Avec ses deux premiers albums "Ô Laudate Dominus" et "Manifesting The Raging Beast", GLORIOR BELLI avait ravi les puristes du Black Metal. Ce fût alors une surprise lorsque le groupe expérimenta, en 2009, un mélange plutôt homogène de Black/Stoner sur "Meet Us At The Southern Sign". Ce nouveau son sale, brûlant, et plus lourd, n'avait pas ravi tous les fans, pourtant salué positivement par un bon nombre de critiques pour leur style innovant accentué d'une qualité considérable. C'est sur cette voie, sans trop d'étonnement cette fois-ci, que le groupe prit la route pour nous offrir, après deux ans et des changements de line-up mystérieux, leur nouvel album intitulé "The Great Southern Darkness".

Malgré le grand virage contrôlé en 2009, GLORIOR BELLI garde sa brutalité d'autrefois, tout en injectant de nouvelles influences Blues, Stoner, et même Doom. "The Great Southern Darkness" sera alors plus apprécié des fans de "Groove Metal" que de Black Metal. Julien, désormais unique tête pensante, aborde aussi sur quelques morceaux un chant clair qui, mêlé aux riffs blues crée un fort contraste avec la férocité des riffs plutôt black et du chant agressif.
On s'imagine ainsi sous un soleil épuisant, en plein désert, sud-américain, une bière à la main, lors des passages blues bien plaisants. Mais ce voyage se métamorphose en un monde de souffre et de flammes, aux côtés de monstres malsains et glauques... La pochette illustre plutôt bien cet aspect, même si peu originale au niveau du style graphique. Cependant, je vois encore mal le rapport entre le monstre représenté proche de la Méduse issue de la mythologie grecque et l'univers du groupe.

Le groupe confirme alors son nouveau style à travers des titres tels que "They Call Me Black Devil" ou "Bring Down the Cosmic Scheme". Deux morceaux représentatifs de la première partie plutôt puissante et technique de l'album. A la vitesse donnée en particulier par une batterie efficace, se mêlent des parties de guitare lead imprévisibles, donnant une tournure totalement "groovy" aux titres. En alternance avec des passages plutôt black et peu mélodieux, le contraste donne une véritable représentation déchaînée des capacités de GLORIOR BELLI.

C'est avec le titre éponyme très blues, placé en milieu d'album, que la décadence vient. Le morceau, en apparence calme, débutant par un chant clair sincère et désespéré, se teint peu à peu de sonorités plus lourdes, jusqu'à être quasiment entièrement Stoner sur sa dernière minute, un Stoner obscur. Le crépuscule vient, et avec lui, le chaos.

La rupture est créée, et "The Foolhardy Venturer" prend place. Résolument plus diabolique, cette seconde partie s'annonce toujours plus noire. Le morceau transpire et dégouline du Black originel du groupe, en moins froid et haineux. Au contraire, ces ambiances sentent la sueur et la chaleur exténuante. Cette impression se poursuit sur "The Science Of Shifting", où s'ajoute une certaine lourdeur, une violence malsaine. On s'en lasse pourtant vite... Les riffs s'éternisent, on se perd entre l'utile et ce qui semble de trop. On dirait une intro un peu longue pour finalement placer à la fin une partie mélodique qui flotte au-dessus du reste sans en atténuer la noirceur.

Mon gros coup de cœur est pour l'instant resté le morceau final, "Horns In My Pathway". Des couplets au chant clair ressort une intonation de fatigue et de désespérance sans pour autant tomber dans l'habituelle pleurnicherie mélancolique. Ce titre part de cette voix, accompagnée de guitares abattues et lancinantes et d'une batterie discrète, pour aller crescendo vers un Black effréné. Comme répété en début de couplet : "I'm on my way to the Devil". Ah, ce rythme ternaire et cette partie de basse sublime et hypnotique juste avant le final foudroyant... A travers un seul titre progressif, GLORIOR BELLI concentre ses influences, et révèle la maîtrise de son sujet.

Mais pourquoi n'y a-t-il pas d'autres titres aussi intenses ? Certains titres plus mélodieux sont les bienvenus mais méritaient peut-être d'être plus aboutis. "Negative Incarnate", plaisant à écouter, n'entre pas tout à fait dans la sphère que s'est créé GLORIOR BELLI, avec ses influences et une certaine harmonie unique.
Un autre point faible de cet album : l'effort fourni dans l'écriture des paroles. Certes, parfois poétiques, agréables à lire et écouter, cependant, on ne sait où il veut en venir, et toute cette dévotion à Satan semblait plus appropriée aux anciens albums qu'aux nouveaux.

Le groupe est ainsi encore monté d'un degré sur le plan de la qualité des compositions en comparaison des albums précédents. Elles sont plus complexes malgré l'absence de l'effet de surprise qu'avait suscité l'opus précédent. Le groupe prend pourtant désormais une direction précise : celle d'un Black Stoner où le contraste et l'innovation sont mis en valeur. On ne peut qu'espérer un successeur encore plus abouti et surprenant que "The Great Southern Darkness".

Note réelle : 3,5.