Je me tue à vous le répéter, non seulement sommes-nous loin de la fin des haricots en Metal extrême, mais il y a un vrai revival en frais de Black tout azimut, autant en Sympho qu'en Mélo ou en raw. Et ça tombe superbement bien, car les Hollandais de KJELD fusionnent ces trois genres sur leur premier et génial album "Skym", dont je suis incapable de décrocher. Drogué suis-je par cette pépite aussi variée que singulière !

Eh oui, première surprise : on a droit à un Black hollandais, alors qu'on entend clairement une mixture de raw Black scandinave et véloce à la TAAKE et de Black allemand pétrolifère et violent. J'ajouterais aussi une pincée de Black français style SVART CROWN pour le groove et l'atmosphère étouffante.

Ça c'est pour la moelle et le muscle, mais l'épiderme de ce monstre possède mille reflets changeants qui vous feront halluciner à chaque tournant. KJELD, jeune poulain affamé sorti de nulle part, arrive à planter de sublimes décors atmosphériques devant ses influences plus basiques, classiques. Deuxième surprise: le résultat détonne à un point qu'il est difficile de concevoir, surtout venant d'un nouveau groupe. Le style pratiqué par les Hollandais est alors plus ardemment qualifiable, car s'il se love parfois dans un raw Black primitif, les guitares mélodiques et les orchestrations discrètes – à part sur quelques plages – ne sont jamais loin pour griffer le moins avisé. Tout simplement brillant comme formule !

KJELD serait donc un prodige de Black Atmo/Mélo à couilles de titane. Mais attention, ce qui fait son charme, je le rappelle, est cette production imparfaite, bien que précise, évoquant les teintes brumeuses des archétypes Black métalliens. L'orage, la tempête de neige, la pleine Lune au crépuscule, les marais suintants, les créatures mythiques horrifiques, la pellicule cinématographique s'emballe et se déroule sur le tapis. Le film est long, mais on en veut toujours plus, on a envie de frissonner à jamais sur ces odes au statut culte indéniable.

Déjà, KJELD enflamme les neurones des initiés comme moi, frappe fort et arrive à broder des ambiances dorées touchant à toutes les strates du Black Metal. Cette épiderme caméléon est soignée, propre dans la saleté, surveillée de près aux manettes et transformée en cuir solide par un jeu inspiré, maîtrisé, par le quintette hollandais. La batterie est hyper forte, mais on s'y habitue, les guitares ronronnent et hurlent leur colère avec véhémence, la basse renforce le tout avec aplomb et le chant de Skier est juste assez "gouleux" pour couvrir l'ensemble d'une couche de mélasse infecte.

KJELD a pris 12 ans pour accoucher de son premier album, le bien nommé "Skym". Si la pochette trahit sa jeunesse et n'attirera pas le regard des plus sceptiques, vous devez passer par-dessus les apparences, endosser votre manteau le plus chaud et progresser dans ce blizzard de riffs et mélodies ahurissant. Le pire c'est que même si vous avez froid, vous aurez envie de continuer tellement KJELD a le don de bousiller les boussoles et de forcer les égarés à se perdre davantage dans ces contrées obscures.

De loin l'album de Black le plus inattendu de la part d'un débutant que j'aie écouté depuis belle lurette. De la dynamite, de l'énergie, de la puissance, de la virtuosité dans le chaos !

Très longue vie à KJELD, qui vient de se positionner dans mon top 3 2015 et donc fort possiblement dans mon top 10 annuel.

Podium : (or) "Gerlofs Donia", (argent) "Stoarm", (bronze) "Tûzen Sinnen".