Degemer mat les amis !

Il ne pouvait en être autrement ! Découvrir un groupe français officiant dans un Heavy Metal traditionnel de qualité, et émanant de mes contrées d’origine, à savoir la Bretagne, belle et profonde, il n’en fallait pas plus pour attiser ma curiosité et pour que je me décide à écrire sur le premier album tout frais tout chaud des Quimpérois à savoir "Le Dernier Rempart" sorti chez le label italien Gates Of Hell Records. On saluera là le bel artwork qui est en totale adéquation avec le contenu de l'album.

HERZEL (mot breton qui signifie résister, braver, affronter) est un pur produit du pays de Cornouaille, formation créée en 2013 et "Le Dernier Rempart", premier album studio du groupe, fait suite à une démo d’excellente qualité déjà, "Unis Dans La Gloire" (2015), et qui était composée de deux titres uniquement ("Nominoe" et "Unis Dans La Gloire"). Sur cette démo, HERZEL avait déjà affiché de très belles choses dans l’écriture des morceaux et se devait de maintenir un aussi bon niveau sur "Le Dernier Rempart" pour transformer l’essai. Et bien HERZEL a plutôt fait du bon boulot car c’est essai transformé !

"Le Dernier Rempart" est pourtant curieusement agencé avec seulement six titres au compteur dont un instrumental breton à l’état pur ("Le Dernier Rempart" avec sa mélodie si familière à mes oreilles, bombarde à l’appui, -instrument traditionnel breton qui 'symbolise' le son de la culture celtique en Bretagne-, et joué ici par un musicien professionnel -Ronan Le Dissez- et également frère du bassiste, instrument que l’on retrouvera également en fin d’album sur "L'Ultime Combat"), et qui « scinde » d’ailleurs l’album en deux parties.

Une première partie relatant l’histoire de la Bretagne et de ses combats. De la bataille navale qui voit s’affronter la flotte de Jules César contre celle des Vénètes et des peuples d’Armorique dans la presqu’île de Rhuys ("Maîtres De L’Océan"), alors que "La Flamme" parle du siège de la cité d'Hennebont en 1342 et par la même occasion de Jeanne de Flandres, personnage fascinant de la guerre de Succession en Bretagne. Son nom de famille était « The Flame » parce qu'elle détruisait ses ennemis en brûlant leur camp pour faire diversion. La seconde partie du disque est une histoire fictive écrite sous forme de trilogie, qui parle de la naissance mystique d’un guerrier et héros breton nommé Herzel (inspirée de "Gwerz Ar Tour Plomb"), qui enfant survécut à l’incendie de la cathédrale de Quimper en 1620 ("Berceau De Cendres"), celui-là même qui portera "L’Épée Des Dieux" pour délivrer la Bretagne ? ("L’Ultime Combat"). Nul ne le sait.

Quoiqu’il en soit et pour servir l’ensemble de ces textes (les rimes sont soignées c'est à souligner) et bien évidemment aussi de ces faits historiques, HERZEL nous propose ici un Heavy Metal traditionnel, plutôt ancré dans les années 80 (pas si étonnant quand on voit les t-shirts arborés par les membres du groupe, VIRGIN STEELE, CANDLEMASS, JUDAS PRIEST, MANILLA ROAD ou encore le "Blackout" de SCORPIONS), et chanté dans la langue de Molière s'il vous plaît. Un Heavy Metal très énergique, pas vraiment agressif, mais qui vous fouette telle une brise fraîche venant de la mer, et agrémenté qui plus est de touches bretonnes (influences celtiques) très palpables au demeurant avec des mélodies atypiques à la guitare qui ne seront pas sans rappeler non plus un certain groupe de Rock nommé MATMATAH qui en son temps avait fait un tabac avec "La Ouache" (1998).

Ceci étant, la comparaison avec le groupe de Rock breton ne vaut bien évidemment que pour ces quelques mélodies bretonnes glissées ici et là (l’entrée en matière de "Maîtres De L’Océan", l'épique "L’Épée Des Dieux", l’introduction soignée de "Berceau De Cendres"), d’autant qu’HERZEL, contrairement à MATMATAH, ne les utilise qu’avec parcimonie et ne dénature en rien le caractère Heavy Metal de l’ensemble.

Car nous sommes bien d’accord, il s’agit bien ici de Heavy Metal, épique par endroits, plutôt alambiqué mine de rien, pour ne pas dire aventureux la plupart du temps. Les titres sont globalement assez longs (plus de huit minutes pour "Maîtres De L’Océan", plus de sept minutes pour "Berceau De Cendres" et pour "L’Ultime Combat") et proposent des structures assez complexes au final (presque progressives sur "Berceau De Cendres") offrant du même coup énormément de variations mais toujours avec ce souci permanent de cohérence et de fluidité (les enchaînements sont pour la plupart limpides).

L’ensemble met en scène des rythmiques plutôt solides ("La Flamme", "Maîtres De L’Océan" sur lequel la batterie est mise en avant), parfois galopantes ("L’Ultime Combat"), des riffs plutôt simples mais toujours très efficaces (l’excellent "L’Épée Des Dieux"), des refrains fédérateurs et également une multitude de soli toujours hyper mélodiques qui abreuvent avec brio l’ensemble des compositions et c’est véritablement un des points forts de l’album.

Pour illustrer cela, on retiendra dans le genre, le très dynamique "Maîtres De L’Océan" qui met justement en valeur le gros travail réalisé au niveau des guitares (des guitares assez lisses globalement) avec ce sens inné de la mélodie, alors que "La Flamme" un brin plus percutant et plus sombre aussi, rappellera de son côté un certain MERCYFUL FATE (oui, oui, vous avez bien lu) avec non seulement son démarrage en trombe, ses riffs et ses soli si caractéristiques mais également avec les vocalises de l’excellent Thomas Guillesser qui va même jusqu'à pousser des cris à la King Diamond.

Ce qui m’amène justement à donner mon avis sur les vocalises de Thomas G. qui, s’il ne possède pas une gamme vocale hyper étoffée (on peut aussi lui reprocher un manque d'agressivité, mais personnellement je trouve qu'il colle parfaitement aux compositions), il assure vraiment de son chant clair et puissant et toujours juste ("Berceau De Cendres"), de son timbre assez unique et presque juvénile ce qui le rend d'ailleurs très plaisant à entendre. En tout cas, Thomas Guillesser apporte incontestablement ce petit quelque chose en plus dans le paysage musical d’HERZEL.

Pour conclure, ce disque est une petite perle de Heavy Metal traditionnel (et cela n'a rien à voir avec le chauvinisme soyons clairs !), qui aura nécessité tout de même cinq années de travail, et marque une évolution par rapport à la démo de 2015 (normal serais-je tenté de dire !), notamment au niveau du son qui est plus puissant, plus clair et moins brut (enregistrement en deux temps -contexte sanitaire oblige-, la batterie au studio Le Novomax, à Quimper, début 2020, le reste des instruments dans le home studio de Gurvan Lardeux, l’un des deux guitaristes, en juillet 2020). "Le Dernier Rempart" possède donc de solides compositions, toujours très cohérentes et bien pensées, ce qui traduit là d'ailleurs un travail d'écriture remarquable. Bien évidemment, les fortes colorations bretonnes qui sont présentes sur "Le Dernier Rempart", ainsi que les mélodies qui vont avec, font de lui un disque qui sort véritablement de l'ordinaire dans le paysage Metal actuel, loin des stéréotypes du genre. Venez donc tenter l'aventure HERZEL !

Note : 4/5.

Morceaux préférés : "L'Épée Des Dieux", "Maîtres De L'Océan", "La Flamme".