En prenant de l'âge et de la bouteille, l'homme en général et le chroniqueur musical en particulier devient plus difficile à convaincre et à séduire. C'est bien normal, ses goûts s'aiguisent en même temps qu'ils s'affinent, ses critères de sélection et d'appréciation se font plus précis, le sentiment de surprise et de découverte se fait moins présent. Cette baisse de l'enthousiasme est la plus cruelle envers les genres un peu superficiels ou considérés comme tels, à l'image du Hard FM ou de l'A.O.R. C'est vrai, ces genres relativement simples à comprendre et assimiler, souffrent aussi d'un manque de profondeur dommageable, qui rend la durée de vie des albums relativement limitée.

Tout cela pour dire que le nouveau HOUSE OF SHAKIRA (rien à voir avec la blonde colombienne) ne laisse pas de prime abord un souvenir impérissable. Évidemment, le groupe a de la bouteille (16 ans de carrière et 7 albums au cul) et a repris du poil de la bête depuis 2012 avec l'arrivée du chanteur Andreas Novak (MIND'S EYE) qui a permis au combo de regagner du galon l'année passée avec un album de fort belle facture. 18 mois plus tard débarque donc ce "Pay To Play", nouveau témoignage d'un A.O.R. maîtrisé et parfaitement calibré, à même de convertir de nouvelles ouailles.

Le hic, pour qui s'intéresse un minimum au genre, est que les Suédois ne déchargent leurs meilleures cartouches qu'une fois la première moitié de l'album passée. Il faut donc, en préambule, se farcir la ridicule "Pay To Play", à la construction tellement évidente que l'on se prend à fredonner le refrain avant de l'avoir entendu. Il en va de même pour "When The Cats Away", qui fait preuve d'une naïveté telle que l'on en vient à se demander comment le groupe a fait pour tenir plus de 15 ans avec une soupe telle que celle-ci.

"Pay To Play", l'album, souffre donc de cet écueil inhérent à l'A.O.R. qu'est la simplicité et la recherche de la mélodie à tout prix, au détriment de la profondeur des morceaux. Mais, comme frappé par la grâce, HOUSE OF SHAKIRA propose également un bon nombre de morceaux plus recherchés, plus sombres également, qui changent totalement la physionomie de l'album et lui confèrent un intérêt certain : on pense ainsi à "Dopamine Junkie", son refrain et son chant un poil agressifs, des riffs plus costauds, qui font du titre un véritable bonheur. "Tried And True", son escalade mélodique, sa rythmique plombée, ses ambiances bluesy et la splendide performance vocale de Andreas Novak en font également une grande réussite, tout comme le titre final, "Same Old Story", qui donne l'impression d'avoir affaire à un BON JOVI de la grande époque, aventureux et expressif.

On ressort donc de l'écoute conquis (s'il ont est un jeunot qui découvre le genre) ou mitigé, car ce nouvel album de HOUSE OF SHAKIRA propose, comme nombre d'albums A.O.R. parus ces dernières années, sont lot de réussites évidentes et de titres ratés. À chacun donc d'en retirer ce qui l'intéresse et de se forger sa propre opinion, à l'écoute d'un groupe loin d'avoir usurpé son statut d'incontournable du genre.