EILERA revient après un "Fusion" (2007) en tous points remarquable. Rappelons qu’à la suite de leur rupture avec Spinefarm, nos amis se sont remis au boulot et voilà qu’à partir de fin 2009 jusqu’au printemps 2010 la version digitale de la première partie de ce "Darker Chapter And Stars" est progressivement distillée. Elle est suivie du second volet complet fin 2010, avant que l’album ne soit enfin disponible en support physique courant 2011.

Nous avons guetté cette offrande avec une impatience non feinte et de façon étonnante elle pourrait surprendre les amateurs du magnétique "Fusion". Souvenons-nous que celui-ci proposait un habile mélange de l’album "Facettes" et d’éléments plus Metal. Il semblerait à présent que la magie sylvestre et les voies oniriques qui rayonnaient sur les travaux antérieurs se soient ici quasiment évaporées. Le combo assombrit sensiblement son propos et de manière plutôt inattendue, les musiciens durcissent le ton en renforçant les guitares qui n’ont jamais été aussi prégnantes. Les instruments comme le violon et le violoncelle font quant à eux deux pas en arrière et ne sont que sporadiquement mis en valeur. Ces derniers disparaissent même à l’occasion et n’apparaissent que sur quelques morceaux. Un choix discutable au premier abord lorsqu’on connaît leur importance dans l’œuvre du groupe. La musculature métallique fera donc gagner une nette puissance de feu aux titres qui perdront peut-être en chemin une portion de leur précieuse originalité, alors que l’émotion est pour ainsi dire miraculeusement sauvegardée.

Malgré ces remarques, la vision passionnée d’EILERA convainc et conserve ses attraits sur le long terme, il s’agit à n’en pas douter d‘un véritable tour de force. Nous retrouvons bien dans cette œuvre toute l’inspiration qui irradiait l’opus précédent. Les riffs de Loïc Tézénas éveillent souvent l’intérêt et ses soli incisifs lézardent l’espace toujours avec pertinence. En outre, la voix sensible et charismatique d’Eilera reste évidemment admirable et son interprétation nous emporte dans tous les cas. La maîtresse de cérémonie nous gratifie d’un chant habité et d’une haute teneur évocatrice. Un vrai régal pour les sens et pour les auditeurs friands d’émotions véritables.

Les fulgurances sont nombreuses et la qualité d’écriture d’une constante efficacité. En témoignent les dynamiques et ciselés "Don’t Go Fight" ou "Passport Please", "Rob My Soul" au refrain fameux et l’incontournable "Fly" à l’astucieuse construction sertie de superbes mélodies, de crêtes saillantes et d’un refrain mémorable en espalier. Le titre rebondit après un break Heavy doté des meilleurs riffs de la galette. La magnifique ballade folk acoustique "Celtic" est la seule pièce qui renoue véritablement avec les ambiances du passé. Elle parvient par une succulente combinaison à allier l’esprit d’une Loreena Mckennitt et une saveur tribale irrésistible, un grand moment. Évoquons encore l’ingénieux "Lucie After War" et ses mélodies lumineuses ou le plus massif "Slow Down Time" aux riffs chaloupés BLACK SABBATHiens. Signalons également un triptyque final marquant aux morceaux plus lents et mélancoliques, accompagnés de mélodies délicatement façonnées.

L’œuvre qui ressemble à un disque de transition, ravira les amateurs de la formation. Nous le savons, la talentueuse Eilera reste cette artiste hors–norme qui plane au-dessus du morne quotidien et de la médiocrité ambiante. On sent que la belle nous cache encore beaucoup de trésors dans son escarcelle et qu’elle saura à nouveau nous étonner en atteignant les sommets dans de prochaines réalisations.