite parce que l’opus pêche légèrement par excès de zèle ou de prétention, et ne s’impose pas toujours avec la même évidence que "Vitrun".

Voilà, je l’ai lâché ma p'tite analyse, comme ça, l’air de rien. Je reprécise, développe. "Revelation Of The Red Sun" est incontestablement une œuvre plus forte que moi. Une œuvre tellement foisonnante et riche qu’elle en devient prétentieuse.
La barre est cette fois trop haute pour la concurrence, mais aussi pour les auditeurs. Quand vous êtes le meilleur il y a toujours le risque d’en faire trop. C’est ce que j’appellerai le syndrome "Anthems To The Welkin At Dusk", celui qui vit EMPEROR quitter ses lambeaux de primitivisme occulte pour l’outrance virtuose épuisante.

Structures alambiquées en perpétuelle torsion, kyrielles de riffs par morceaux, entortillements ébouriffants des guitares, batterie tribale en contre-pied, production emphatique saturant l’espace sonore, il y a de quoi déboussoler et lessiver bien des auditeurs-trices. Pour cela le disque est encore plus difficile d’accès que le reste des productions islandaises mais en même temps la bande à Sturla Viðar sait nous charmer, nous récupérer au détour d’un riff entêtant, d’une ligne mélodique consolatrice ou d’un break surprenant. Malgré le trop-plein et le tournis, on se laisse promener par l’hameçon du puissant plaisir auditif. Car SVARTIDAUÐI n’a rien perdu de ses qualités, au contraire : il n’a fait que les confirmer et les magnifier au fil des ans et des EPs deux titres, dans ce qui s’impose comme une marche inexorable vers le progrès et le dépassement de soi.

En six ans le trio islandais a fait évoluer son propos et a repoussé ses propres limites. Comparer "Flesh Cathedral" et "Revelation Of The Red Sun" c’est mettre en perspective deux mondes opposés, l’un
viscéral et terreux, l’autre emphatique et solaire. Le monument de 2013 nous paraît désormais bien plus direct, primitif et finalement accessible, car malgré son opacité et sa vilenie il sait nous transporter d’une rive à l’autre du Styx dans un état d’hébétude comateuse. En 2019, c’est un tout autre niveau ésotérique qui nous est infligé par les organes de l’audition.
Suivant la trame initiatique du véritable chemin de la main gauche, nous conduisant de la destruction du monde matériel ("Flesh Cathedral" découpé en quatre titres comme les quatre points cardinaux), puis par la prison de la dualité ("The Synthesis Of Whore And Beast" découpé en deux titres femelle/mâle) jusqu’à la contemplation directe des arcanes solaires éblouissantes, "Revelation Of The Red Sword" donc, découpé en six chansons car le chiffre 6 est attribué au soleil, et aux délires kabbalistiques que seront le sephira de Tiphareth et son pendant maléfique le qlipha de Thagirion, c’est en tout cas ce que le groupe explique en interview.
Cela se double d’un gros clin d’œil au Manifeste du Futurisme de Filippo Tommaso Marinetti (publié en 1909) dont le titre du disque y est emprunté, dans une affirmation d’une marche en avant débarrassée du passé.

La musique traduit parfaitement le propos ésotérique et le parti pris philosophico-artistique. Éblouissement, toute-puissance, complexité réservée aux initiés, balancement entre la beauté (Tipharet) et l’horreur (Thagirion), le disque vous emporte dans un trip où notre pauvre âme de mortel se consume à toute allure en étant ballottée par le kaléidoscope de symboles dorés et aveuglants. La contemplation de la Vérité pure rend fou. La production massive et lumineuse accompagne ce foisonnement solaire, magnifique travail de l’éternel Stephen Lockart en son studio Emissary, offrant une traduction sonore à l’aveuglant éblouissement de la partition.
On ressent l’immense influence du travail du producteur jusqu’à nous faire furieusement penser à son propre groupe REBIRTH OF NEFAST sur un passage en seconde partie de "Reveries Of Conflagration", comme sculpté dans la brume lumineuse.

Nous sommes trimbalés dans les rayons brûlants de Sirius alors que nous avions l’habitude de ramper dans entre les chaires, dans les ténèbres étouffées de la Terre ("Flesh Cathedral".) L’album déboussole le fan, ce qui est tout à son honneur. L’acclimatation n’est pas aisée et le début de l’œuvre ne nous rassure point. "Sol Ascending" est un démarrage d’album déroutant, pas de blast, on ne dépasse jamais le mid-tempo, la batterie tribale casse les rythmes et démantèle les dynamiques, les riffs foisonnants sont en perpétuel changement. Mais même l’auditeur récalcitrant raccrochera les wagons dès le furieux "Burning Worlds Of Excrement". Enfin ! Voici le blast sauvage qui pulse cisaillé par les dissonantes guitares que l’on attendait, loué soit le buisson touffu et ardent d’arpèges aussi dissonants qu’entêtants. À sa suite, le multi-orgasmique "The Howling Cynocephali", pièce centrale tout autant que maîtresse, irrésistible autant que versatile (son départ MAYHEM-ien primitif, ces rebonds inattendus) nous mettra à genoux pour de bon. Quelle richesse ! Quelle inventivité !

Le reste n’est pas en reste, le plus pesant cohabitant avec le plus véloce, le mélodieux avec la virulence, et les idées surprenantes jaillissent, nombreuses. Ce seront des arabesques orientales ("Wolves Of The Red Sun", "Reveries Of Conflagration"), une longue montée emphatique vers la transcendance puis la sauvagerie d’un blast chaotique ("Wolves Of The Red Sun"), le contre-point d’un début mélancolique, d’un milieu fou-furieux et d’une fin qui n’en finit pas de se repousser en ralentissant ("Aurem Lux").


3 - Conclusion :

"Revelation Of The Red Sword" est totalement à la hauteur des expectatives et s’apprête à résister aux six prochaines années d’écoutes intensives et passionnées, même s’il offre une face neuve, car SVARTIDAUÐI a plus que muté, il s’est réinventé tout en gardant ses ingrédients et sa signature unique. Rassurons-nous, ils sont toujours bien là ces vocaux abyssaux, ces oscillations de rythmes ou cette écriture guitaristique unique (souvent imitée mais rarement égalée). Ils se voient extirpés de la matière corrompue vers la toute puissance de l’illumination spirituelle. On assiste à une explosion de la virtuosité et de la complexité, au risque de nous griller la cervelle, mais c’est aussi la révélation d’un sens mélodique affirmé et raffiné, accrocheur et finalement surprenant. Et il y a même de jolis soli poignants ("Sol Ascending").

En matière de production je regrette une légère sourdine sur la caisse claire qui noie un peu la dynamique globale, conséquence d’un choix facile à corriger, mais qui n’est pas aidée par le jeu tout en cassures et variations de Magnús Skúlason.
Et puis je continuerai encore et toujours à déplorer le recul de la basse dans le mix, même si c’est un fait acquis de longue date (depuis 2015 avec "The Synthesis Of Whore And Beast"). Certes elle est toujours bien audible mais je ne me remettrai jamais de l’omniprésence crâneuse de cette basse sale qui soufflait avec indécence comme une bête féroce sur tout le premier album.

Malgré les trois EP et les innombrables tournées, on pourrait penser que six ans c’est vraiment très long. SVARTIDAUÐI travaille comme ça. L’immense "Flesh Cathedral" n’était pas surgi de nulle part, sa maturation ayant pris de longues années. Et puis il faut dire que son guitariste compositeur, Þórir Garðarsson, grand démiurge des dissonances, est aussi l’un des guitaristes de SINMARA, le deuxième plus gros nom de la scène, dont le second album éblouissant sort seulement quatre mois après le disque dont vous venez de vous taper la chronique. Sortir deux œuvres aussi fortes et aussi riches en si peu d’intervalle, ça sidère légèrement, n’est-ce pas ?


P.S: muchas gracías a mí compañero Positron pour m’avoir laissé faire cette tartine à sa place.

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   PERE FRANSOUA

 
  N/A



- Magnús (batterie)
- Þórir (guitare)
- Sturla Viðar (vocaux, basse)


1. Sol Ascending
2. Burning Worlds Of Excrement
3. The Howling Cynocephali
4. Wolves Of A Red Sun
5. Reveries Of Conflagration
6. Aureum Lu



             



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