Le rush créatif des débuts ressemble aux papillons d'une nouvelle relation amoureuse ; on multiplie les manifestations passionnées jusqu'à ce que le temps souffle tranquillement sur la flamme quand les vacillements sont devenus bancals.

Prenez l'Écossais Andy Marshall par exemple. Après avoir couché à droite et à gauche il y a une dizaine d'années, il a connu sa première relation sérieuse avec ASKIVAL, projet de Folk Metal Extrême chroniqué ici même par notre Playmobil à cornes. Quelques années plus tard, il mettait au monde une créature encore meilleure en ARSAIDH, du Black Atmo celtique. Marshall a ensuite changé son entité de nom pour SAOR, avec lequel il a sorti le très attendu "Aura" en 2014. Et l'an dernier, il créait FUATH ("haine" en gaélique), dont le premier album vient tout juste de sortir. Y'a pas à dire, notre ami Andy est encore dans sa lune de miel musicale…

FUATH se distingue assez facilement d'avec SAOR en supprimant toute trace folk. L'approche de Marshall est ainsi très directe ; du Black Atmo très accessible, axé sur les mélodies aériennes à mi-chemin entre la guerre et le miel. Bref, rien de neuf sous le soleil, vous avez déjà des dizaines de groupes en tête, vous n'apprendrez pas grand-chose aujourd'hui. On peut donc se demander si FUATH vaut le détour et s'il peut s'aimanter à vos albums de référence dans le genre. Sinon, le cerveau ayant ses limites, vous choisirez peut-être vous détourner de cet "I" et vous lâcher sur des terrains connus.

"I" se décline en quatre chapitres pas si distincts, pour 41 minutes de Black aux ambiances forestières coutumières, aux trémolos virils et touchants et aux tornades guitaristiques envoûtantes. "In The Halls Of The Hunter" donne le ton avec son ambiance à mi-chemin entre nostalgie et espoir musclé. Les riffs et mélodies nous happent hâtivement, Andy ne tourne pas autour du pot. "The Oracle" est assez sirupeuse dans le style, définitivement bien placée dans ce quatuor, en ce sens que son manteau lumineux permet une fine transition entre "Blood" et ses passages lyriques montés en épingle et "Spirit Of The North", qui ose les bris de rythme pour bien assoir sa thématique nordique. Il y a de bien jolies idées là-dedans, on se laisse prendre au jeu de Marshall, dont le chant est vraiment tertiaire, au grand plaisir des amateurs de guitares lancinantes et lunaires…

Vous aurez saisi que "I" est une énième trame sonore de qualité pour vos promenades en nature ou vos moments de contemplation. Mais est-ce suffisant pour se distinguer des pointures du genre ? Pas certain que FUATH arrive premièrement à supplanter son grand frère SAOR, beaucoup plus original. Et avec le nombre de solides formations Black Atmo, anglaises notamment, il faudra une tonne de marketing et un max de bruit pour lui garantir son île.

Car en fin de compte, FUATH n'est pas aussi mystérieux ou accrocheur que ses contemporains les plus illustres. Il s'en inspire, certes, mais cette nouvelle créature est assez soft dans le domaine, comme le Shoegaze dans un autre registre, ce qui la classe automatiquement dans une catégorie dont je ne raffole guère. Cela même si l'exécution est excellente et que les atmosphères sont de qualité. Mais il manque un plus, celui qui me fait retourner chez WODENSTHRONE, WINTERFYLLETH, BATTLE DAGORATH, MARE COGNITUM, PANOPTICON ou le défunt WITTR.

Pas mauvais du tout, les fans adoreront. Mais ça empeste le déjà entendu.