Le collectif artistique mené par le très prolifique Alex CF ne cesse de produire des groupes, souvent aussitôt nés que terminés, comme si la passion mise dans ces projets ne pouvait mener qu'à leur autodestruction. De fait, le leader de feu FALL OF EFRAFA est un homme qui aime aller sur différents fronts. Après MOMENTUM et LIGHT BEARER, il revient vers son amour principal dans MORROW : le Crust épique, avec une sacrée dose de Doom, et toujours cette force narrative dont le sieur a la maîtrise.

"Covenant Of Teeth" est un récit futuriste qui imagine les peuples tentant de survivre, revenus au stade primaire, dans un monde qu'ils ont détruit mais dont les vestiges d'un passé puissant les appellent de nouveau. Toujours versé dans la politique, le très écolo-warrior et antifasciste Alex, bien connu pour son art absolument fantastique, (je vous conseille d'aller voir son faux cabinet des curiosités fantastiques sur le net) développe ses thématiques favorites, déjà bien présentes dans FALL OF EFRAFA ou ARCHIVIST. Dans MORROW, la beauté ressort également du mélange des langues utilisées, sur une planète où les différences se sont accentuées entre les populations. La participation de plusieurs guests à l'album apporte une furie inédite, qui permet d'apporter énormément de variété et de souffle épique, en délogeant la voix d'Alex (qui n'a jamais été incroyable) de son piédestal.

MORROW est, en bon projet du patron, un rejeton clair de ce que l'on peut aimer dans FALL OF EFRAFA ou LIGHT BEARER. Un Crust très Sludgy, avec moult instruments à cordes types violoncelles pour dramatiser l'espace, avec toujours autant d'impact. "The Norr", meilleur titre de l'album, est par exemple superbe, et rappelle le Crust le plus fougueux d' "Owsla" aussi bien que la puissance Post-Hardcore la plus apocalyptique d' "Inlé". Bien évidemment, on retrouve les gimmicks des autres projets d'Alex, et "Forgiving Grin" pourra par exemple apparaître bien poussive. Aussi, rien de vraiment surprenant ne sortira de MORROW pour les amateurs de son travail, c'est certain, mais "Covenant Of Teeth" reste néanmoins beau, épique et tragique, des qualificatifs que l'on cherche avec force dans ce type de Crust narratif.

Les titres pourront paraître à rallonge pour ceux qui détestent prendre le temps, mais le voyage proposé par MORROW vaut le coup. L'univers dépeint est bien vivant sous nos yeux, les violoncelles côtoient les guitares lourdes de noirceur, les cris de plusieurs acteurs percent l'espace comme les flèches de ces guerriers perdus dans un futur où le langage est un autre adversaire. Une épopée de qualité donc, bien qu'imparfaite. En attendant, je l'espère, une suite, pour que se développe davantage cette bien belle musique.