En tant que guitariste, je pourrais dire que j’ai un point commun avec Dean Lamb et Tobi Morelli. L’ennui, c’est qu'au regard de leur niveau stratosphérique, je ne suis plus vraiment sûr de connaître mon latin, et pour jouer la sécurité, j’avancerai que ma seule ressemblance avec eux, c’est qu’on est tous les trois chauves.

Ma remarque sur la qualité technique des musiciens s’applique d’ailleurs à l’ensemble des membres d’ARCHSPIRE, quand bien même elle demeure un élément régalien du Death Tech, à la différence près que cette escouade n’en joue pas un brin et ne montre aucune once de fanfaronnade ou d’outrecuidance. Les mecs sont détendus quoi, en réfèrent leurs lives totalement déjantés (pour rappel des faits, le chanteur/rappeur Oli Peters a pour habitude de lancer un tapis de Twister dans le pit et de déclencher un wall of death lorsque des malheureux spectateurs se retrouvent en position de Kamasutra).

Sauf qu’au lancement de chacune de leurs galettes, celle-ci ne faisant pas exception, rien ne laisse présager d’une quelconque rigolade. Tout est millimétré et exécuté à une vitesse qui dépasse l’entendement, et à chaque album d’ARCHSPIRE, les limites sont systématiquement repoussées, bien qu’il semblât impossible d’aller au-delà du précédent. "Relentless Mutation" avait mis la barre haute, et quatre ans après, l’entraînement et le dépassement de soi ont prouvé qu’il était possible de franchir ponctuellement les 400 BPM ("A.U.M.") et d’hybrid-picker sur une huit cordes sans faire de la bouillie malgré la distorsion. Et le plus beau, c’est que, toute proportions gardées car nous sommes dans un domaine de niche, la musicalité est toujours perceptible et appréciable : il ne s’agit pas uniquement d’un concours de vitesse où des crétins s’amusent à jouer le "Flight Of The Bumblebee" à 900 BPM. Le niveau de connaissance théorique et de perfection des cinq Canadiens atteint des sommets tels qu’ils savent où et quand s’arrêter pour conserver un sens aux titres de ce "Bleed The Future" - et pas uniquement sweeper pour sweeper, car, merci Captain Obvious, c’est le truc qui va le plus vite (coucou BRAINDRILL). Toutes les techniques possibles et imaginables sont distillées tout du long avec une aisance et une précision métronomiques.

Mention spéciale à Peters, qui n’est pas le dernier à démériter, car chanter par-dessus ces rafales relève de l’exploit, surtout au regard des paroles d’une chienlit à expulser… le forçant à "yaourter" certains passages, pour un résultat final amusant sans être ridicule.

Nous ne sommes plus réellement surpris du "talent" d’ARCHSPIRE, s’agissant de leur quatrième méfait. Reste donc simplement à être admiratifs du travail de ces forcenés qui cravachent pour repousser les limites d’un style parfois incompris des Metalleux eux-mêmes. Oui, ça fout mal au crâne, mais c’est un mal nécessaire pour continuer à faire évoluer la musique dans le bon sens.

Morceaux préférés : "Reverie On The Onyx", "Drone Corpse Aviator", "Golden Mouth Of Ruin".