Une origine exotique, un nom de groupe improbable, un titre d'album encore plus improbable, un concept basé sur l'ancienne culture maya, une pochette à la Star Wars aux reflets d'or. Et tout de suite, quelques fossoyeurs de tombe s'intéressent à la chose. L'originalité dans le Black Metal, comme le gage d'une rumeur positive, un buzz quasi assuré, une nécessité au sein d'un milieu qui pullule, qui grouille de formations toujours plus obscures et infécondes. L'air vient à manquer, il faut savoir se faire remarquer.

Mais quand l'écrin n'est que cache-misère pour masquer l'inanité d'un propos, la terrible banalité d'un décor sonore…

Au contraire de tout ce qu'on aurait pu croire et espérer, XIBALBA navigue en eaux connues. Un black garage punkoïde comme tant d'autres avant lui, un relent de préhistoire, un combo mexicain se gavant de crudités cultivées par une cohorte de prédécesseurs qu'il serait bien inutile de nommer. Le pire donc ? Un disque à jeter ?

Eh bien non, car si XIBALBA, au contraire de tout ce qu'il a voulu nous faire croire en développant son image, ne fait preuve d'aucune véritable originalité musicale, il peut pourtant s'enorgueillir d'un fond de caractère, d'une humeur différente, d'une tendance à la schizophrénie lancinante bien difficile à décrire.
Première courte idée, cependant importante à souligner, la volonté achevée de respecter les limitations de vitesse. Tandis que tant d'autres s'acharnent à exécuter leur office bruyant à une vitesse qu'ils croient sortie du plus profond des enfers, XIBALBA traîne la patte et préfère mouiller dans une eau putride certes, avant tout stagnante. Du mid-tempo qui ne cède jamais sa place, même durant quelques fausses accélérations nourries au frein à main. Souvent lancinant, d'une allure médiocre, un vrai changement, l'assurance pour l'auditeur de ne pas se laisser submerger par du blast-beat gras et indigeste.

Autre trouvaille, encore bien plus intéressante et infiniment plus complexe à concrétiser : la naissance d'un climat nimbé de mystère, un occultisme tropical et dangereux, un rite inconnu venu d'un autre continent. Et d'un coup, le puzzle commence à s'emboîter. "Furor Antiquus", "Vuch", "In Daemones Imperium", un canevas classique mais déjà de sombres respirations. "Carchah" et les pièces se mettent à s'imbriquer à la perfection. "Carchah", drôle d'instrumental nauséeux prenant sa source dans un folklore d'Amérique latine. A partir de là, les titres s'enchaînent et le spectacle devient de plus en plus riche. Une trame toujours empreinte de riffs sortis de la cave mais des effluves qui hypnotisent. "Bolontiku Vahom" et la transe prend possession de l'auditeur. Percussions minimalistes, d'un autre âge et d'une autre civilisation, rythme chaloupé dormitif.

Un bien curieux disque que ce "Ah Dzam Poop Ek", un disque qui assume son amateurisme et qu'il serait malhonnête de qualifier de révolutionnaire, mais un charme indicible suffisant pour le classer bien au-dessus de la horde des galettes Black evil war Metal trop souvent portées aux nues sans que personne ne comprenne vraiment pourquoi.

Et XIBALBA, le monde souterrain gouverné par les dieux de la mort et de la maladie dans la religion maya, peut s'en aller, trois étoiles très scintillantes au poitrail. L'underground sait encore révéler quelques talents différents, une affirmation rassurante pour l'avenir, quand bien même cet opus aurait déjà 15 ans d'âge.