Je suis en manque de Black Mélo ces derniers temps. Je me demandais quand une formation me donnerait un solide coup de pied au cul avec ses airs pachydermiques mélodiques de la trempe de NAGLFAR, par exemple. En surfant au hasard, je suis tombé avec espoir sur les recrues de SVARTTJERN, des Norvégiens qui officient dans le Black/Death. Enfin, je pourrai peut-être avoir ma dose sans garrot… Au contraire de la gonz lacérée qui baigne dans son sang qu’on peut apercevoir sur la pochette dénuée de finesse. L’histoire nous apprendra qu’elle a sans doute écouté l’album plus de 100 fois d’affilée...

Je m’assoie et regarde le menu : peu salivant. Sept titres sur la déchéance humaine pour 31 minutes, de quoi penser que le combo essaie de nous refiler un EP ruminé et déguisé pour Halloween… La dernière fois que j’ai englouti un skeud de sept morceaux de Black, il durait plus d’une heure et me fout encore les jetons quand je vais me canter. Mais bon, comme le moine n’est pas jugé pour ses habits ni sa tonsure, on écoute et on se tait. SVARTTJERN n’en est qu’à ses débuts après tout, ils ont droit à une tape amicale sur l’épaule, d’autant plus qu’ils traînent un fort vent de sympathie sur le web. Or, la sympathie est une lame à deux tranchants et il est facile de s'y couper de la réalité.

On a effectivement droit à une copieuse mixture sur ce misanthrope chemin, qui déboule dans l’estomac comme un rocher se décrochant d’une crête pour aplatir une voiture qui passait par là. Et je vous avertis, dès que ce rocher a terminé sa course, il est temps de fermer le lecteur, car aucun autre ne descendra pour vous égayer. SVARTTJERN est un "one shot deal", comme disent les Américains requins de Wall Street (au fait, ils aimeraient que vous leur envoyiez de quoi bouffer – du caviar si possible). Une dose et vous balancez ce disque de Death brûlé au bout de vos bras vite fait. Quitte à aller le ramasser après votre opération aux tympans et vous le rejouer pendant des heures jusqu’à ce que vous ressembliez à la pochette.

Pourquoi tant d’enthousiasme ? Parce que du bloc de départ au fil d’arrivée ("Code Humani" - "Passion Of 7"), "Misanthropic Path of Madness" est un laboratoire de clonage. La batterie maintient le même rythme de dégénéré à double pédale (je reconnais mon si cher NAGLFAR bien malgré moi) et la gratte ne nous offre pas beaucoup de variété. Certes, elle est mélo et permute habilement les tempos, mais est plus souvent qu’autrement au plancher. Les constructions sont également redondantes : envol ultra violent, une minute de thrash à la force G, break, reprise et mort prompte. L’ensemble devient donc opaque rapidement, ne laissant pas énormément de place au dépassement. Seul le vacarme de HansFyrste étonne un peu à travers cette érection infinie de murs et la septième plage, chiffre chanceux oblige, se distance un peu du lot.

Après ce feu roulant au son monstrueux, avouons-le, on peut presque bénir le quintette d’avoir coupé dans le lard. Pas que ce soit archi mauvais et qu’on ait envie que ça se termine subito, mais un tel enchaînement de fureur ne nécessite pas un sempiternel alignement. Comme les meilleurs opus de THYRANE, "Misanthropic Path of Madness" suit la même ligne rigide d’un bout à l’autre, mais c’est une ligne parfaitement droite, sans cassures. Comme si on entendait une longue pièce de 31 minutes...

Défoulement linéaire sans uppercut, aux riffs basiques et à la couleur absente, le premier essai de SVARTTJERN est un album juste correct, à la limite de la parure. Soyons toutefois indulgent, les mecs sont assoiffés. Et nous aussi. Il y a toutefois loin de la coupe aux lèvres…